Archives mensuelles : juillet 2015

Le Cameroun est un pays souverain

Mahamat Paba Salé, ambassadeur du Cameroun en Russie

Entretien avec Mahamat Paba Salé, ambassadeur du Cameroun en Russie

La Russie et le Cameroun entretiennent des relations anciennes. A titre de rappel, les deux pays ont établi leurs relations diplomatiques le 22 février 1964. Aujourd’hui, la Russie et le Cameroun renforcent leur partenariat bilatéral, et ce d’une façon dynamique. A ce titre, nous recevons Mahamat Paba Salé, ambassadeur de la République du Cameroun en Fédération de Russie.

Sputnik: Quelle évaluation donneriez-vous globalement des relations entre la Russie et le Cameroun?

Mahamat Paba Salé: Ces relations sont globalement satisfaisantes si l’on prend en compte les nombreux échanges entre les deux pays dans divers secteurs. Mais, du fait de la globalisation conjuguée à la volonté commune des Présidents Paul Biya d’une part, et de Vladimir Poutine d’autre part de dynamiser cette coopération, ces relations sont appelées à se diversifier et à se consolider davantage.

Sputnik: On sait que le Cameroun mène une lutte sans relâche contre la secte Boko Haram. Selon vous, son éradication se fera dans un avenir plus ou moins proche ou cela risque de prendre un certain temps?

M.P.S: Le Cameroun partage une frontière de plus de 1700 km avec son grand voisin le Nigeria. Suite à diverses incursions armées de cette secte terroriste basée dans ce pays voisin, par souci de protéger ses citoyens des exactions et atrocités des gens sans foi ni loi, mais aussi pour préserver l’intégrité de son territoire, le Cameroun a dû déclarer la guerre à cette nébuleuse terroriste, aux côtés d’autres pays voisins du Nigeria dont le Niger et le Tchad notamment, qui sont au front dans cette lutte. Ce combat qui fait partie de l’un des défis sécuritaires du monde d’aujourd’hui, nul ne sait quand il prendra fin. La conviction de mon pays est que, grâce à une synergie des actions des pays directement touchés par les exactions de cette nébuleuse, et à la coopération internationale, Boko Haram finira par être vaincu.

Sputnik: On observe en ce moment un renforcement important des relations entre le Cameroun et la Russie. Notamment dans le domaine du partenariat militaro-technique. Cela contribuera-t-il à l’éradication du terrorisme au Cameroun et plus globalement dans la région?

M.P.S: Le renforcement des relations avec la Russie n’est pas simplement dans le domaine militaro-technique qui est certes dans une perspective dynamique, mais il rentre dans la stratégie globale de diversification des partenariats que le Cameroun a entrepris dans un monde de plus en plus concurrentiel. En ce qui concerne le terrorisme qui de notre point de vue est une menace globale, un seul Etat ne peut venir à bout de cette lutte. Mon pays remercie la Russie pour son soutien dans le cadre de la lutte qu’il mène contre le terrorisme de Boko Haram.

Sputnik : Selon vos observations, ce rapprochement russo-camerounais, comment est-il vu par d’autres partenaires de votre pays, notamment les pays occidentaux?

M.P.S: Le Cameroun est un pays souverain qui a entrepris de diversifier ses partenaires pour aspirer à l’émergence à l’horizon 2035. Or vous le savez tout autant que moi, qu’il ne saurait y avoir de développement si la sécurité aussi bien d’un pays que de ses citoyens n’est pas garantie. Les partenaires occidentaux du Cameroun en sont pleinement conscients car de par sa position stratégique dans le Golfe de Guinée et des nombreuses ressources dont il regorge, le Cameroun doit se prémunir de toutes sortes de menaces qui peuvent hypothéquer cet objectif prioritaire pour le Gouvernement qu’est la lutte pour la préservation de la dignité humaine.

Sputnik: Les pays membres des BRICS ont désormais officialisé la création de la Banque de développement des BRICS. Parmi les priorités de ladite banque figurent les projets sur le continent africain. Doit-il y avoir une interaction plus importante entre l’Afrique et l’alliance BRICS?

M.P.S: Le problème prioritaire pour une réelle émergence de l’Afrique, c’est le financement de son développement. C’est donc à juste titre qu’en tant qu’Africains, nous pouvons nous réjouir de la création d’une alternative dont la particularité est qu’elle est portée par d’autres pays émergents à même de susciter des mécanismes novateurs pour financer le développement des pays africains notamment, aux côtés des acteurs traditionnels du monde de la finance internationale. En attendant de juger sur pièces l’apport de ce nouveau mécanisme de financement du développement, notre humble point de vue est que la nouvelle banque de développement soit proactive dans un partenariat novateur à établir avec l’Afrique.

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20150729/1017279226.html

Mikhail Gamandiy-Egorov

Navires russes dans le Golfe de Guinée : une présence stratégique

Photographie par satellite du golfe intérieur de Guinée

La coopération russo-africaine commence à prendre, ou plutôt reprendre, véritablement forme.

Après les pays d’Afrique du Nord (Egypte, Maroc, Algérie, Tunisie) et du Sud (Angola, Afrique du Sud, Zimbabwe, Namibie,…), avec lesquels la Russie connait traditionnellement des relations assez intenses, la présence russe commence à s’élargir, ou plutôt revenir dans les autres régions africaines.

Une présence un peu oubliée depuis l’éclatement de l’URSS et les années de remise en rails de la nation russe.

Après le Cameroun, avec lequel une page fort intéressante s’est ouverte récemment, notamment sur le plan militaro-technique et la formation des officiers camerounais en Russie, un accord très important a été signé cette fois-ci avec la Guinée équatoriale, acteur important aussi bien dans la région centre-africaine qu’au sein de tout le continent.En effet, la Russie et la Guinée équatoriale ont signé il y a quelques jours un accord prévoyant le ravitaillement des navires de guerre russes dans les ports équato-guinéens, ainsi qu’une entrée simplifiée pour ces navires. A ce titre et suivant la signature dudit accord, une escouade de navires de guerre russes, notamment le croiseur lance-missiles Moskva, sont entrés dans le port de Malabo, la capitale de la Guinée équatoriale. L’accord prévoit d’ailleurs également un renforcement de la coopération entre les forces armées, y compris navales, des deux pays.

A noter qu’il ne s’agit non pas d’une base navale russe en Guinée équatoriale, mais bien d’une coopération pour le ravitaillement des navires russes. Cet accord est d’autant plus important qu’il permet aux deux nations de passer à une nouvelle étape dans leur partenariat bilatéral. Le Golfe de Guinée est un endroit stratégique et le fait que les navires russes pourront s’y ravitailler constitue bien évidemment une avancée très notable pour la Russie. Quant à la Guinée équatoriale, cela lui permet de lancer une coopération stratégique avec un pays dont elle partage un bon nombre de valeurs et de visions communes. Et cela renforce également sa capacité à pouvoir lutter efficacement contre le fléau du terrorisme qui touche des pays avoisinants, ainsi que de pouvoir résister à d’éventuelles interventions extérieures.

Il faut bien le rappeler, après la mort de Mouammar Kadhafi et la chute de la Jamahiriya libyenne, la Guinée équatoriale s’est décidée à devenir l’un des nouveaux porte-flambeaux du panafricanisme sur le continent. Et le pays possède un certain nombre de raisons pour cela. Le pays est leader en termes de revenu moyen par habitant sur le continent africain (sources: Banque mondiale). Un revenu moyen qui dépasse d’ailleurs celui d’un certain nombre de pays membres de l’Union européenne…D’autre part, la Guinée équatoriale fait partie de ces pays africains qui tout en étant ouverts aux investissements étrangers, ne permet pas pour autant l’exploitation de ses ressources dans une relation de gagnant/perdant par les puissances occidentales, comme c’est encore le cas dans grand nombre de pays du continent. Et comme par hasard, le président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, fait partie des leaders africains les plus vivement attaqués par le mainstream médiatique occidental, y compris par les principaux médias français.

Il est vrai que tout président africain aux idées révolutionnaires et panafricanistes, qui de plus ne permet pas la gérance des ressources nationales aux élites occidentales (le vol pur et simple en d’autres termes), ne pourra certainement jamais attirer la sympathie des élites de l’Occident, qu’elles soient politiques, financières ou médiatiques.

En tout cas, la Russie confirme son retour véritable en Afrique. Un retour qui était attendu des deux côtés. Beaucoup de leaders, d’intellectuels et de représentants de la société civile d’Afrique le voient d’un œil très positif. Les élites occidentales, elles, bien évidemment totalement à l’opposé. Mais dans un monde multipolaire, il faut se faire aux nouvelles réalités.

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20150728/1017247240.html

Mikhail Gamandiy-Egorov

L’Angola, terre d’accueil

La République d’Angola, devenue terre d’accueil pour grand nombre de migrants européens (rien que les citoyens portugais qui y vivent et travaillent sont aujourd’hui plus de 200 000).

Comme quoi, le processus migratoire va aussi dans l’autre sens. L’Occident semble parfois l’oublier. Bravo l’Angola !

Afrique: faut-il en finir avec le franc CFA?

Billet de 500 francs CFA

René Kimbassa est un journaliste et blogueur panafricain, originaire de la République du Congo. Il est connu pour ses nombreuses interventions en faveur de l’émancipation du continent africain face à l’Occident, ainsi que pour la défense de la souveraineté des Etats africains.

Sputnik: Juste après le référendum grec à l’issue duquel la majorité des citoyens de ce pays ont exprimé leur désaccord face aux propositions de la Commission européenne, la BCE et le FMI sur la dette, ce qui était incontestablement un coup sérieux pour les élites bruxelloises, vous aviez fait un article faisant le parallèle entre ce référendum en Grèce et la situation en Afrique avec le franc CFA, monnaie de plusieurs pays africains imprimée en France jusqu’à aujourd’hui. Vous vous êtes d’ailleurs posé la question de savoir si « le courage du peuple grec devrait pousser les peuples africains à en faire autant »? Expliquez-nous votre position.

René Kimbassa: Le référendum grec contre les propositions de la Commission européenne, la BCE et le FMI sur la dette est un signal pour les peuples d’Afrique.La seule variable d’ajustement des institutions financières internationales c’est la rigueur sinon rien, leur réponse à toutes les questions, un refrain qui a été repris en chœur dans le cas de la crise grecque en méprisant le peuple souverain. Les dirigeants semblent avoir oublié l’étymologie du mot démocratie composé du grec « demos », le peuple « qui habite la cité » et du grec « kratos », celui qui est fort, puissant, au sens de celui qui est « capable de gouverner ». Autrement dit c’est le peuple qui gouverne.La monnaie est un des piliers de la souveraineté d’une nation mais dans le cas grec nous observons que les représentants du peuple n’ont pas de décision souveraine, c’est pire quand il s’agit de la situation des pays africains de la zone franc CFA, fabriqué non pas en Afrique mais en France. Ce qui signifie que par exemple toute dévaluation est décidée par le gouvernement français. Cela pose un grave problème de souveraineté. Le parallèle avec la Grèce c’est que l’Afrique doit revenir à la base, à savoir la démocratie, autrement dit au peuple.

Sputnik: Le franc CFA est-il un instrument néocolonial? Si oui, en quoi?

René Kimbassa: Les Africains de la zone franc CFA utilisent une monnaie qui appartient à la France, dans ce cas nous sommes dans un système de domination, donc néocolonial. Le système CFA permet le verrouillage économique d’un pays africain par la France. Prenons l’exemple des comptes d’opération qui font que les liquidités des pays africains francophones se trouvent dans la trésorerie française. N’importe quel dirigeant africain de la zone franc ne peut pas développer son pays sans la volonté de la France. C’est une atteinte à l’indépendance. Dans un tel système, si je veux, par exemple, vous acheter un produit, vous devez donner l’argent à la France qui elle imprimera des CFA pour m’en donner une partie. Cela s’appelle comment? Je ne trouve pas d’autre mot que colonisation.

Sputnik: Pensez-vous qu’on puisse effectivement voir à terme des référendums sur l’annulation du franc CFA dans les pays africains concernés? L’Elysée ne risque-t-elle pas de faire tout son possible pour empêcher le déroulement de tels référendums? Surtout lorsqu’on se souvient des cas de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire et de Mouammar Kadhafi en Libye.

René Kimbassa: Regardez bien la situation du monde, les peuples ouvrent les yeux un à un, la question de souveraineté est au cœur des aspirations, ce qui fait peur à la prédation internationale qui bien sur fera tout pour empêcher l’éveil des consciences, ça a déjà commencé! C’est pour cela que dans cette action d’émancipation l’Afrique aura besoin de partenaires, car c’est vrai, la sortie de la zone CFA entrainera une réaction violente de l’Occident. La Russie peut jouer un rôle stratégique dans le soutien à l’Afrique dans son indépendance véritable. Membre du Conseil de sécurité des Nations unies, la Russie a un droit de véto face aux éventuelles résolutions farfelues de l’Occident. Il faut en outre signer des accords militaires avec la Russie pour faire face aux déstabilisations des élites occidentales, dont les contours sont connus aujourd’hui, la situation de la Syrie nous l’enseigne. Trouver les moyens logistiques car sortir du CFA, c’est battre sa propre monnaie. Pour cela, il convient de mettre en relation nos différents économistes pour identifier les solutions solides et durables. Le partenariat devra être plus large grâce aux BRICS par exemple, en effet l’histoire récente de la Cote d’Ivoire a montré que l’Occident pratique la politique d’embargo, souvenez-vous que pour punir le peuple de Côte d’Ivoire resté fidèle au président Gbagbo, l’Union européenne avait décrété un embargo sur les médicaments. Pour se protéger, il convient pour l’Afrique de diversifier ses partenaires dans le sens d’un monde multipolaire.

Sputnik: N’avez-vous pas l’impression que les élites occidentales n’apprécient aucunement les référendums en tant qu’expression de la volonté populaire? Crimée, Donbass, Grèce… Partout où cela va à l’encontre de leurs intérêts, on observe des critiques et oppositions virulentes de leur parts, juste à des degrés différents selon les cas?

René Kimbassa: Le système occidental est-il démocratique dans le sens grec du terme? La réponse est non. Pour exemple, en France, quand le peuple vote NON à l’UE, les élus font le contraire, il n’y a pas de démocratie, donc les élites occidentales ne peuvent pas aimer les référendums qui sont l’expression du peuple. Cette élite attachée à la finance internationale n’aime que les chiffres des profits.

Sputnik: Selon vos observations, les citoyens africains dont les pays ont toujours le franc CFA, sont-ils en majorité opposés ou favorables à cette monnaie?

René Kimbassa: Mettons en place un référendum pour le savoir!

Mon point de vue est que comme il y a trop d’atteinte à la souveraineté des pays africains, il convient de revenir à la base de la démocratie et donc de faire appel au peuple africain par le biais d’un référendum au sujet de la sortie du franc CFA. Cela permettra aux dirigeants de s’appuyer sur la volonté du peuple. Nous avons aujourd’hui besoin d’un peuple en phase avec son leader et un leader en accord avec son peuple.

J’appelle la société civile à se saisir de cette question du référendum sur la sortie du franc CFA dès maintenant, et organiser des causeries d’information et de mobilisation dans les villages et quartiers. Faire signer des pétitions et lancer le processus par la base.

Sputnik: Si les Etats africains sortent, à un moment ou un autre, du système du franc CFA, quel effet cela aurait-il sur les intérêts des élites financières à qui profite ce système?

René Kimbassa: En tant que citoyen, c’est l’intérêt du peuple qui m’intéresse sous la conduite d’une élite attachée au peuple, pour le peuple avec le peuple!

Voilà en gros ce que je peux dire sur un éventuel référendum sur la sortie du CFA. Revenir à la base, la démocratie, avec un partenariat dans l’esprit d’un monde multipolaire.

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20150715/1017036382.html

Mikhail Gamandiy-Egorov

Vidéo de la rencontre entre les présidents sud-africain et russe, Jacob Zuma et Vladimir Poutine, dans le cadre du Sommet des BRICS à Ufa, en Russie.

Poutine a notamment remercié Zuma pour le développement du partenariat russo-sud-africain, aussi bien au niveau bilatéral que dans le cadre des BRICS, de l’ONU et des autres organisations internationales. Il l’a également remercié pour le soutien de l’Afrique du Sud dans la coordination des contacts entre l’Union africaine et la Russie.

Le leader sud-africain de son côté a confirmé une fois de plus que la République d’Afrique du Sud est un véritable ami de la Fédération de Russie. Et qu’il en sera ainsi pour toujours. Pour finir, il a affirmé avec certitude que les BRICS ensemble iront très loin.

Yes, we can!

Les BRICS en chiffres

A la veille du sommet des BRICS et de l’OCS (Organisation de coopération de Shanghai) à Oufa, capitale du Bachkortostan, en Russie, voici le tableau qui illustre ce que nos 5 pays représentent.

Entre autres : 42% de la population mondiale (bientôt plus), 26% de la surface terrestre mondiale, 30% du PIB mondial.