Archives du mot-clé CEI

UEEA: des échanges en hausse et perspectives à venir

29.03.2022

L’année écoulée a été celle d’une augmentation significative des échanges pour l’Union économique eurasiatique – aussi bien à l’intérieur de l’union que sur le plan du commerce avec l’extérieur. Par ailleurs, l’espace eurasiatique sera indéniablement appelé à renforcer les échanges et les mécanismes avec ses principaux partenaires d’Asie, à l’heure où l’Occident se conforte dans sa propre isolation.

Le Département des statistiques de la Commission économique eurasienne a annoncé les résultats préliminaires du commerce mutuel et extérieur de l’Union économique eurasiatique (UEEA), 4ème puissance économique mondiale en termes de PIB à parité du pouvoir d’achat, pour l’année 2021.

Il en ressort que le volume du commerce extérieur des échanges entre les Etats membres de l’Union économique eurasiatique avec les pays hors UEEA est estimé à 844,2 milliards d’équivalent de dollars, représentant une augmentation de 35,1% par rapport à 2020. Par ailleurs, l’excédent du commerce extérieur en 2021 s’est élevé à 207,2 milliards d’équivalent de dollars (contre 105 milliards en 2020).

Autre point important: la croissance de la valeur des exportations des Etats membres de l’UEEA vers les pays hors union l’année écoulée était principalement due à l’augmentation des prix des biens exportés (de 46,3%), le tout alors que le volume physique des biens exportés a au contraire diminué (de 1,5%). En ce qui concerne les résultats par pays membre, les exportations ont augmenté de 47,8% pour la Biélorussie, de 47% pour la Russie, de 25,8% pour le Kazakhstan et de 16,8% pour l’Arménie.

En ce qui concerne les marchés extérieurs concernés par cette hausse significative des exportations des pays membres de l’UEEA – l’Union européenne a représenté 42,2%, les pays membres de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC): 28,3% (très principalement la Chine), les pays de la CEI non-membres de l’UEEA ont été quant à eux destinataires de 5,8% des dites exportations.

Du côté des échanges mutuels des Etats membres de l’Union économique eurasiatique en 2021, calculé comme la somme de la valeur des opérations d’exportations des membres de l’UEEA dans le commerce mutuel – cela s’est élevé à 72,6 milliards d’équivalent de dollars, soit 131,9% du niveau de 2020. A noter également que dans le commerce mutuel des pays membres de l’union – le rouble russe occupe la position de leader en qualité de monnaie des échanges.

Parlons maintenant perspectives. Evidemment et compte tenu des nouvelles réalités géopolitiques et géoéconomiques, notamment dans l’incapacité la plus totale des régimes occidentaux à pouvoir s’adapter aux règles du monde multipolaire, il est évident que l’Union économique eurasiatique devra orienter beaucoup plus ses échanges en direction du grand espace eurasien, et notamment en direction de pays comme la Chine, l’Inde, le Pakistan ou encore l’Iran (qui réfléchit d’ailleurs à intégrer l’UEEA). Le tout en privilégiant les paiements en monnaies nationales.

Ceci d’autant plus que les pays de l’Europe bruxelloise n’ont pas saisi l’occasion de comprendre que leur intérêt pragmatique était naturellement avec l’Eurasie. Cela sans même rentrer dans une quelconque alliance, sachant de toute manière que sur le plan civilisationnel l’espace eurasiatique n’a désormais que très peu à partager avec une Europe où les valeurs dignes de ce nom ont été depuis longtemps profondément inversées. Mais le pragmatisme économique aurait permis de tenir compte des intérêts de chacun, et des « particularités » de chacun.

Désormais, cela est fort probablement impossible. L’Europe dans sa version bruxelloise, n’est qu’un simple sous-traitant des ordres washingtoniens. Et dont la réputation ne vaut absolument plus rien. Les responsables à la tête de cette Europe préfèrent sacrifier leurs propres populations, du moment que le maître outre-Atlantique sera satisfait par leur obéissance.

Aujourd’hui, il devient déjà assez évident qui sera le grand perdant économiquement parlant. Mais il ne faut pas espérer que la Russie ou ses alliés eurasiatiques tendront de nouveau la main à un navire qui a décidé de ses propres vœux à couler. Peut-être que viendra le jour où de nouveaux leaders européens, sans arrogance néocoloniale ni rêves pro-unipolaires, prendront la destinée de leurs Etats respectifs. Mais soyons clairs – ce n’est pas pour un avenir très proche. Et pendant ce temps, l’Eurasie sait ce qui lui reste à faire. Le monde n’étant absolument pas l’Occident collectif.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3722

L’Union économique eurasiatique: du Kazakhstan jusqu’à Cuba

L’Union économique eurasiatique (UEEA) a accordé le statut d’observateurs à l’Ouzbékistan et Cuba, élargissant par la même occasion son influence régionale et internationale. Retour sur les développements récents et moins récents.  

Malgré la vive opposition de nombre d’Etats occidentaux aux processus d’intégration dans l’espace eurasiatique ex-soviétique, principalement de Washington, rien ne semble pour le moment pouvoir stopper un processus enclenché depuis les années 1990 comme une initiative personnelle de Noursoultan Nazarbaïev, devenue une réalité en 2014. Depuis ledit processus poursuit sa lancée.

Il est important encore une fois de rappeler le rôle précisément du Kazakhstan et notamment de son ex-président Nazarbaïev pour que l’UEEA voie le jour. En effet, le leader kazakh à l’instar de nombreux habitants d’Asie centrale était opposé à l’éclatement de l’URSS. Mais lorsque la fin de l’Union soviétique était en train de devenir une réalité, il avait cherché dès les premiers moments à créer et bâtir un autre cadre d’intégration et d’interaction dans l’espace eurasien post-soviétique. Et ce aussi bien dans l’intérêt de son pays le Kazakhstan, que de nombreux autres Etats ayant composé l’URSS.

Dans un commentaire récent, accordé dans le cadre du film-documentaire Traits pour un portrait et diffusé par la chaîne de télévision Khabar, le premier président du Kazakhstan a évoqué comment était venue l’idée de la création de l’Union économique eurasiatique. Fait intéressant: l’initiative de Nazarbaïev était réellement apparue avant même l’éclatement officiel de l’URSS. Sa proposition était alors de créer à la base une union de quatre Etats (Russie, Kazakhstan, Biélorussie, Ukraine), dans les mains de laquelle était concentrée 90% de l’économie soviétique. Tout en proposant aux autres pays de pouvoir l’intégrer, selon leur volonté.

Mais l’idée n’avait pas reçu l’approbation de Mikhaïl Gorbatchev – le dernier leader de l’URSS, ni de Boris Eltsine – le premier président de la Russie post-soviétique. Au lieu de cela c’est la Communauté des Etats indépendants (CEI) qui verra le jour. Pour autant et voyant que la nouvelle organisation ne contribuait pas à une intégration profonde au sein de l’espace concerné, Noursoultan Nazarbaïev avait continué à insister pour qu’une structure d’intégration plus puissante se réalise.

Au final, c’est ainsi que naîtra l’Union économique eurasiatique, devenue aujourd’hui l’une des principales forces motrices aussi bien dans le grand espace eurasien, mais également dans le cadre du concept multipolaire du monde. Deux projets auxquels restent fermement opposés les élites étasuniennes, occidentales et atlantistes.

L’organisation est aujourd’hui composée de la Russie, du Kazakhstan, de la Biélorussie, de l’Arménie et du Kirghizistan. Depuis mai 2018, la Moldavie est devenue membre-observateur de ladite structure. Des accords de libre-échange ont été signés avec le Vietnam (mai 2015), l’Iran (mai 2018), le Singapour et la Serbie (tous deux en octobre 2019).

Désormais – deux nouveaux Etats ont rejoint avec l’aval des pays membres les observateurs de l’organisation: à savoir l’Ouzbékistan et Cuba. Dans le cas du premier, il s’agirait vraisemblablement que de la première étape du processus d’intégration. Sachant que lors du sondage mené en mai de cette année, ¾ des citoyens ouzbeks avaient soutenu l’intégration de leur pays au sein de l’UEEA. Fait notable: parmi eux – beaucoup de jeunes.

En ce qui concerne Cuba, les éléments d’une coopération multisectorielle donnent non seulement des avantages, notamment économiques, évidents pour l’île de la liberté, mais peuvent également ouvrir la voie à une interaction encore plus large entre l’Eurasie et l’Amérique latine. Le tout au moment où nombre d’Etats latino-américains soutiennent fermement l’ère multipolaire mondiale. Parmi eux, on peut citer le Venezuela, le Nicaragua, la Bolivie ou encore l’Argentine.

Dans le cas de l’espace eurasien, une grande puissance comme l’Iran pourrait devenir également membre-observateur de l’Union économique eurasiatique prochainement. Des négociations sont prévues en ce sens. A noter que la République islamique est déjà membre-observateur d’une autre grande structure internationale basée en Eurasie – en l’occurrence l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), une structure dans laquelle elle devrait devenir membre à part entière dans un avenir proche.

Et lorsqu’on sait que ces événements majeurs, dans le cadre de l’UEEA, se sont réalisés en l’espace d’un peu plus de six ans – de la création aux événements actuels, il est évident que l’espace eurasien aura pour mission de poursuivre le renforcement observé. Et ce malgré la vive opposition des nostalgiques de l’unipolarité.

Mikhail Gamandiy-Egorov

https://t.me/observateur_continental/703