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Mali vs Côte d’Ivoire: lorsque la dignité doit faire face à la sous-traitance pro-occidentale

16.09.2022

La crise actuelle entre Bamako et Abidjan dépasse le cadre strictement régional ouest-africain. Il s’agit en effet et avant tout d’une confrontation entre deux visions diamétralement opposées. L’une misant sur la souveraineté nationale et les valeurs panafricaines, l’autre restant dans une posture de sous-traitance en faveur du néocolonialisme occidental. Et le cadre à proprement dit «régional» prend de plus en plus une tournure continentale.

Depuis l’arrestation, en juillet dernier, de près d’une cinquantaine de mercenaires ivoiriens par les autorités maliennes, la crise ne cesse de s’envenimer entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Ceci étant dit, nombreux sont les citoyens ivoiriens qui soutiennent le positionnement du voisin malien dans ce dossier.

Au-delà de l’efficacité à travers laquelle a eu lieu cette arrestation des dits mercenaires, dont l’objectif visait fort vraisemblablement à tenter un énième coup d’Etat pro-occidental en terre malienne, ou du moins à créer des problèmes sécuritaires pour l’Etat malien, la fermeté avec laquelle le pouvoir du Mali a maintenu sa ligne jusqu’à maintenant – a été approuvée non seulement par des millions de Maliens, mais également un très grand nombre d’autres citoyens de pays africains.

Pendant ce temps, le président ivoirien et l’un des principaux représentants restants du système néocolonial de la Françafrique, tente à nouveau de mobiliser un front anti-malien, notamment au niveau de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

Bien qu’il soit nécessaire de reconnaitre – avec de plus en plus de difficulté, à l’heure où de nombreux chefs d’Etat de la région, tout comme à l’échelle continentale, sont de plus en plus à l’écoute des aspirations pro-panafricanistes et pro-multipolaires de leurs citoyens. Avec en prime le rejet des schémas si longtemps entretenus par l’establishment occidental sur le continent.

D’autant plus que les méthodes de déstabilisation, y compris à travers l’implication de mercenaires, sont fort loin d’être nouvelles et représentent aujourd’hui un défi non plus seulement pour les Etats africains ayant ouvertement coupé le cordon «ombilical» avec l’Occident collectif, mais également tous les pays qui sont en voie de le faire ou du moins qui adoptent un positionnement de plus en plus équilibré, en s’éloignant progressivement du diktat occidental.

Faudrait-il à ce titre rappeler l’implication de mercenaires français, notamment en République centrafricaine dans un passé récent? Depuis, Paris et d’autres capitales nostalgiques de l’unipolarité tentent par tous les moyens de maintenir cette méthode d’interférence et de déstabilisation à l’encontre des Etats libres d’Afrique, mais avec une mise à contribution plus active des principaux sous-traitants. Comme celui du régime ivoirien.

Néanmoins, il est important de constater qu’au-delà de l’approche patriotique et ferme avec laquelle agissent des Etats africains souverains comme la RCA ou le Mali, on assiste depuis assez récemment à une augmentation nette de l’efficacité en matière de sécurité et des services de renseignement dans le cadre de ces pays. Rendant ainsi la tâche des déstabilisateurs traditionnels et de leurs forces sous-traitantes – de plus en plus difficile.

De manière générale et dans la crise qui oppose le Mali au régime ivoirien actuel – la vérité et la dignité semblent prendre le dessus sur le mensonge et les méthodes criminelles. Et cela est connu aussi bien des citoyens maliens qu’ivoiriens, ainsi que des autres peuples du grand continent africain. La confrontation entre les deux visions prend désormais ouvertement une tournure réellement continentale. Et au vu des processus en cours, aussi bien en Afrique qu’à l’échelle internationale, il devient beaucoup plus facile de comprendre les vives inquiétudes des régimes occidentaux et affiliés.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4253

La résistance du Mali se maintient et inspire

05.07.2022

La levée des sanctions économiques de la Cédéao à l’encontre du Mali ne doit certainement pas être vue comme la victoire d’un consensus ou comme le signe de bonne volonté de l’organisation régionale à l’encontre de Bamako. La réalité étant surtout que la résistance des autorités et de la population du pays a montré toute son efficacité, et étend son influence bien au-delà des frontières nationales.

Les dirigeants de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), réunis lors du 61ème sommet ordinaire à Accra, au Ghana, ont décidé de lever les sanctions économiques et financières adoptées contre le Mali depuis le mois de janvier de cette année.

Selon Maliweb, les dirigeants de l’organisation régionale étaient encore tout récemment divisés sur la question de levée des sanctions. Sans surprise, les principaux partisans quant au maintien des sanctions contre Bamako n’étaient que les présidents nigérien et ivoirien – Mohamed Bazoum et Alassane Ouattara. Sans surprise car étant aujourd’hui parmi les principaux représentants et défenseurs des intérêts françafricains, allant largement en sens inverse des aspirations de leurs propres populations, et plus généralement des peuples d’Afrique.

De son côté le Sénégal, dont le président Macky Sall est actuellement également à la tête de l’Union africaine (UA), semble avoir été l’un des principaux intéressés à mettre fin aux dites sanctions, y compris en raison de l’impact que cela avait sur les intérêts économiques et commerciaux sénégalais, mais également à l’heure où Dakar s’engage progressivement sur la voie de la multipolarité, n’hésitant pas à aller même jusqu’à critiquer sur la question de levée des sanctions, comme ce fut le cas lors de la récente visite du chef d’Etat du Sénégal à Sotchi.

Evidemment, durant ladite période des sanctions de la Cédéo, qui d’ailleurs selon nombreuses sources étaient au départ largement influencées par Paris et certaines autres capitales occidentales, le Mali a pu compter sur le soutien et la solidarité de plusieurs pays africains, sans oublier la Russie et la Chine – qui, n’avaient pas hésité à utiliser leur droit de véto au Conseil de sécurité de l’ONU pour bloquer le texte français qui cherchait à apporter un soutien international aux dites sanctions.

Mais très certainement le grand mérite à ce succès pour Bamako revient une fois de plus à la très large mobilisation populaire nationale, qui non seulement n’a pas hésité à apporter un soutien ferme aux autorités du pays, mais également a fait preuve d’une capacité de résistance aux pressions extérieures de manière digne et patriotique.

Aussi, il ne faut certainement pas oublier que le Mali après des années de chaos est devenu sous le leadership du colonel Assimi Goïta et de son équipe – une grande source d’inspiration pour nombreuses autres nations africaines et un exemple d’une résistance efficace au néocolonialisme occidental nostalgique de l’unipolarité.

De manière générale, les événements en cours démontrent parfaitement que les sanctions – l’un des instruments favoris de l’establishment occidental et de ses supplétifs – non seulement n’apporte pas le résultat escompté pour ses instigateurs, mais au contraire pousse les nations dignes à accroitre les efforts en vue de contrebalancer les difficultés que lesdits instigateurs cherchaient à créer pour les pays sanctionnés.

Quant aux autres leaders africains, qui ne peuvent pas, pour nombreux d’entre eux se vanter d’une popularité comparable à Assimi Goïta sur les scènes nationale et continentale, plusieurs néanmoins comprennent que face aux événements en cours, il est plus que jamais temps de se mettre à jour des nouvelles réalités planétaires.

En ce qui concerne ceux ayant fait le ferme choix de rester aux côtés de l’establishment occidental jusqu’au bout, au-delà de poursuivre leur propre marginalisation et isolation dans une Afrique qui choisit de plus en plus ouvertement la voie du panafricanisme et d’un libre choix de ses partenaires extérieurs – leur avenir n’a rien de prometteur. Et le fait de se réfugier dans la bulle pro-occidentale en espérant que cela leur évitera d’être balayé par les mobilisations populaires de masse semble être une erreur stratégique de personnages faisant mine, à l’instar de leurs parrains, de ne pas comprendre l’ordre international multipolaire. Et ce qu’il deviendra.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4025

Coup d’Etat en Guinée-Conakry: les prévisions se confirment

Le président guinéen Alpha Condé a été destitué à la suite d’un coup d’Etat dirigé par un ancien légionnaire de l’armée française. Cet événement confirme plusieurs aspects et prévisions sur lesquels Observateur Continental avait insisté dans le passé.

S’il est encore trop tôt pour faire des prévisions sur la suite des événements en République de Guinée, il est néanmoins clair que c’était quelque chose d’attendu et de prévisible. Ce que l’on sait aussi, c’est l’exécutant du putsch en question. Il s’agit de Mamady Doumbouya, ancien légionnaire de l’armée française, rappelé en Guinée en 2018 pour prendre la tête du Groupement des forces spéciales.

Selon les autres informations disponibles à son sujet, il a «brillamment» accompli la formation de spécialiste en protection opérationnelle à l’Académie de sécurité internationale (Israël), le cours de formation des commandants d’unité à l’Ecole d’application de l’infanterie (Sénégal), la formation d’officier d’Etat-major (Gabon) et l’Ecole de guerre de Paris.

Bien qu’il soit effectivement tôt pour émettre des hypothèses sur les possibles liens existants entre Mamady Doumbouya et des intérêts externes, son passé de légionnaire pour le compte français mérite une attention particulière. Tout comme le fait que parmi les principaux insatisfaits du gouvernement guinée d’Alpha Condé se trouvait précisément Paris.

En décembre de l’année dernière, Observateur Continental avait d’ailleurs consacré un article  traitant du double standard élyséen vis-à-vis de Conakry et de Bangui d’un côté, et d’Abidjan de l’autre. Permettant de voir une approche purement orientée sur ses intérêts géopolitiques, avec en couverture les critiques du déroulement des dernières élections présidentielles guinéennes, tout en applaudissant, et c’est logique, la réélection du bon vieil ami françafricain Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, dont les manœuvres en vue d’écarter ses principaux concurrents et représentants de l’opposition ne sont plus à présenter.

Il faut se rappeler aussi qu’Alpha Condé était logiquement dans la ligne de mire des cercles françafricains de l’Elysée, ne serait-ce que pour avoir plusieurs fois remis à leur place des journalistes hexagonaux, comme dans cette interview de septembre 2018. Un entretien ayant fait beaucoup de bruit à l’époque au vu du comportement provocateur et irrespectueux des journalistes français et de la fermeté dans les réponses du président guinéen, qui n’a d’ailleurs pas manqué de poser la question légitime de savoir quel pays africain de l’espace francophone avait vraiment pu décoller.

Mais si les perspectives immédiates en Guinée-Conakry restent encore inconnues, il y a néanmoins plusieurs éléments à faire valoir. Tout d’abord, ces événements en Guinée au-delà de confirmer les prévisions données dans le passé, représentent indéniablement une réponse forte à tous ceux qui critiquent la volonté de nombre de pays africains d’accorder une «trop» grande importance à l’aspect sécuritaire dans la défense de leur souveraineté. Comme c’est notamment le cas pour l’Algérie, la Centrafrique, la Guinée équatoriale ou encore l’Ethiopie – bien que chacun ayant sa propre spécificité.

D’autre part, il devient évident qu’au-delà de posséder une capacité défensive digne de ce nom, il est fort important d’entretenir des organes sécuritaires efficaces, pouvant détecter et mettre hors d’état de nuire les éléments déstabilisateurs, d’autant plus si ces éléments sont téléguidés par les intérêts néocolonialistes des acteurs fort bien connus. Et qu’au vu des multiples échecs subis récemment par les intérêts occidentaux et leurs forces sous-traitantes à divers endroits du monde, y compris dans nombre de pays africains, il était tout à fait logique qu’ils allaient s’en prendre à des Etats moins protégés et peut-être moins sur les gardes que ceux qui ont évité ce type de scénarios.

Une chose demeure également certaine : sans une souveraineté véritable et complète, il ne peut y avoir de quelconque développement. Et sans une capacité défensive digne de ce nom, il est impossible de pouvoir parler d’une quelconque souveraineté. Cela sans oublier la maitrise réelle des éléments intérieurs susceptibles de participer aux déstabilisations pour le compte d’intérêts néocoloniaux. Le reste à suivre.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3064

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Côte d’Ivoire, Guinée, RCA: le double standard de Paris

La réélection d’Alpha Condé à la tête de l’Etat guinéen a jeté un froid dans les relations entre Conakry et Paris. La différence d’approche de l’Elysée par rapport à d’autres pays africains, notamment la Côte d’Ivoire, démontre un positionnement orienté sur les intérêts géopolitiques français, dans ce qu’il continue à considérer comme étant son «pré-carré».

Nombre d’analystes africains n’ont pas manqué de remarquer une approche clairement différente dans le traitement des élections présidentielles de certains pays africains francophones, et des situations intérieures respectives. Si en Côte d’Ivoire, le gouvernement en place – allié de Paris mais contesté par nombre de citoyens ivoiriens, peut compter sur de chaleureuses félicitations émanant du leadership français, c’est bien loin d’être le cas en ce qui concerne les élections présidentielles récentes en République de Guinée, ou à venir – comme en République centrafricaine.

Comme le note le média Financial Afrik en lien avec les félicitations froides et tardives d’Emmanuel Macron destinées à Alpha Condé pour sa réélection en tant que président guinéen, «la déclaration du président Macron intervient dix jours après de vertes critiques envers Alpha Condé qu’il reprochait d’avoir modifié la constitution pour se représenter. Ces félicitations tardives et réservées ôtent en tout cas la France dans une intenable position contradictoire entre l’ivoirien Alassane Ouattara, chaleureusement félicité et son homologue guinéen réélu (…)».

Evidemment, Paris pourra toujours se référer au fait que les élections guinéennes ont eu lieu dans «un climat de contestations» et d’accusations de fraudes par l’opposition. Il n’empêche que lorsqu’on connait la contestation que connait le chef d’Etat ivoirien dans son pays, et les diverses manœuvres ayant écarté de la course à la présidentielle nombre de ses concurrents, dont l’ex-président Laurent Gbagbo, sans oublier les pressions exercées sur les activistes panafricains dans le pays, la position élyséenne en ressort non seulement contradictoire – mais surtout fortement hypocrite.

Ce qui est sûr – c’est qu’une telle différence d’approche est sans aucun doute géopolitique et géoéconomique. Dans une mentalité purement néocoloniale. En Guinée, la diversification des partenariats extérieurs, y compris dans le secteur économique, ne profite pas pleinement à Paris – à la grande différence de la Côte d’Ivoire. Plus que cela, le chef d’Etat guinéen n’a pas manqué de remettre les points sur les «i» face aux représentants des médias français, dans une interview de septembre 2018, ayant fait beaucoup de bruit à l’époque. Notamment en lien avec le comportement des journalistes français participant à ladite interview, coupant régulièrement la parole au chef d’Etat guinéen.

Avant cela, dans un autre entretien daté d’avril 2017, accordé à la chaine Euronews, Alpha Condé avait rappelé que la France doit considérer les pays africains comme souverains. Une prise de position que l’Elysée est loin d’apprécier dans sa relation avec les pays africains anciennement colonisés par l’Etat français.

Mais cette politique élyséenne du deux poids, deux mesures, en Afrique ne se limite pas à la Guinée. L’autre exemple actuel est évidemment la République centrafricaine – elle aussi une ancienne colonie française. Là aussi, Paris au lieu de vanter les mérites du président Faustin-Archange Touadéra, un intellectuel arrivé au pouvoir dans un cadre démocratique, ayant apporté une paix globale et bien plus de stabilité à un pays qui fut meurtri par un long cycle de violences internes, préfère critiquer les choix, notamment en termes de politique extérieure de Bangui.

Plus que cela, l’establishment français en a fait une affaire personnelle de première importance : par tous les moyens déstabiliser (ou peut-être redéstabiliser) la RCA. Le tout pour une raison simple et connue – la large diversification des relations extérieures du pays au cours de la présidence de M. Touadéra, notamment en direction de la Russie et de la Chine. D’ailleurs cela se traduit par d’innombrables campagnes de lobbying opérées par la diplomatie française. Notamment via son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

Le souci dans tout cela pour l’élite politico-médiatique hexagonale, c’est qu’au final une telle approche n’augmente qu’un peu plus les sentiments de ras-le-bol observés pratiquement dans toute l’Afrique francophone vis-à-vis de la politique française sur le continent. Plus que cela, Paris semble ne pas se rendre compte, dans une arrogance néocoloniale extrême, que si un chef d’Etat africain s’intéresserait aux affaires intérieures françaises d’une façon ne serait-ce que semblable à celle que pratique depuis un long moment l’Elysée, il est bien peu probable que cela soit toléré par l’establishment français. Cela a d’ailleurs souvent été rappelé par les panélistes de la grande chaine de télévision panafricaine Afrique Média TV.

Mais étant dans l’incapacité réelle de pouvoir changer un comportement datant de dizaines d’années, si ce n’est pas dire plus, les élites françaises doivent tout simplement se rendre à l’évidence que leur perte d’influence en Afrique se poursuivra de façon claire, rapide et confirmée.

Mikhail Gamandiy-Egorov

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« En Afrique, on salue avec satisfaction la politique actuelle de la Russie »

Simplice Zokohi Zadi est un historien, spécialiste des relations internationales et militant politique ivoirien. Partisan du Front populaire ivoirien (FPI), parti historique de Laurent Gbagbo. Il est aujourd’hui exilé au Maroc. On parlera de l’actualité ivoirienne, africaine et plus globalement internationale.

Sputnik : La Côte d’Ivoire a connu il y a peu des élections présidentielles. Alassane Ouattara, soutenu par les Occidentaux, garde le pouvoir. Une forte abstention était l’une des principales caractéristiques de ces élections. Votre avis?

Simplice Zokohi Zadi: Merci de l’opportunité que vous me donnez de m’exprimer sur l’actualité brûlante de la Côte d’ivoire, mon pays, en ce qui est convenu d’appeler élection présidentielle du 25 octobre 2015. Au vu de la réalité du terrain et des différents protagonistes, nous ne sommes pas surpris des résultats. Celui qui devrait être proclamé vainqueur, à savoir Alassane Ouattara, le protégé de la communauté occidentale, s’est taillé la part du lion avec 83,66% des suffrages exprimés contre 16,44% pour les autres candidats qu’il a lui-même choisi pour l’accompagner. Pour nous autres qui n’étions pas partie prenante à cette « élection » nous ne sommes guère surpris des résultats. Pour notre part, nous tirons une grande satisfaction parce que l’enjeu était le taux de participation et de ce côté-là record absolu jamais enregistré pour une élection de cette envergure, ni dans ce pays, ni dans d’autres pays d’Afrique: 80% de taux d’abstention. Oui sur ce plan ma satisfaction est grande. Je fais partie de ceux qui ont appelé au boycott massif du scrutin. Cet objectif est donc largement atteint.

Sputnik : Vous qui surveillez la politique ivoirienne et plus généralement africaine, comment était vue cette élection à l’intérieur, ainsi que dans d’autres pays africains, notamment voisins?

Simplice Zokohi Zadi: Sur le plan local cette élection n’était pas du goût des Ivoiriens. La preuve, le fort taux d’abstention. Si nous analysons cela, il y a beaucoup de leçons à tirer. Mais pour répondre à votre question, il faut noter que sur le plan interne, les Ivoiriens avaient d’autres priorités que cette soi-disant élection car ils ont besoin de paix et de réconciliation. Sur le plan sous régional, certains pays de la CEDEAO voulaient que Ouattara qu’ils ont contribué à installer dans la violence en 2011, se maintienne au pouvoir pour faire de la Côte d’ivoire un territoire conquis. Donc pour eux en envoyant des observateurs, ils approuvaient cette élection que les Ivoiriens dans leur ensemble ont rejetée.

Sputnik : Beaucoup admettent, y compris en Occident, qu’il n’y a pas en Côte d’Ivoire de réconciliation nationale, après la crise de 2010-avril 2011. D’autres rappellent qu’Alassane Ouattara a été tout simplement installé à la tête du pays par les armes d’une puissance étrangère occidentale, en violant la souveraineté nationale d’un pays souverain. Comment voyez-vous l’avenir de votre pays?

Simplice Zokohi Zadi: Merci pour cette question capitale. L’histoire de la Côte d’ivoire depuis ces vingt dernières années est douloureuse.En effet ce pays, jadis, vitrine de la sous-région ouest africaine est meurtri par une crise politique, militaire et sociale depuis 1993, l’année de la mort du premier président Félix Houphouet-Boigny qui avait réussi, par le parti unique à imposer un semblant de stabilité et de paix relatives. Malheureusement, l’Occident, surtout la France dont il était l’agent n’avait pas intérêt à ce que notre pays s’émancipe après son décès. Elle avait vu en son successeur, en l’occurrence Konan Bédié, un digne continuateur de la politique de défense et de monopole des intérêts français dans la région. Mais ce dernier ne se montra pas apte pour a mission à lui confiée comme agent de l’impérialisme français. Ainsi, ils ont choisi, Ouattara Alassane, agent aussi des intérêts américains. La France et Ouattara organisèrent un coup d’Etat militaire en décembre 1999, pour évincer, l’inapte et incompétent Bédié. Malheureusement, le général Guéi choisi pour faire écran et cacher le jeu des Français, se montra patriote et sous la surveillance, la vigilance du peuple et des partis démocratiques comme le FPI de Laurent Gbagbo, amena le pays à une élection démocratique après une transition de 10 mois. Et c’est Laurent Gbagbo, qui incarnait au mieux les aspirations du peuple, qui sortira vainqueur de la présidentielle en octobre 2000.

Dès son élection et jusqu’en 2011, son pouvoir ne connut véritablement de répit, attaqué constamment et permanemment par une rébellion conçue par Ouattara, parrainée par la France et des intérêts néocolonialistes.

Pour arriver à la paix, Laurent Gbagbo, accepta de dépecer son pouvoir par les accords de Marcoussis (signés en 2003 entre la rébellion et le pouvoir) en faisant de Ouattara, inéligible de par la constitution en son article 35, un candidat pour la seule élection de 2010. Les Ivoiriens choisirent Laurent Gbagbo, comme président. Ouattara, sûr de ses soutiens françafricains, étasuniens et européens créa alors une violente et grave crise post-électorale en se déclarant vainqueur parallèlement au Conseil Constitutionnel. La France qui attendait en embuscade, saisit l’occasion pour faire la guerre à la Côte d’Ivoire ouvertement en bombardant le palais présidentiel. La suite on la connait. Ouattara fut installé au pouvoir.

Commença une période d’acier pour le pays où beaucoup d’Ivoiriens moins chanceux ont trouvé la mort, d’autres ont été contraints à l’exil, quand plus de 500 dont des personnalités politiques du FPI, notamment Simone Gbagbo, l’épouse du président renversé, croupissent dans les prisons. En outre, et c’est également important pour les Ivoiriens, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé (ex-ministre de la Jeunesse, ndlr) sont détenus injustement à La Haye où ils attendent un procès le 10 novembre prochain.

Comme on le voit l’avenir du pays est sombre. Les Ivoiriens ne connaissent pas de liberté individuelle et collective du fait d’une dictature. Ils espéraient que Ouattara ayant atteint ses objectifs de prendre le pouvoir allait réaliser la réconciliation nationale. Aussi espéraient ils que cette communauté occidentale qui l’a installé par la violence au palais d’Abidjan allait jouer le jeu pour l’amener à réconcilier les Ivoiriens. Là encore la déception fut grande. Et avec cette parodie d’élection qui donne un semblant de légitimité démocratique à Ouattara l’avenir du pays ne peut qu’être sombre. Mais attendons les jours à venir pour nous prononcer. Pour l’instant, nous ne sommes pas optimistes car nous ne faisons pas confiance au détenteur du pouvoir actuel.

Sputnik : A l’heure actuelle, le monde observe avec grande attention la Syrie, où deux coalitions, voire deux visions s’affrontent, surtout depuis le début des frappes russes contre les terroristes dans ce pays. Votre commentaire?

Simplice Zokohi Zadi : Merci beaucoup pour l’occasion donnée d’exprimer ma position sur ce qui se passe en Syrie.En Afrique, on salue avec beaucoup de satisfaction la politique actuelle ouverte de la Russie en Syrie. Parce qu’en 2011, la Russie n’a pas bien joué son rôle de contrepoids à la politique impérialiste des Occidentaux, ce qui a fait que Kadhafi a été tué par l’OTAN en Libye. C’est parce que la Russie a été attentiste que la France s’est arrogée le droit d’intervenir abusivement en Côte d’Ivoire.

En effet quand il y avait le pacte de Varsovie et que l’équilibre de la terreur était assuré, les Occidentaux faisaient attention. Mais depuis la fin de l’URSS, l’OTAN s’était érigée en gendarme du monde. On peut trouver des circonstances atténuantes à la Russie car depuis 1991 le pays se devait de se reconstruire. Elle était en phase de reconstruction et de stabilisation. Aujourd’hui elle joue pleinement son rôle de grande puissance mondiale à même d’équilibrer la terreur des forces occidentales dans le monde.

Pour la Syrie, au départ les Occidentaux voulaient être toujours maîtres en sortant leur jeu favori: le mensonge distillé par les élites occidentales. Mais la diplomatie russe a pris le dessus en montant au créneau pour faire échec à une intervention de l’OTAN contre le président Assad agressé.

Les Occidentaux voulaient encore prendre prétexte de combattre l’Etat islamique dans la région pour porter l’estocade à Damas en se dissimulant. Mais encore leur jeu a été découvert. Ainsi l’intervention de l’aviation russe a complétement mis en déroute les plans de l’OTAN. C’est une victoire à la fois militaire, politique et diplomatique qui ramène Moscou au premier plan des relations internationales. Aussi c’est une revanche que la Russie prend en renforçant sa position dans une région stratégique.

Sputnik: Vous avez mentionné la Libye. On sait que l’Afrique et beaucoup de gens dans le monde gardent en tête l’intervention de l’OTAN dans ce pays avec les conséquences que l’on connait. Le continent africain peut-il tolérer encore cette optique pour l’avenir?

Simplice Zokohi Zadi: Comme je l’ai dit précédemment, l’intervention de l’OTAN en Libye ayant occasionné la mort de Mouammar Kadhafi a été mal ressentie par tout Africain digne. Comme je l’ai également dit précédemment, nous regrettons que la Russie et la Chine n’aient pas été aussi actives qu’elles le sont aujourd’hui. Mais heureusement, tout change. Il appartient aux Africains de traiter ouvertement avec la Russie car en relations internationales, on signe ce qu’on appelle des accords. Dès lors qu’il existe des accords bilatéraux entre deux pays, ceux-là jouent automatiquement en cas de besoin. Nous ne pouvons plus rêver en nous basant sur le passé où du temps des guerres de décolonisation et de libération, lorsque l’ex-URSS intervenait automatiquement en Afrique. Non, les données ont changé et la Fédération de Russie traite désormais officiellement avec les gouvernements formellement constitués et légaux. Il appartient donc aux gouvernements africains de sortir de leur esclavage occidental pour regarder aussi du côté de Moscou. Il y aussi de bonnes chose à prendre à Saint Pétersbourg, Rostov, Krasnodar, Sotchi, Vladivostok, Kazan…Yalta, en terme de coopération universitaire, scientifique, militaire, économique et culturelle. Il faut diversifier la coopération si nous ne voulons pas que l’OTAN ou la France nous fasse ce qui s’est passé en Lybie et en Côte d’ivoire en 2011.

Sputnik: Beaucoup de gens dans le monde, et l’Afrique ne fait pas exception, regardent avec espoir en direction de la Russie et des BRICS. Partagez-vous cette vision? Si oui, pourquoi?

Simplice Zokohi Zadi: Oui, je suis de ceux qui ont salué la naissance des BRICS. En effet depuis longtemps, le monde est dominé par les élites occidentales qui ont mis les Etats sous l’éteignoir au nom de leurs intérêts impérialistes. Les Occidentaux font la guerre aux pays moins nantis militairement et économiquement mais plus riches en matières premières énergétiques, agricoles et minières. Pour ces richesses, ces pays sont déstabilisés. La naissance des BRICS peut être une chance en ce sens qu’ils peuvent équilibrer économiquement le monde par la mise en place de nouveaux mécanismes de marchés. Il faut de nouvelles politiques de mise à marchés des produits des pays en développement, ainsi qu’une juste répartition et rémunération de ces produits. Les BRICS sont une chance car leur existence permettra à coup sûr de diversifier la coopération commerciale et économique du monde.

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20151031/1019209524/afrique-cote-d-ivoire-ouattara-elections.html

Mikhail Gamandiy-Egorov

Les pays africains doivent quitter la CPI

Toussaint Alain

Entretien avec Toussaint Alain, un ex-conseiller et ancien porte-parole du président ivoirien Laurent Gbagbo

Toussaint Alain est un ex-conseiller et ancien porte-parole du président ivoirien Laurent Gbagbo, dont il fut le représentant dans l’Union européenne entre 2001 et 2011. Depuis mai 2011, cet ami de la Russie préside les destinées de Côte d’Ivoire Coalition Inc., une organisation de lobbying politique représentée dans plusieurs pays.

Sputnik: L’actualité ivoirienne a été récemment marquée par la tentative de meurtre à Paris d’un opposant au régime d’Alassane Ouattara. Cela vous fait-il peur?

Toussaint Alain: Cette violence exportée hors des frontières de mon pays est préoccupante. Elle est la marque de fabrique, l’ADN, du régime d’Alassane Ouattara. Il veut user de tous les moyens pour réduire l’opposition au silence. Des désœuvrés de banlieue parisienne ou des dealers recyclés sont ainsi conditionnés, mis à contribution, pour s’attaquer aux opposants, à tous ceux qui émettent la moindre critique contre ce dictateur. Le recours à la force n’a jamais rien résolu. Si Ouattara est allergique à la critique, alors qu’il renonce à la vie publique. En Côte d’Ivoire, l’irrévérence envers les pouvoirs et leurs représentants n’est pas nouveau. Rien ne doit être prétexte à la répression, à l’assassinat d’adversaires politiques et à l’instrumentation des antagonismes pour régler des comptes. Ce micro-terrorisme ne m’effraie pas outre mesure. En politique, la haine et la bêtise n’ont jamais fait bon ménage.

Sputnik: Justement, ne craignez-vous pas une escalade de la violence à l’approche de l’élection présidentielle prévue pour octobre?

Toussaint Alain: Bien avant cette échéance, la terreur règne déjà dans le pays. Rien n’a vraiment changé depuis 2011. Nous ne sommes certes pas à l’abri d’une nouvelle catastrophe mais personnellement, je souhaite que cette échéance se déroule à la date prévue, et de la meilleure des façons possibles afin de tourner définitivement la page Ouattara. Je reconnais toutefois que les divisions au sein de l’opposition amenuisent sérieusement cette perspective. D’autre part, mes amis ont tergiversé trop longtemps, palabré les uns contre les autres, avant de se lancer dans la bataille. Or, une présidentielle exige du temps de préparation, une logistique énorme ainsi que des femmes et des hommes capables d’être le moteur ou les inspirateurs du changement espéré par les populations. Ouattara a été incapable de réconcilier le peuple, de réduire les inégalités sociales, de lutter contre l’insécurité, de créer des emplois pour tous, d’instaurer un climat de paix et de confiance réciproque entre Ivoiriens. Bien sûr, économiquement et sur le plan des infrastructures, on a pu noter quelques avancées mais cela reste encore très insuffisant pour endiguer de manière significative la misère, relancer la machine de façon durable. La croissance économique est donc appauvrissante pour les foyers modestes. Sans oublier la mainmise du clan Ouattara sur tous les secteurs stratégiques de l’économie ivoirienne. La Côte d’Ivoire a réellement besoin d’un nouveau souffle, de nouveaux dirigeants désintéressés, au service de leurs concitoyens.

Sputnik: Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sont toujours détenus à la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye. Combien de temps cela va-t-il encore durer, selon vous?

Toussaint Alain: Je l’ai dit à plusieurs reprises sur vos antennes. Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sont injustement détenus. Pourtant, la vérité est là, belle, sous les yeux de la procureure de la CPI. Le procès devrait s’ouvrir le 10 novembre. Je crains que l’on soit parti pour plusieurs années de procédure. Lorsque la CPI change les chefs d’accusation selon ses humeurs, cela est bien la preuve que cette juridiction manque de sérénité. Jusqu’à présent, personne n’a apporté le moindre début de preuve aux allégations incriminant Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Mais j’ai confiance en leurs capacités à se défendre pour faire échouer ceux qui ont ourdi ce procès politique. Je l’ai dit à Blé Goudé lors de ma visite le 26 juin dernier au Centre pénitentiaire de la CPI, à la Haye aux Pays-Bas. La situation est difficile, mais il faut tenir.

Sputnik: Au dernier sommet de l’UA en République d’Afrique du Sud, la CPI a tenté de faire arrêter le président soudanais Omar el-Béchir sur le territoire sud-africain. Cette requête a été refusée par le leadership du pays hôte du sommet. Votre commentaire?

Toussaint Alain: C’est hallucinant! Les gouvernements africains doivent ignorer désormais les décisions de la CPI. Tout le monde sait que ce tribunal ne s’attaque qu’à des prétendus criminels africains. Il ne vous aura pas échappé que l’ensemble des mandats d’arrêt aujourd’hui en vigueur concerne des Africains. Il ne faut pas s’étonner que cela mène à de sérieux soupçons sur le continent africain. L’ancien président américain George W. Bush ne devrait-il pas être inculpé de crimes de guerre pour avoir illégalement envahi un pays souverain, l’Irak? Certains répondent opportunément que la CPI ne peut arrêter que les citoyens de pays membres de la CPI, et les Etats-Unis n’en font pas partie. Mais le Soudan non plus! Etrangement, les mêmes accusateurs invoquent une exception pour les présumés criminels qui ont été spécifiquement désignés comme tel par le Conseil de sécurité des Nations unies, ce qui serait le cas d’Omar el-Béchir. Vous voyez bien que tout cela ne tient pas debout. La CPI est une Cour politique, financée par les grandes puissances occidentales auxquelles elle obéit et rend des comptes.

Sputnik: Que pensez-vous de la volonté déclarée de plusieurs pays africains de sortir du système reconnaissant la juridiction de la CPI? Quelles conséquences aurait cette sortie, aussi bien pour les pays concernés que pour le système pénal international en général?

Toussaint Alain: La CPI est clairement une Cour coloniale. Sa crédibilité est entachée. Certes, certains dirigeants africains ont parfois tendance à se placer au-dessus des lois mais il est préférable que les affaires les impliquant relèvent des juridictions nationales. La justice peut être rendue dans les pays africains. Voyez la manière dont la CPI a commis des erreurs, en s’attaquant au Président du Kenya, Uhuru Kenyatta. Je pense que la CPI est une entreprise qui ne mérite plus d’être menée. L’intention visant à construire un monde gouverné par la loi, et non par la force, a échoué. Les 34 pays africains (sur 54) signataires du Statut de Rome doivent en tirer toutes les conséquences en quittant cette instance.

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20150901/1017908913.html

Mikhail Gamandiy-Egorov

« La vérité finira par triompher ! ». Entretien avec François Mattei (Partie 2)

« La vérité finira par triompher ! ». Entretien avec François Mattei (Partie 2)

Suite de la première partie de l’entretien.

LVdlR : Dans votre livre écrit en collaboration avec M. Gbagbo, on le retrouve dire que la « vérité finira par triompher »… Comment le président Gbagbo entrevoit-il son avenir, celui de ses proches et de la Côte d’Ivoire ? Et qu’en pensez-vous ?

F.M. : Moi, je suis très inquiet pour la Côte d’Ivoire parce que je pense qu’elle est aux mains de gens peu fiables. Des gens qui sont venus au pouvoir par les armes. Qui continuent à maintenir leurs positions par les armes. M. Ouattara ne peut rien faire contre ces gens qui l’ont ramené au pouvoir et qui sont pour la plupart analphabètes. Ils sont très nombreux. On retrouve notamment un commis de cuisine devenu préfet, c’est formidable… M. Soro, président de l’Assemblée nationale, qui a été également Premier ministre, n’est autre qu’un chef de guerre. Qui a été en outre désigné par un bon nombre de rapports à une certaine époque comme responsable de crimes de guerre et qui se retrouve aujourd’hui sous immunité parlementaire. Il guette le pouvoir comme M. Bakayoko, qui est le ministre de l’Intérieur. Et à la base, ils sont tous chefs de milices armées, qu’ils continuent chacun de diriger. Et ils se guettent tous du coin de l’œil en attendant que M. Ouattara, qui est bien malade, disparaisse de la scène politique. Tout cela est assez inquiétant. Le seul qui pouvait dégager un consensus c’est Laurent Gbagbo. On n’en a pas voulu. Ce qui se passe désormais c’est qu’il va passer en procès. Et il faut pour cela situer deux choses : le 3 juin 2013, la Cour pénale internationale avait dit qu’il n’y avait aucune charge retenue contre lui. Quelques mois plus tard, il y a toutes les charges retenues. Il se trouve que pour avoir étudié le dossier, il n’y a rien de nouveau. Que tout le monde le sache, il n’y a absolument rien de nouveau. Donc on voit bien qu’il s’agit d’une décision politique. Parce qu’en 2015 il y a l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire et on ne veut pas que Gbagbo soit libre. Et que l’objectif est de le maintenir le plus longtemps possible hors du jeu politique et afin qu’il n’y ait plus de possibilité pour lui de revenir. La vérité sortira tout de même. Et je pense qu’avec elle ce sera le procès de la CPI et non pas de Laurent Gbagbo. Qu’est-ce que représente la CPI sinon une institution, je dis bien une institution et non pas une juridiction, qui sert des intérêts particuliers ? Le dossier contre M. Gbagbo a été fabriqué à Paris et à Abidjan par le pouvoir actuel. Ce dernier ayant énormément de choses à se reprocher. Les seuls actes réellement génocidaires ont été commis par le pouvoir actuel ou en tout cas par les gens qui le soutenaient. Et aucun d’entre eux ne se retrouve aujourd’hui à la CPI. Donc on s’aperçoit bien que c’est une institution qui n’est pas respectable et qu’il convient de ne pas respecter. Le problème c’est que M. Gbagbo y est. J’allais dire qu’on attend avec impatience le procès parce que M. Gbagbo aura la possibilité de parler au monde. Et j’espère que cela sera retransmis partout. Et dans ce cas-ci, la CPI s’écroulera.

Quant à M. Gbagbo lui-même, il reste optimiste. Il sait parfaitement ce qui s’est passé. Pour résumer : étant donné qu’il y avait un litige électoral, c’est-à-dire deux présidents, lui a demandé qu’on recompte les voix sous l’égide d’une commission internationale. Cela a été refusé. Pourtant lorsqu’on sait qu’on a gagné, on ne devrait pas avoir peur du recomptage des voix. D’autant plus que c’est un usage absolument courant. On l’a vu aux Etats-Unis dans le cas de Bush et Gore. On l’a vu avec l’UMP en France, où pour la présidence d’un parti politique il y a eu une comédie tragique durant des mois. Autre exemple encore : Haïti, où cela s’est très bien passé : celui qui était arrivé au départ troisième est devenu après recomptage président de la république car il y avait eu des comptes mal faits au départ. Donc au lieu de faire des morts et de faire la guerre, car en Côte d’Ivoire faut le rappeler il y a eu beaucoup de morts, il aurait fallu tout simplement recompter les voix. Pourtant c’est l’option de la guerre qui été choisie au lieu de faire un recomptage qui aurait économisé énormément de vies humaines. Laurent Gbagbo s’est maintenu au pouvoir car il a été élu. Il a donc continué d’exercer, aussi bien en ce qui concerne ses prérogatives économiques que militaires, en défendant le pays. C’est ce qu’on lui reproche aujourd’hui. On lui reproche en fait d’avoir continué à gouverner alors que ladite communauté internationale estime qu’il était battu aux élections. Et dernière chose encore : je ne sais pas où a-t-on lu et décidé que c’était la communauté internationale ou quiconque qui décidait de l’élection d’un président de la république d’un pays souverain. Logiquement, c’est le peuple du pays en question qui il me semble doit choisir son avenir. La communauté internationale a peut-être un rôle mais elle ne peut agir qu’en respectant la souveraineté d’un Etat et du libre choix de son peuple à la suite d’une élection démocratique. C’est ce que Laurent Gbagbo va défendre et là-dessus il est tout à fait tranquille. Concernant l’avenir de la Côte d’Ivoire, il est très inquiet car il pense qu’aujourd’hui il n’y a plus de démocratie en Côte d’Ivoire. Pour vous dire, un très grand nombre de marchés se font aujourd’hui de gré à gré alors qu’on dit que M. Ouattara est un grand économiste. Peut-être. En tout cas, aucune des règles normales dans ce domaine n’est respectée, ni appliquée. La Côte d’Ivoire, curieusement, va mal alors que la guerre est finie. On a reproché son bilan à Gbagbo alors qu’il se trouvait en état de guerre avec la moitié du pays occupé. Et le bilan était malgré tout cela très loin d’être mauvais. Je peux le démontrer. Quant à aujourd’hui, il y a une chute des ressources pétrolières, ainsi que des ressources du cacao. Ca va très mal. Pourquoi ? Car il y a beaucoup de détournements. Ce n’est pas qu’il y a moins de cacao et de pétrole. Simplement il y a énormément de gens qui font du « business ». Parmi eux, un grand nombre de politiciens français. Notamment M. Guéant qui était ministre de l’Intérieur, ainsi que son gendre qui s’occupe notamment de la privatisation des banques là-bas. Ils font tous de très grosses affaires. La Côte d’Ivoire est devenue aujourd’hui un comptoir. Ce n’est plus un Etat mais bien un comptoir ouvert aux quatre vents du libéralisme sauvage.

LVdlR : Croyez-vous qu’un jour les responsables de la rébellion armée en Côte d’Ivoire, ainsi que ceux ayant commis des crimes depuis 2002, puissent se retrouver devant la justice, nationale ou internationale ? Ou alors, pensez-vous que leurs mentors occidentaux ne le permettront jamais ?

F.M. : Je pense qu’ils ne le permettront jamais. Et puis c’est déjà trop tard. Il est évident que si on veut faire un procès et la mise à plat de tout ce qui s’est passé là-bas, il faut envoyer à la CPI M. Soro. Et pourquoi pas M. Ouattara ? Tous ces gens-là ont organisé une rébellion sauvage. Il y a eu des centaines de milliers de morts, des villages rasés. Des massacres massifs. L’inaction de la CPI est absolument incompréhensible. Mais la communauté internationale est piégée dans sa posture parce qu’elle a soutenu ces gens-là. La vérité, elle, sera connue. Mais en ce qui concerne la probabilité qu’il y ait des sanctions à l’encontre des responsables de ces crimes, je pense qu’il y a très peu de chances.

LVdlR : Selon vous, la CPI ne s’est-elle pas définitivement discréditée en confirmant les charges contre Laurent Gbagbo et en faisant toujours la sourde oreille quant à la responsabilité de crimes massifs commis par les rebelles soutenus par le gouvernement français ?

F.M. : A mes yeux, oui. Et aux yeux de beaucoup de Français qui heureusement commencent à se réveiller. Y compris grâce aux débats qu’il y a eu à la CPI, beaucoup de gens commencent à voir clairement que sous l’habillage juridique, on voit apparaitre des intérêts clairement politiques, militaires et économiques. Je crois que la vérité va sortir. Beaucoup de gens commencent à réagir différemment, comparé à même deux ou trois ans auparavant. Et si les gens s’aperçoivent qu’ils ont été à ce point trompés, cela risque d’être violent. C’est ainsi en France, on se réveille tous les 20 ans. J’ai confiance en les gens de mon pays. Ce secret de la Françafrique, cette sinistre comédie mais qui rapporte énormément à l’Etat français, qu’on essayait de garder si longtemps s’ouvre aujourd’hui au grand jour. Et maintenant que les citoyens commencent à comprendre sur le fond pourquoi on joue avec les chefs d’Etats en Afrique comme avec des pions sur un échiquier, je crois qu’il y aura une réaction salutaire en France. Vous savez il y a un ancien ambassadeur de France, M. Gildas Le Lidec, qui vient de publier un livre « De Phnom Penh à Abidjan », qui mentionne justement la période où il était ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, à l’époque de Laurent Gbagbo. Et il y raconte des choses formidables pour dire qu’on n’a jamais laissé une chance à Gbagbo et que la France n’en voulait tout simplement pas. Et que même le chef de guerre Soro a voulu l’étrangler. Il parle donc de toutes ces choses comme un témoin direct.

LVdlR : Merci M. Mattei d’avoir répondu à nos questions ! Bonne continuation à vous !

F.M. : Merci !

http://french.ruvr.ru/2014_07_02/La-verite-finira-par-triompher-Entretien-avec-Francois-Mattei-Partie-2-9850/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

L’Ivoirien Blé Goudé à la CPI : nouvelle bavure de la prétendue « justice internationale »

Charles Blé Goudé

Après l’arrestation le 11 avril 2011 du président légitime de la République de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, et son transfert, en novembre de la même année, à la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye, c’est désormais au tour du ministre ivoirien de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, d’y être déporté.

Chef du mouvement les Jeunes Patriotes, Blé Goudé a joué un rôle majeur dans la résistance au néocolonialisme occidental, aux côtés du président Laurent Gbagbo et de tous les autres résistants panafricains. Après la chute et l’arrestation de Laurent Gbagbo, déchu par l’intervention directe de l’armée coloniale française, Charles Blé Goudé s’était exilé au Ghana.

Enlevé dans la capitale ghanéenne le 17 janvier 2013 par les services secrets d’Alassane Ouattara, il sera transféré en Côte d’Ivoire et restera en détention dans différents lieux illégaux tenus secrets par le régime. Visé par un mandat d’arrêt de la CPI, il y sera finalement transféré le 22 mars dernier. Comparaissant pour la première fois le 27 mars, confiant et souriant, il lancera : « Si je suis jugé pour ce que j’ai fait et non pour ce que je suis, que je sois déclaré innocent ! Je sais que je repartirai chez moi ».

Une intervention qui a redonné beaucoup d’optimisme à tous ses soutiens et, plus généralement, à tous les patriotes ivoiriens, dont nombreux sont allés spécialement à La Haye pour exprimer leur soutien à Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Le jeune patriote a également ouvertement affiché sa volonté afin que la lumière soit entièrement faite sur la crise ivoirienne, en dépit de la propagande occidentale. Et d’ajouter : « Contrairement à une certaine opinion qui pense qu’un voyage à la CPI est un voyage sans retour, je pense qu’un citoyen peut faire l’objet d’un procès et rentrer chez lui. » Charles Blé Goudé n’a pas manqué de réitérer son adhésion aux idéaux de Laurent Gbagbo et à leurs valeurs communes : « C’est avec Gbagbo que j’ai appris la réconciliation. Je suis pro-Gbagbo et fier de l’être ».

La grande question que pose cette situation nous ramène à celle dont ont débattu les parlementaires et diplomates russes le 11 novembre dernier à la Douma d’Etat (Chambre basse du Parlement russe), à savoir la crédibilité de la justice internationale et des institutions qui l’ont établie. Les parlementaires russes, ainsi que les autres participants à l’événement, avaient ouvertement mis en avant toutes les contradictions de ces institutions, censées défendre le droit et la justice internationale pour tous, sans exception. Pourtant les procès et pré-procès en cours montrent une approche politisée presque non voilée. Et c’est cette politisation des institutions juridiques « internationales » qui avait été dénoncée à la Douma.

En effet, il est complètement incompréhensible et révoltant que des personnes légitimement élues, ainsi que les membres d’un gouvernement légitime, qui défendaient leur pays contre une rébellion armée, soutenue et financée de l’extérieur – notamment par la France -, et s’opposaient ouvertement au néocolonialisme dans leur pays et sur leur continent, soient privés aujourd’hui de leur liberté. Pendant ce temps, les criminels responsables de massacres massifs aussi bien de civils (on se souvient tous du très tristement célèbre Duékoué en mars 2011) que de représentants de l’Etat, occupent des hautes fonctions dans l’appareil de l’Etat ivoirien actuel et se baladent tranquillement à différents endroits de la planète. Certains sont même reçus à l’Elysée. C’est cela la justice internationale ?

Il y a quelques jours, le 11 avril, les Ivoiriens commémoraient le triste anniversaire de l’arrestation de leur président légitime par les forces armées françaises. C’était le 11 avril 2011. Bombardement de la résidence présidentielle, arrestation du président Gbagbo, de son épouse Simone et tous les proches qui étaient à leurs côtés. Ce jour-là, la démocratie, l’indépendance et la souveraineté de la Côte d’Ivoire ont été tout simplement bafouées et piétinées. Et les décisions plus que contradictoires des juridictions telles que la CPI ne renforcent en rien la confiance, même relative, en ces institutions.

Mais depuis, la résistance ivoirienne n’a aucunement baissé d’intensité, bien au contraire. Et compte tenu de l’actualité internationale et de l’avènement d’une nouvelle ère dans la politique planétaire, leur conviction que la liberté viendra et que justice sera faite ne fait que se renforcer.

http://french.ruvr.ru/2014_04_15/L-Ivoirien-Ble-Goude-a-la-CPI-nouvelle-bavure-de-la-pretendue-justice-internationale-3395/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

La politisation des institutions juridiques « internationales » dénoncée à la Douma

La politisation des institutions juridiques « internationales » dénoncée à la Douma

Le 11 novembre dernier, la Douma (chambre basse du Parlement russe) a organisé en son sein une table ronde sur le thème « Les aspects principaux des institutions pénales internationales sur l’exemple du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et de la Cour pénale internationale (CPI) ».

L’objectif de cette table ronde était en outre de discuter des principaux résultats à l’heure actuelle de ces organismes, ainsi que d’aborder les perspectives de ces institutions dans le cadre du développement du droit international. Parmi les personnalités qui ont pris part à cet événement, on peut citer, les députés de la Douma Viatcheslav Tetekine, Pavel Dorokhine, Tamara Pletneva, Mikhail Emelyanov, le professeur et Docteur en droit international Alexandre Mezyaev, la spécialiste des Balkans Anna Filimonova, le directeur de l’Institut des pays de la CEI Konstantin Zatouline, le directeur de l’Institut russe des recherches stratégiques Leonid Rechetnikov et d’autres imminents représentants de la classe politique, diplomatique et universitaire russe, dont des représentants du Ministère russe des affaires étrangères. Darko Mladic, le fils du général Ratko Mladic, commandant en chef de la République serbe de Bosnie, détenu aujourd’hui au TPIY, a également pris part aux discussions.

Le premier intervenant fut le Docteur Alexandre Mezyaev. Il a rappelé les principaux procès se déroulant depuis plusieurs années et jusqu’à aujourd’hui au TPIY et la CPI. Il a également rappelé les cas de Serbes emprisonnés par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie : le général Ratko Mladic, Radovan Karadzic, Goran Hadzic et notamment l’universitaire serbe Vojislav Seselj, ce dernier n’ayant jamais pris part au conflit armée en Ex-Yougoslavie et pourtant emprisonné depuis bientôt 11 ans par la « justice internationale », constituant un énième exemple flagrant des contradictions de ce tribunal. Un chapitre spécial sera dédié au cas du président de la Côte d’Ivoire Laurent Gbagbo, emprisonné depuis le 30 novembre 2011 dans les geôles de la Cour pénale internationale, ainsi qu’à Charles Blé Goudé, ministre ivoirien de la Jeunesse sous le gouvernement de Laurent Gbagbo, visé par un mandat d’arrêt de la CPI depuis le 1er octobre 2013.

En parlant du cas de Laurent Gbagbo, le professeur Mezyaev le caractérise ainsi : « Un président légitime déchu par des forces de l’extérieur et jugé sans aucun élément fiable ».En ajoutant que : « La CPI ne possède aucun élément de preuve pour détenir ne serait-ce qu’un jour de plus M. Laurent Gbagbo. Mais il est toujours en détention… ». Les autres intervenants ne manqueront pas de rappeler eux aussi toutes les contradictions inexpliquées de ces institutions juridiques internationales, censées défendre le droit international et la justice dans le monde entier, sans exception. Au lieu de cela, la CPI et le TPIY, ainsi que les autres institutions de ce type sont devenus des instruments politiques aux mains de groupes d’intérêts limités.

Effectivement, la politisation et l’instrumentalisation des dits organismes ont été les mots-clefs des discussions. Tous les spécialistes étaient unanimes sur le fait que des institutions censées lutter contre l’injustice aux quatre coins du monde devenaient en réalité des instruments qui ne font qu’accroitre cette injustice, de même que l’incompréhension générale et un manque de confiance totale en ces institutions dans le monde entier.

Il est incompréhensible que dans le cas du TPIY, les seuls coupables soient des responsables serbes, dont le fait d’être Serbes est déjà passible de sanctions. Qu’en est-il des criminels albanais, croates et autres ? On se souvient encore des tristes cas d’Ante Gotovina, général croate (possédant également la citoyenneté française), accusé de crimes contre l’humanité et notamment de meurtres massifs de civils serbes, de déplacement forcé de population, destruction sans motif de villes et villages, et la liste n’est pas exhaustive et qui, à la grande surprise générale, sera libéré en novembre 2012 (alors qu’il était condamné à 24 ans d’emprisonnement). Ou encore de Ramush Haradinaj, chef militaire de la dite « Armée de libération du Kosovo » (UÇK), inculpé lui aussi pour crimes de guerre commis alors qu’il était justement commandant de l’UÇK et acquitté lui aussi quelques jours après Gotovina…. « Bravo » donc au TPIY.

Pour revenir à l’Afrique et à la CPI, et plus particulièrement au cas ivoirien, où sont les responsables des crimes commis à Duékoué ? Où sont les mandats d’arrêts à l’encontre de ceux qui ont véritablement commis et continuent de commettre encore des crimes contre l’humanité ? Une justice à deux vitesses ? Pratique de doubles standards ? A l’évidence, c’est le cas… Du moins les parlementaires russes et leurs invités étaient tous d’accord sur ce point. Ils ont également vivement salué la démarche entreprise par l’Union africaine (UA) qui entrevoit la possibilité d’une sortie massive des pays africains de la Cour pénale internationale. Toujours selon eux, tant qu’il n’y aura pas une réforme massive et en totalité de la CPI, du TPIY et autres institutions de cette « famille », alors ces juridictions ne retrouveront jamais la confiance qu’ils espèrent tant porter, et de cela dépendra leur survie… La Russie de son côté, de même que la Chine, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, continuera de suivre avec la plus grande attention les événements liés aux institutions juridiques internationales et surtout si les critiques objectives dont elles font l’objet seront entendues ou non…

http://french.ruvr.ru/2013_11_18/La-politisation-des-institutions-juridiques-internationales-denoncee-a-la-Douma-2919/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

 

Toussaint Alain : « L’Afrique s’impatiente de voir Gbagbo libre ! » (Partie 2)

Suite de la première partie.

La Voix de la Russie : Les charges contre le président Laurent Gbagbo n’ont pas été confirmées par la CPI. Malgré cela, M. Gbagbo est toujours emprisonné, le temps que le procureur puisse trouver « des éléments de preuves additionnels », comme l’ont demandé les juges de la Cour. Comment jugez-vous cette situation ?

Toussaint Alain : Croyez-vous sincèrement qu’il pouvait en être autrement ? Nous sommes devant une situation inédite : un tribunal reconnaît qu’il n’a pas de d’éléments suffisants mais il s’obstine tout de même à maintenir en détention un inculpé. C’est époustouflant comme procédé ! On l’aura compris : la mission de la CPI n’est pas de dire le droit mais de condamner coûte que coûte. Or, Laurent Gbagbo est présumé innocent. Avec tous les moyens dont disposent le procureur et ses enquêteurs, la CPI n’a pas été en mesure de fournir la moindre preuve inattaquable. Que cette comédie inhumaine cesse ! Le président Gbagbo doit être remis en liberté.

LVdlR : On évoque une possible mise en liberté provisoire de Laurent Gbagbo. La demande a été introduite à plusieurs reprises par la défense. Qu’en est-il ?

Toussaint Alain : Oui, j’ai entendu beaucoup de déclarations à ce sujet. Je ne vais en rajouter à la spéculation. Sachez que la Côte d’Ivoire et l’Afrique s’impatientent de voir Laurent Gbagbo libre. Pas seulement en liberté provisoire mais en liberté pleine et définitive tout simplement. La CPI dessert la cause de la justice mondiale en maintenant un innocent en détention alors que les charges s’effondrent les unes après les autres comme un château de cartes. L’incarcération de Laurent Gbagbo est un non-sens. On ne peut pas emprisonner quelqu’un par convenance ou par pur calcul politique. Gbagbo est innocent. Sa libération revêt un enjeu de paix et de stabilité pour la Côte d’Ivoire, où le naufrage du processus de réconciliation saute aux yeux. Les Ivoiriens ont envie d’être de nouveau ensemble, de cohabiter pacifiquement. Après la politique, il y a la vie de tous les jours. Libre, Gbagbo peut être un puissant accélérateur de la cohésion sociale et un facilitateur de la confiance retrouvée entre ses compatriotes. Ni la CPI ni le Conseil de sécurité de l’ONU ne peuvent ignorer cette dimension de l’affaire.

LVdlR : Quelles sont les dernières avancées notoires dans la situation politique en Côte d’Ivoire ?

Toussaint Alain : M. Ouattara a récemment fait quelques gestes en remettant en liberté plusieurs personnalités proches du président Gbagbo. Il reste encore au moins 800 prisonniers politiques, toujours détenus sans jugement. Parmi eux, Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, lequel reste privé de l’assistance de ses avocats. La détention au secret ou la torture physique ou psychologique n’ont jamais fait avancer la cause de la vérité. Sur le plan politique, on a pu observer aussi que le Front populaire ivoirien (FPI, parti du président Gbagbo – Ndlr) a repris du poil de la bête avec le retour aux affaires de Pascal Affi N’Guessan, son président. Les lignes bougent puisque l’opposition peut de nouveau tenir des réunions publiques. Mais tout cela reste précaire et conditionné à l’humeur des autorités actuelles. Or, il y a nécessité d’instaurer un climat de confiance durable entre le pouvoir et l’opposition afin d’éviter de nouvelles crises. Cela passe également par la levée des mandats d’arrêt internationaux contre des anciens dignitaires et le dégel des comptes bancaires de plusieurs centaines de personnalités proches du président Gbagbo ou ayant servi l’Etat sous sa gouvernance.

LVdlR : Le régime d’Alassane Ouattara devient-il plus conciliant avec l’opposition à l’approche de l’élection présidentielle de 2015 ?

Toussaint Alain : Le gouvernement ne perd rien à ouvrir un vrai dialogue politique avec l’opposition. Bien au contraire. Effectivement, tout le monde songe déjà à la présidentielle de 2015. Mais il y a des sujets cruciaux qu’il faut absolument régler afin de mieux aborder cette échéance. L’objectif étant de garantir la paix et la sécurité.

D’abord, l’épineuse question du désarmement des ex-combattants de M. Ouattara : au moins 65 000 soldats en armes. Ils constituent une vraie source d’inquiétude et d’insécurité tant pour le pouvoir que pour les populations. Ensuite, il y a l’indispensable recomposition de la Commission électorale indépendante (CEI) dont la mission a officiellement pris fin, selon les accords de paix inter-ivoiriens, depuis les dernières élections locales d’avril 2013. Enfin, la révision de la liste électorale et l’inscription de plusieurs millions de nouveaux majeurs sur les listings. L’élection de 2015 reste ouverte. A mi-mandat, la grogne sociale est forte car M. Ouattara n’a tenu aucune de ses promesses électorales : un million d’emplois, les soins gratuits, cinq nouvelles universités, des milliers de nouvelles écoles, des points d’adduction d’eau potable dans tous les villages du pays, etc. Le chômage a atteint un niveau endémique. L’économie tourne au ralenti. Une note interne d’une célèbre institution de Bretton Woods a récemment tiré la sonnette d’alarme sur la gestion de M. Ouattara. La Côte d’Ivoire, qui a un programme avec le Fonds monétaire international (FMI), continue de s’endetter clandestinement auprès de régimes amis pour sauver les apparences. Les créanciers du pays sont eux aussi irrités par les pratiques peu orthodoxes de ce pouvoir incompétent. Et le mois de décembre s’annonce difficile sur le plan budgétaire. Or, les caisses de l’Etat sont désespérément vides. Face à ce triste tableau, le régime n’aura pas d’autre alternative que la fraude industrielle pour tenter de se maintenir au pouvoir. Je ne doute pas que les Ivoiriens veilleront à ce que M. Ouattara ne leur vole pas la victoire une nouvelle fois.

 LVdlR : M. Toussaint Alain, je vous remercie. Très bonne continuation à vous !

Toussaint Alain : Merci à La Voix de la Russie de m’avoir donné la parole. Je voudrais exprimer ma sincère gratitude aux autorités politiques de votre pays pour leur position courageuse sur la CPI et pour tout ce qu’elles entreprennent pour la recherche de la vérité. Merci et à très bientôt à Moscou.

http://french.ruvr.ru/2013_10_29/Toussaint-Alain-L-Afrique-s-impatiente-de-voir-Gbagbo-libre-Partie-2-0022/

Mikhail Gamandiy-Egorov