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Maroc-Russie: maintien et développement des projets conjoints

02.11.2022

Malgré la conjoncture internationale difficile, à un moment où une minorité planétaire s’obstine à refuser d’admettre officiellement l’ordre multipolaire, les relations russo-marocaines maintiennent le cap d’un développement intéressant. Et ce malgré l’opposition occidentale et de certains éléments leur étant affiliés.

Bien que l’impact des sanctions occidentales visant la Russie s’est fait ressentir pour les opérateurs économiques russes comme marocains, notamment dans le cadre de l’organisation des transactions financières réciproques, le fait est que les deux parties, contre vents et marées, maintiennent non seulement l’orientation des secteurs et projets conjoints existants, mais s’ouvrent déjà à de nouveaux horizons.

Le domaine agricole reste évidemment l’un des premiers concernés. Sachant que la Russie représente l’un des principaux marchés d’exportation du Maroc dans le secteur agroalimentaire, et que pour les agrumes marocains le marché russe reste certainement le principal. A ce titre et comme le rappelle le journal marocain L’Opinion – la Russie a vu son approvisionnement en fruits et légumes augmenter pour s’établir à 5,1 millions de tonnes, au titre des sept premiers mois de l’année courante, dont 45% de ce volume total proviendrait du Maroc.  

Dans l’autre sens, la Russie se dit prête à multiplier par 10 ses exportations agricoles vers le Royaume, notamment dans le cadre des céréales, la viande, les huiles végétales, le sucre et d’autres produits. D’ailleurs et en ce qui concerne particulièrement la question stratégique de fourniture des céréales, le chef de la représentation commerciale russe à Rabat, Artem Tsinamdzgvrishvili, a rappelé la pleine disponibilité de la Russie à fournir le pays en volumes nécessaires.

Il faudrait d’ailleurs certainement rappeler que le Maroc fait partie du Top 3 des principaux partenaires économico-commerciaux de Moscou en Afrique. L’autre domaine de grande interaction entre les deux pays est celui de la pêche, où tout semble aller vers une nouvelle phase fortement intéressante. Au-delà du renouveau de l’accord pour les navires russes à pêcher dans les eaux marocaines, la capitale économique du Maroc – Casablanca – deviendrait un important centre de réparation  et d’entretien pour les navires de pêche russes, opérant dans l’océan Atlantique.  

Et ce aux dépens de la ville espagnole de Las Palmas, avec à la clé des centaines de millions d’équivalent d’euros qui seront versés aux chantiers navals locaux et des centaines d’emplois pour les citoyens marocains. Mais là aussi ce n’est pas tout. De plus en plus d’opérateurs économiques russes s’intéressent aux projets d’investissements en terre marocaine, et le plus souvent avec la bienveillance des autorités compétentes locales.

Enfin, la question de la coopération dans le nucléaire civil est venue s’ajouter au panier des projets conjoints, y compris l’éventualité de la construction d’une centrale nucléaire par l’un des principaux acteurs mondiaux en la matière – la compagnie étatique russe Rosatom. Si les experts discutent déjà de l’éventualité de ce projet, de sa faisabilité et du timing nécessaire à sa réalisation en cas de confirmation définitive, le fait est que cela inquiète déjà le porte-flambeau médiatique de la Françafrique, le magazine Jeune Afrique, allant même jusqu’à dire qu’en cas de concrétisation dudit projet – cela représenterait « une nouvelle preuve de défiance vis-à-vis de la France ».

Pour conclure, il serait certainement juste de dire que malgré l’opposition de certains éléments – internes comme externes – quant au développement de nouveaux et grands projets conjoints russo-marocains, les principaux décideurs, de part et d’autre, semblent généralement motivés à poursuivre la voie d’une plus forte interaction. Et cela, c’est l’essentiel.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4380

L’Algérie conforte sa place de puissance militaire

La République algérienne mise sur la constance. La puissance militaire indéniable du pays s’appuie sur un partenariat historique, notamment avec la Russie et la Chine, et aucun des adversaires des cités ne peut jusqu’à maintenant pouvoir faire basculer la donne dans le domaine de l’interaction militaro-technique d’Alger.

L’Algérie maintient sa place indiscutable de la deuxième puissance militaire du continent africain, selon le classement du portail américain Global Fire Power pour l’année 2021.Au niveau mondial, le pays est monté d’une place – passant en une année de la 28ème à la 27ème place du classement.

La constance de l’Etat algérien est également dans le choix de ses principaux partenaires militaro-techniques: la Russie (représentant 69% des livraisons) et la Chine (près de 10%). Le pays fait également partie du Top 10 des principaux importateurs d’armements au niveau mondial.

Si l’interaction russo-algérienne dans le partenariat militaro-technique est effectivement restée au plus haut niveau stratégique, ce n’est pas faute pour nombre de pays occidentaux, dont la France, à avoir tenté de modifier la donne. Ou encore les Etats-Unis, ayant menacé de nombreux pays de sanctions économiques pour des contrats d’armement avec la Russie (la fameuse loi CAATSA qui vise «à contrer les ennemis des USA par le biais des sanctions»). Des USA qui n’ont également pas réussi à pouvoir bouleverser d’une quelconque façon la donne dans le partenariat stratégique entre l’Algérie et la Russie dans la sphère militaro-technique.

En d’autres termes – les campagnes de lobbying à l’élyséenne ou les menaces et intimidations à la washingtonienne – n’ont pas été des éléments jusqu’à maintenant convaincants dans les choix stratégiques de l’Algérie. Confirmant par la même occasion une approche pleinement indépendante et souveraine.

Si de nombreuses forces hostiles à Alger critiquent cette interaction avec la Russie, qu’il ne leur déplaise que c’est justement grâce à cette capacité défensive indéniable, que l’Algérie peut se tenir prête à toute tentative de déstabilisation ou d’agression extérieure, à l’instar de ce qui s’est passé en Libye. Un tel scénario est aujourd’hui inconcevable sur le sol algérien.

La puissance et la capacité défensive de l’armée algérienne est d’autant plus importante que suite à l’intervention de l’Otan contre la Jamahiriya libyenne de Mouammar Kadhafi, le chaos et la menace terroriste se sont propagés à de nombreux endroits de la région, notamment au Sahel. Un Sahel en proie à l’instabilité et dans lequel la présence militaire de troupes françaises et étasuniennes n’a apporté aucune amélioration de la situation. Au contraire, de nombreux observateurs parlent d’une détérioration évidente, qui risque d’autant plus de s’amplifier.

D’où l’importance d’une armée régionale forte, efficace, pouvant faire faire aux défis sécuritaires, tout en maintenant une politique constante, y compris dans le choix de ses partenaires historico-stratégiques. L’Algérie fait partie du Top 3 des principaux partenaires de la Russie dans le domaine militaro-technique au niveau mondial, et représente pour Moscou son deuxième partenaire économico-commercial au niveau continental africain. Le pays fait également partie des principaux partenaires de la Chine en Afrique. Cette constance dans les choix stratégiques est également une arme qu’il ne faut pas négliger.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3018

https://t.me/axe_afrique_russie/194

Quand la Russie dame le pion à l’Occident dans le Maghreb

Quand la Russie dame le pion à l’Occident dans le Maghreb

Personne n’est irremplaçable. Y compris ceux qui pensaient l’être des décennies et même des siècles durant. Le train avance, et beaucoup le voient filer.

Coopération renforcée avec Alger, multiplication des conventions avec Rabat, dont un spectaculaire accord de libre-échange entre la Russie et le Maroc, la tournée de Medvedev en Afrique du Nord se solde par un succès. Une fois encore, Moscou et les tenants de la multipolarité bousculent les positions de l’Occident.

Dmitri Medvedev revient di Maghreb les mains pleines. Le Premier ministre russe a en effet marqué des points importants au Maroc, qui était vu jusqu’à présent comme un allié occidental solide. En Algérie, moins de surprises, puisque l’alliance stratégique entre Moscou et Alger date de plusieurs dizaines d’années. Elle sort néanmoins renforcée de la visite de Medvedev, avec des promesses de diversification des secteurs d’interaction.

Le monde change, la réalité géoéconomique et géopolitique aussi. Alger comme Rabat font partie des principaux partenaires de la Russie en Afrique et dans le monde arabe. Si avec la première, cette relation s’est forgée durant la lutte d’indépendance et dans les premières années de son obtention, dans le cas du Maroc le partenariat stratégique a commencé son chemin à partir du début des années 2000.

L’Algérie fait partie du Top 3 des principaux partenaires de la Russie dans le secteur de la Défense, derrière l’Inde et la Chine. Pour la seule année 2016, Alger a commandé à Moscou pour 924 millions de dollars d’armements contre 1,2 milliard pour New Delhi et 959 millions de la part de Pékin. Mais l’interaction ne s’arrête pas là. Les deux pays partagent grand nombre de visions communes ou similaires au niveau politique et de l’actualité internationale.

Leurs intérêts communs concernent également le secteur énergétique, les deux pays étant de grands producteurs de pétrole et de gaz. Plusieurs projets dans l’industrie agroalimentaire sont en cours de négociation, l’Algérie s’ouvrant potentiellement le marché russe. Une chose est certaine: l’Algérie était, reste et restera un partenaire privilégié de la Russie, et ce à plusieurs niveaux.

Dans le cas du Maroc, les échanges avec la Russie sont également à un niveau stratégique. Rabat est un important fournisseur de produits agroalimentaires sur le marché russe. Ainsi, la Russie est-elle le principal débouché des agrumes marocains avec 45% de la production destinée à l’export, contre 30% pour l’UE et 20% pour l’Amérique du Nord. Une part de marché qui pourrait encore croître, la Russie s’étant dernièrement déclarée prête à augmenter ses achats d’agrumes en provenance du Maroc. «La part actuelle du Maroc sur le marché russe au niveau des agrumes est de 26%, nous sommes prêts à ce qu’elle atteigne 50%», a fait savoir le ministre russe de l’Agriculture Alexandre Tkatchev.

Dans le domaine de l’énergie, la Russie est prête à participer à la construction au Maroc de centrales électriques à gaz. En outre, la pêche, l’industrie et le tourisme représentent quant à eux des secteurs appelés à connaître également une hausse conséquente.

Toutes ces annonces sont toutefois éclipsées par celle de la création d’une zone de libre-échange entre la Russie et le Maroc d’ici un an au maximum.

En passant, les producteurs européens peuvent «remercier» une fois de plus leurs dirigeants: au moment où la Russie est arrivée à une autosuffisance complète sur plusieurs secteurs de l’industrie agroalimentaire, en augmentant au passage ses exportations, ne serait-ce qu’au niveau du blé, des pays non occidentaux renforcent sans complexe leurs positions sur ce grand marché qu’est la Russie.

Cela confirme une fois de plus ce que nous avons déjà annoncé à plusieurs reprises: les produits agroalimentaires de l’UE, actuellement bannis de Russie en raison des contre-sanctions, auront les plus grandes difficultés à revenir sur ce marché, si jamais ils y parviennent un jour.

N’est-ce pas l’Occident politique et médiatique qui annonçait en grande pompe de grands problèmes à venir pour l’économie russe après l’adoption de sanctions occidentales? Et qui est perdant au final? Les producteurs de l’UE n’ont jamais réussi à compenser leurs pertes se chiffrant en dizaines de milliards d’euros et en dizaines de milliers d’emplois perdus, ni même à trouver des marchés de remplacement.

La Russie, de son côté, a réussi non seulement à donner une chance unique à ses producteurs, mais aussi à diversifier très largement ses relations extérieures. Moscou aurait certainement dû lancer ce processus bien avant, comme l’a fait la Chine, et ne pas attendre les tensions avec l’Occident, mais mieux vaut tard que jamais.

Le processus suit son cours et il n’y aura certainement pas de retour en arrière. Aux élites européennes de réfléchir un minimum pour ne pas perdre leurs positions économiques encore existantes en Russie, leur rapportant des sommes plus que considérables, au risque de voir les pertes se multiplier de plusieurs fois. En ce qui concerne les pays africains, les exemples de pays comme l’Algérie, le Maroc, l’Afrique du Sud, l’Angola et certains autres encore démontrent qu’assumer sa souveraineté est tout à fait possible: non, il n’y a pas de peuples «élus» et «moins élus». Tous égaux. C’est cela la multipolarité.

Aux pays sous emprise encore des partisans de l’unipolarité d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201710131033444094-russie-occident-maghreb/

Mikhail Gamandiy-Egorov