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« La vérité finira par triompher ! ». Entretien avec François Mattei (Partie 2)

« La vérité finira par triompher ! ». Entretien avec François Mattei (Partie 2)

Suite de la première partie de l’entretien.

LVdlR : Dans votre livre écrit en collaboration avec M. Gbagbo, on le retrouve dire que la « vérité finira par triompher »… Comment le président Gbagbo entrevoit-il son avenir, celui de ses proches et de la Côte d’Ivoire ? Et qu’en pensez-vous ?

F.M. : Moi, je suis très inquiet pour la Côte d’Ivoire parce que je pense qu’elle est aux mains de gens peu fiables. Des gens qui sont venus au pouvoir par les armes. Qui continuent à maintenir leurs positions par les armes. M. Ouattara ne peut rien faire contre ces gens qui l’ont ramené au pouvoir et qui sont pour la plupart analphabètes. Ils sont très nombreux. On retrouve notamment un commis de cuisine devenu préfet, c’est formidable… M. Soro, président de l’Assemblée nationale, qui a été également Premier ministre, n’est autre qu’un chef de guerre. Qui a été en outre désigné par un bon nombre de rapports à une certaine époque comme responsable de crimes de guerre et qui se retrouve aujourd’hui sous immunité parlementaire. Il guette le pouvoir comme M. Bakayoko, qui est le ministre de l’Intérieur. Et à la base, ils sont tous chefs de milices armées, qu’ils continuent chacun de diriger. Et ils se guettent tous du coin de l’œil en attendant que M. Ouattara, qui est bien malade, disparaisse de la scène politique. Tout cela est assez inquiétant. Le seul qui pouvait dégager un consensus c’est Laurent Gbagbo. On n’en a pas voulu. Ce qui se passe désormais c’est qu’il va passer en procès. Et il faut pour cela situer deux choses : le 3 juin 2013, la Cour pénale internationale avait dit qu’il n’y avait aucune charge retenue contre lui. Quelques mois plus tard, il y a toutes les charges retenues. Il se trouve que pour avoir étudié le dossier, il n’y a rien de nouveau. Que tout le monde le sache, il n’y a absolument rien de nouveau. Donc on voit bien qu’il s’agit d’une décision politique. Parce qu’en 2015 il y a l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire et on ne veut pas que Gbagbo soit libre. Et que l’objectif est de le maintenir le plus longtemps possible hors du jeu politique et afin qu’il n’y ait plus de possibilité pour lui de revenir. La vérité sortira tout de même. Et je pense qu’avec elle ce sera le procès de la CPI et non pas de Laurent Gbagbo. Qu’est-ce que représente la CPI sinon une institution, je dis bien une institution et non pas une juridiction, qui sert des intérêts particuliers ? Le dossier contre M. Gbagbo a été fabriqué à Paris et à Abidjan par le pouvoir actuel. Ce dernier ayant énormément de choses à se reprocher. Les seuls actes réellement génocidaires ont été commis par le pouvoir actuel ou en tout cas par les gens qui le soutenaient. Et aucun d’entre eux ne se retrouve aujourd’hui à la CPI. Donc on s’aperçoit bien que c’est une institution qui n’est pas respectable et qu’il convient de ne pas respecter. Le problème c’est que M. Gbagbo y est. J’allais dire qu’on attend avec impatience le procès parce que M. Gbagbo aura la possibilité de parler au monde. Et j’espère que cela sera retransmis partout. Et dans ce cas-ci, la CPI s’écroulera.

Quant à M. Gbagbo lui-même, il reste optimiste. Il sait parfaitement ce qui s’est passé. Pour résumer : étant donné qu’il y avait un litige électoral, c’est-à-dire deux présidents, lui a demandé qu’on recompte les voix sous l’égide d’une commission internationale. Cela a été refusé. Pourtant lorsqu’on sait qu’on a gagné, on ne devrait pas avoir peur du recomptage des voix. D’autant plus que c’est un usage absolument courant. On l’a vu aux Etats-Unis dans le cas de Bush et Gore. On l’a vu avec l’UMP en France, où pour la présidence d’un parti politique il y a eu une comédie tragique durant des mois. Autre exemple encore : Haïti, où cela s’est très bien passé : celui qui était arrivé au départ troisième est devenu après recomptage président de la république car il y avait eu des comptes mal faits au départ. Donc au lieu de faire des morts et de faire la guerre, car en Côte d’Ivoire faut le rappeler il y a eu beaucoup de morts, il aurait fallu tout simplement recompter les voix. Pourtant c’est l’option de la guerre qui été choisie au lieu de faire un recomptage qui aurait économisé énormément de vies humaines. Laurent Gbagbo s’est maintenu au pouvoir car il a été élu. Il a donc continué d’exercer, aussi bien en ce qui concerne ses prérogatives économiques que militaires, en défendant le pays. C’est ce qu’on lui reproche aujourd’hui. On lui reproche en fait d’avoir continué à gouverner alors que ladite communauté internationale estime qu’il était battu aux élections. Et dernière chose encore : je ne sais pas où a-t-on lu et décidé que c’était la communauté internationale ou quiconque qui décidait de l’élection d’un président de la république d’un pays souverain. Logiquement, c’est le peuple du pays en question qui il me semble doit choisir son avenir. La communauté internationale a peut-être un rôle mais elle ne peut agir qu’en respectant la souveraineté d’un Etat et du libre choix de son peuple à la suite d’une élection démocratique. C’est ce que Laurent Gbagbo va défendre et là-dessus il est tout à fait tranquille. Concernant l’avenir de la Côte d’Ivoire, il est très inquiet car il pense qu’aujourd’hui il n’y a plus de démocratie en Côte d’Ivoire. Pour vous dire, un très grand nombre de marchés se font aujourd’hui de gré à gré alors qu’on dit que M. Ouattara est un grand économiste. Peut-être. En tout cas, aucune des règles normales dans ce domaine n’est respectée, ni appliquée. La Côte d’Ivoire, curieusement, va mal alors que la guerre est finie. On a reproché son bilan à Gbagbo alors qu’il se trouvait en état de guerre avec la moitié du pays occupé. Et le bilan était malgré tout cela très loin d’être mauvais. Je peux le démontrer. Quant à aujourd’hui, il y a une chute des ressources pétrolières, ainsi que des ressources du cacao. Ca va très mal. Pourquoi ? Car il y a beaucoup de détournements. Ce n’est pas qu’il y a moins de cacao et de pétrole. Simplement il y a énormément de gens qui font du « business ». Parmi eux, un grand nombre de politiciens français. Notamment M. Guéant qui était ministre de l’Intérieur, ainsi que son gendre qui s’occupe notamment de la privatisation des banques là-bas. Ils font tous de très grosses affaires. La Côte d’Ivoire est devenue aujourd’hui un comptoir. Ce n’est plus un Etat mais bien un comptoir ouvert aux quatre vents du libéralisme sauvage.

LVdlR : Croyez-vous qu’un jour les responsables de la rébellion armée en Côte d’Ivoire, ainsi que ceux ayant commis des crimes depuis 2002, puissent se retrouver devant la justice, nationale ou internationale ? Ou alors, pensez-vous que leurs mentors occidentaux ne le permettront jamais ?

F.M. : Je pense qu’ils ne le permettront jamais. Et puis c’est déjà trop tard. Il est évident que si on veut faire un procès et la mise à plat de tout ce qui s’est passé là-bas, il faut envoyer à la CPI M. Soro. Et pourquoi pas M. Ouattara ? Tous ces gens-là ont organisé une rébellion sauvage. Il y a eu des centaines de milliers de morts, des villages rasés. Des massacres massifs. L’inaction de la CPI est absolument incompréhensible. Mais la communauté internationale est piégée dans sa posture parce qu’elle a soutenu ces gens-là. La vérité, elle, sera connue. Mais en ce qui concerne la probabilité qu’il y ait des sanctions à l’encontre des responsables de ces crimes, je pense qu’il y a très peu de chances.

LVdlR : Selon vous, la CPI ne s’est-elle pas définitivement discréditée en confirmant les charges contre Laurent Gbagbo et en faisant toujours la sourde oreille quant à la responsabilité de crimes massifs commis par les rebelles soutenus par le gouvernement français ?

F.M. : A mes yeux, oui. Et aux yeux de beaucoup de Français qui heureusement commencent à se réveiller. Y compris grâce aux débats qu’il y a eu à la CPI, beaucoup de gens commencent à voir clairement que sous l’habillage juridique, on voit apparaitre des intérêts clairement politiques, militaires et économiques. Je crois que la vérité va sortir. Beaucoup de gens commencent à réagir différemment, comparé à même deux ou trois ans auparavant. Et si les gens s’aperçoivent qu’ils ont été à ce point trompés, cela risque d’être violent. C’est ainsi en France, on se réveille tous les 20 ans. J’ai confiance en les gens de mon pays. Ce secret de la Françafrique, cette sinistre comédie mais qui rapporte énormément à l’Etat français, qu’on essayait de garder si longtemps s’ouvre aujourd’hui au grand jour. Et maintenant que les citoyens commencent à comprendre sur le fond pourquoi on joue avec les chefs d’Etats en Afrique comme avec des pions sur un échiquier, je crois qu’il y aura une réaction salutaire en France. Vous savez il y a un ancien ambassadeur de France, M. Gildas Le Lidec, qui vient de publier un livre « De Phnom Penh à Abidjan », qui mentionne justement la période où il était ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, à l’époque de Laurent Gbagbo. Et il y raconte des choses formidables pour dire qu’on n’a jamais laissé une chance à Gbagbo et que la France n’en voulait tout simplement pas. Et que même le chef de guerre Soro a voulu l’étrangler. Il parle donc de toutes ces choses comme un témoin direct.

LVdlR : Merci M. Mattei d’avoir répondu à nos questions ! Bonne continuation à vous !

F.M. : Merci !

http://french.ruvr.ru/2014_07_02/La-verite-finira-par-triompher-Entretien-avec-Francois-Mattei-Partie-2-9850/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

L’Ivoirien Blé Goudé à la CPI : nouvelle bavure de la prétendue « justice internationale »

Charles Blé Goudé

Après l’arrestation le 11 avril 2011 du président légitime de la République de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, et son transfert, en novembre de la même année, à la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye, c’est désormais au tour du ministre ivoirien de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, d’y être déporté.

Chef du mouvement les Jeunes Patriotes, Blé Goudé a joué un rôle majeur dans la résistance au néocolonialisme occidental, aux côtés du président Laurent Gbagbo et de tous les autres résistants panafricains. Après la chute et l’arrestation de Laurent Gbagbo, déchu par l’intervention directe de l’armée coloniale française, Charles Blé Goudé s’était exilé au Ghana.

Enlevé dans la capitale ghanéenne le 17 janvier 2013 par les services secrets d’Alassane Ouattara, il sera transféré en Côte d’Ivoire et restera en détention dans différents lieux illégaux tenus secrets par le régime. Visé par un mandat d’arrêt de la CPI, il y sera finalement transféré le 22 mars dernier. Comparaissant pour la première fois le 27 mars, confiant et souriant, il lancera : « Si je suis jugé pour ce que j’ai fait et non pour ce que je suis, que je sois déclaré innocent ! Je sais que je repartirai chez moi ».

Une intervention qui a redonné beaucoup d’optimisme à tous ses soutiens et, plus généralement, à tous les patriotes ivoiriens, dont nombreux sont allés spécialement à La Haye pour exprimer leur soutien à Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Le jeune patriote a également ouvertement affiché sa volonté afin que la lumière soit entièrement faite sur la crise ivoirienne, en dépit de la propagande occidentale. Et d’ajouter : « Contrairement à une certaine opinion qui pense qu’un voyage à la CPI est un voyage sans retour, je pense qu’un citoyen peut faire l’objet d’un procès et rentrer chez lui. » Charles Blé Goudé n’a pas manqué de réitérer son adhésion aux idéaux de Laurent Gbagbo et à leurs valeurs communes : « C’est avec Gbagbo que j’ai appris la réconciliation. Je suis pro-Gbagbo et fier de l’être ».

La grande question que pose cette situation nous ramène à celle dont ont débattu les parlementaires et diplomates russes le 11 novembre dernier à la Douma d’Etat (Chambre basse du Parlement russe), à savoir la crédibilité de la justice internationale et des institutions qui l’ont établie. Les parlementaires russes, ainsi que les autres participants à l’événement, avaient ouvertement mis en avant toutes les contradictions de ces institutions, censées défendre le droit et la justice internationale pour tous, sans exception. Pourtant les procès et pré-procès en cours montrent une approche politisée presque non voilée. Et c’est cette politisation des institutions juridiques « internationales » qui avait été dénoncée à la Douma.

En effet, il est complètement incompréhensible et révoltant que des personnes légitimement élues, ainsi que les membres d’un gouvernement légitime, qui défendaient leur pays contre une rébellion armée, soutenue et financée de l’extérieur – notamment par la France -, et s’opposaient ouvertement au néocolonialisme dans leur pays et sur leur continent, soient privés aujourd’hui de leur liberté. Pendant ce temps, les criminels responsables de massacres massifs aussi bien de civils (on se souvient tous du très tristement célèbre Duékoué en mars 2011) que de représentants de l’Etat, occupent des hautes fonctions dans l’appareil de l’Etat ivoirien actuel et se baladent tranquillement à différents endroits de la planète. Certains sont même reçus à l’Elysée. C’est cela la justice internationale ?

Il y a quelques jours, le 11 avril, les Ivoiriens commémoraient le triste anniversaire de l’arrestation de leur président légitime par les forces armées françaises. C’était le 11 avril 2011. Bombardement de la résidence présidentielle, arrestation du président Gbagbo, de son épouse Simone et tous les proches qui étaient à leurs côtés. Ce jour-là, la démocratie, l’indépendance et la souveraineté de la Côte d’Ivoire ont été tout simplement bafouées et piétinées. Et les décisions plus que contradictoires des juridictions telles que la CPI ne renforcent en rien la confiance, même relative, en ces institutions.

Mais depuis, la résistance ivoirienne n’a aucunement baissé d’intensité, bien au contraire. Et compte tenu de l’actualité internationale et de l’avènement d’une nouvelle ère dans la politique planétaire, leur conviction que la liberté viendra et que justice sera faite ne fait que se renforcer.

http://french.ruvr.ru/2014_04_15/L-Ivoirien-Ble-Goude-a-la-CPI-nouvelle-bavure-de-la-pretendue-justice-internationale-3395/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

Toussaint Alain : « L’Afrique s’impatiente de voir Gbagbo libre ! » (Partie 2)

Suite de la première partie.

La Voix de la Russie : Les charges contre le président Laurent Gbagbo n’ont pas été confirmées par la CPI. Malgré cela, M. Gbagbo est toujours emprisonné, le temps que le procureur puisse trouver « des éléments de preuves additionnels », comme l’ont demandé les juges de la Cour. Comment jugez-vous cette situation ?

Toussaint Alain : Croyez-vous sincèrement qu’il pouvait en être autrement ? Nous sommes devant une situation inédite : un tribunal reconnaît qu’il n’a pas de d’éléments suffisants mais il s’obstine tout de même à maintenir en détention un inculpé. C’est époustouflant comme procédé ! On l’aura compris : la mission de la CPI n’est pas de dire le droit mais de condamner coûte que coûte. Or, Laurent Gbagbo est présumé innocent. Avec tous les moyens dont disposent le procureur et ses enquêteurs, la CPI n’a pas été en mesure de fournir la moindre preuve inattaquable. Que cette comédie inhumaine cesse ! Le président Gbagbo doit être remis en liberté.

LVdlR : On évoque une possible mise en liberté provisoire de Laurent Gbagbo. La demande a été introduite à plusieurs reprises par la défense. Qu’en est-il ?

Toussaint Alain : Oui, j’ai entendu beaucoup de déclarations à ce sujet. Je ne vais en rajouter à la spéculation. Sachez que la Côte d’Ivoire et l’Afrique s’impatientent de voir Laurent Gbagbo libre. Pas seulement en liberté provisoire mais en liberté pleine et définitive tout simplement. La CPI dessert la cause de la justice mondiale en maintenant un innocent en détention alors que les charges s’effondrent les unes après les autres comme un château de cartes. L’incarcération de Laurent Gbagbo est un non-sens. On ne peut pas emprisonner quelqu’un par convenance ou par pur calcul politique. Gbagbo est innocent. Sa libération revêt un enjeu de paix et de stabilité pour la Côte d’Ivoire, où le naufrage du processus de réconciliation saute aux yeux. Les Ivoiriens ont envie d’être de nouveau ensemble, de cohabiter pacifiquement. Après la politique, il y a la vie de tous les jours. Libre, Gbagbo peut être un puissant accélérateur de la cohésion sociale et un facilitateur de la confiance retrouvée entre ses compatriotes. Ni la CPI ni le Conseil de sécurité de l’ONU ne peuvent ignorer cette dimension de l’affaire.

LVdlR : Quelles sont les dernières avancées notoires dans la situation politique en Côte d’Ivoire ?

Toussaint Alain : M. Ouattara a récemment fait quelques gestes en remettant en liberté plusieurs personnalités proches du président Gbagbo. Il reste encore au moins 800 prisonniers politiques, toujours détenus sans jugement. Parmi eux, Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, lequel reste privé de l’assistance de ses avocats. La détention au secret ou la torture physique ou psychologique n’ont jamais fait avancer la cause de la vérité. Sur le plan politique, on a pu observer aussi que le Front populaire ivoirien (FPI, parti du président Gbagbo – Ndlr) a repris du poil de la bête avec le retour aux affaires de Pascal Affi N’Guessan, son président. Les lignes bougent puisque l’opposition peut de nouveau tenir des réunions publiques. Mais tout cela reste précaire et conditionné à l’humeur des autorités actuelles. Or, il y a nécessité d’instaurer un climat de confiance durable entre le pouvoir et l’opposition afin d’éviter de nouvelles crises. Cela passe également par la levée des mandats d’arrêt internationaux contre des anciens dignitaires et le dégel des comptes bancaires de plusieurs centaines de personnalités proches du président Gbagbo ou ayant servi l’Etat sous sa gouvernance.

LVdlR : Le régime d’Alassane Ouattara devient-il plus conciliant avec l’opposition à l’approche de l’élection présidentielle de 2015 ?

Toussaint Alain : Le gouvernement ne perd rien à ouvrir un vrai dialogue politique avec l’opposition. Bien au contraire. Effectivement, tout le monde songe déjà à la présidentielle de 2015. Mais il y a des sujets cruciaux qu’il faut absolument régler afin de mieux aborder cette échéance. L’objectif étant de garantir la paix et la sécurité.

D’abord, l’épineuse question du désarmement des ex-combattants de M. Ouattara : au moins 65 000 soldats en armes. Ils constituent une vraie source d’inquiétude et d’insécurité tant pour le pouvoir que pour les populations. Ensuite, il y a l’indispensable recomposition de la Commission électorale indépendante (CEI) dont la mission a officiellement pris fin, selon les accords de paix inter-ivoiriens, depuis les dernières élections locales d’avril 2013. Enfin, la révision de la liste électorale et l’inscription de plusieurs millions de nouveaux majeurs sur les listings. L’élection de 2015 reste ouverte. A mi-mandat, la grogne sociale est forte car M. Ouattara n’a tenu aucune de ses promesses électorales : un million d’emplois, les soins gratuits, cinq nouvelles universités, des milliers de nouvelles écoles, des points d’adduction d’eau potable dans tous les villages du pays, etc. Le chômage a atteint un niveau endémique. L’économie tourne au ralenti. Une note interne d’une célèbre institution de Bretton Woods a récemment tiré la sonnette d’alarme sur la gestion de M. Ouattara. La Côte d’Ivoire, qui a un programme avec le Fonds monétaire international (FMI), continue de s’endetter clandestinement auprès de régimes amis pour sauver les apparences. Les créanciers du pays sont eux aussi irrités par les pratiques peu orthodoxes de ce pouvoir incompétent. Et le mois de décembre s’annonce difficile sur le plan budgétaire. Or, les caisses de l’Etat sont désespérément vides. Face à ce triste tableau, le régime n’aura pas d’autre alternative que la fraude industrielle pour tenter de se maintenir au pouvoir. Je ne doute pas que les Ivoiriens veilleront à ce que M. Ouattara ne leur vole pas la victoire une nouvelle fois.

 LVdlR : M. Toussaint Alain, je vous remercie. Très bonne continuation à vous !

Toussaint Alain : Merci à La Voix de la Russie de m’avoir donné la parole. Je voudrais exprimer ma sincère gratitude aux autorités politiques de votre pays pour leur position courageuse sur la CPI et pour tout ce qu’elles entreprennent pour la recherche de la vérité. Merci et à très bientôt à Moscou.

http://french.ruvr.ru/2013_10_29/Toussaint-Alain-L-Afrique-s-impatiente-de-voir-Gbagbo-libre-Partie-2-0022/

Mikhail Gamandiy-Egorov

 

 

Côte d’Ivoire et CPI : entretien avec Toussaint Alain (Partie 1)

Côte d'Ivoire et CPI : entretien avec Toussaint Alain (Partie 1)

Nous avons le privilège aujourd’hui de nous entretenir de nouveau avec M. Toussaint Alain, ancien conseiller, ex-porte-parole et représentant dans l’Union européenne (UE) du président Laurent Gbagbo – président de la République de Côte d’Ivoire de 2000 à 2011.

 M. Alain préside aujourd’hui le groupe de pression Côte d’Ivoire Coalition Inc., représenté dans plusieurs pays. Fin janvier, Toussaint Alain s’était déjà confié à La Voix de la Russie à l’issue d’une autre visite de travail à Moscou, où il avait été reçu en audience par des dirigeants politiques et des députés du Parlement russe, la Douma.

 La Voix de la Russie : Monsieur Alain, bonjour ! Nous avons appris la demande d’extradition vers la Cour pénale internationale (CPI) de Simone Gbagbo, l’épouse de M. Laurent Gbagbo. Une extradition qui a été refusée par le régime d’Alassane Ouattara…

 Toussaint Alain : C’est une décision sage. Mme Simone Gbagbo est innocente. C’est une femme politique importante, une intellectuelle de premier rang qui a fortement contribué à l’éveil démocratique en Côte d’Ivoire. La CPI ignore probablement qui elle est en réalité. M. Alassane Ouattara a aussi certainement voulu épargner son camp. Les chefs de guerre, qui forment aujourd’hui sa garde prétorienne, avec leur donneur d’ordre Guillaume Soro, sont impliqués dans de graves violations des droits de l’Homme depuis septembre 2002. Tout cela est connu. Toutefois, j’estime que M. Ouattara a eu raison de ne pas céder aux rêveries de la CPI qui croit devoir juger les Africains en lieu et place des tribunaux africains. La justice est un pilier essentiel de l’État de droit. Notre institution judiciaire compte en son sein des femmes et des hommes aguerris qui ne demandent qu’à travailler en toute indépendance, loin des pressions politiques. Simone Gbagbo a droit à un procès équitable en Côte d’Ivoire devant un tribunal indépendant et impartial. Elle pourra alors répondre à toutes les graves accusations portées contre sa personne. C’est le minimum qu’un pays indépendant depuis 1960 puisse garantir à une citoyenne. La CPI n’a aucun rôle à jouer dans cette affaire et dans toutes les autres, y compris celles impliquant des lieutenants de M. Ouattara : ces dossiers relèvent de la compétence exclusive des instances judiciaires ivoiriennes.

 LVdlR : Depuis le 1er octobre, la CPI a rendu public un mandat d’arrêt à l’encontre de Charles Blé Goudé, l’ex-ministre de la jeunesse du dernier gouvernement de Laurent Gbagbo. Comment interprétez-vous cette nouvelle procédure visant un pro-Gbagbo ?

 Toussaint Alain : C’est un grand classique : la CPI ne poursuit qu’un seul camp. Pourquoi rendre public seulement en octobre 2013 un mandat émis depuis décembre 2011 ? Compte tenu de la gravité des crimes allégués, elle aurait dû le faire immédiatement afin d’alerter l’opinion sur la « dangerosité » de ce jeune leader progressiste. Vous savez, plus personne ne prend au sérieux cette Cour. Une fois encore, la CPI fait montre d’une cécité affligeante. Ce nouveau mandat traduit une méconnaissance flagrante de l’histoire de la Côte d’Ivoire. C’est très inquiétant. Blé Goudé n’était pas un chef de milice ni un chef de guerre. C’est un patriote qui s’est engagé, avec son verbe pour seule arme, dans le combat politique. Durant dix ans, il a mobilisé des millions de compatriotes, éveillé des consciences et même sensibilisé à la paix auprès des populations après l’accord entre l’État ivoirien et la rébellion de MM. Ouattara et Soro. Si j’ai bien compris, le fait de revendiquer la liberté, la souveraineté et l’indépendance des peuples africains constitue un « crime contre l’humanité » pour la Cour. Tout comme la résistance face au néocolonialisme des Occidentaux désormais à la reconquête de l’Afrique. C’est pourtant cette même « humanité » que l’on extermine impunément à Duékoué, Guitrozon, Nahibly… lorsque des bandes armées se rendent coupables des pires atrocités. Ce double standard prouve bien que la CPI a un agenda politique et qu’elle est au service exclusif des plus puissants.

 LVdlR : Justement, la CPI est chargée de juger les auteurs présumés de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre…

 Toussaint Alain : La CPI s’est grandement dévaluée aux yeux des Africains et des dirigeants du continent. Comme en atteste la récente fronde à l’Union africaine (UA). Cette Cour sera crédible le jour où elle inculpera les chefs d’État occidentaux dont les armées assassinent des civils au nom de la démocratie ou de la lutte contre le terrorisme. Voyez ce qu’ont fait les présidents Bush, Obama, Chirac et Sarkozy en Afghanistan, Irak, Libye ou encore en Côte d’Ivoire. Des dizaines de milliers de personnes y ont été impunément massacrées dans le silence assourdissant des sempiternels donneurs de leçons. Qu’a fait la CPI ? Rien ! Elle préfère s’en prendre au Soudanais Omar el-Béchir, à l’Ivoirien Laurent Gbagbo ou au Congolais Jean-Pierre Bemba plutôt qu’aux chefs de l’OTAN. Sincèrement, l’épithète « internationale » dans la dénomination de cette Cour est une imposture : le mot « indigène » eût été mieux indiqué ! Que la CPI laisse nos instances judiciaires nationales gérer ces situations. La Côte d’Ivoire dispose des instruments juridiques et des ressources humaines pour juger Blé Goudé ainsi que tous les autres sur son territoire. Ces procédures doivent aussi avoir une vocation pédagogique. La vérité doit être connue afin d’édifier les générations futures. Transférer Blé Goudé à la CPI ou le juger au pays, voilà un autre dilemme pour le pouvoir. J’ai foi que M. Ouattara et son gouvernement n’extraderont pas Blé Goudé. L’Afrique en a assez de livrer ses enfants à cet Occident ingrat et égoïste.

Suite dans la seconde partie de l’entretien

http://french.ruvr.ru/2013_10_25/Cote-dIvoire-et-CPI-entretien-avec-Toussaint-Alain-Partie-1-5007/

Mikhail Gamandiy-Egorov