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Le soutien international en faveur de la Russie augmente (étude britannique)

09.03.2023

Depuis le lancement de l’opération militaire spéciale, le soutien plus ou moins affiché à la Russie à divers endroits du monde grandit. Cela concerne également les pays adoptant une position neutre et qui refusent eux-aussi à se joindre à l’axe anti-russe promu par l’Occident. C’est ce qu’il ressort de l’analyse d’un célèbre cabinet britannique.

L’analyse de l’équipe globale de prévision de l’Economist Intelligence Unit (EIU), cabinet britannique appartenant à The Economist Group, qui offre des prévisions et des services de conseil à ses clients au niveau international, montre qu’un nombre croissant de pays se rangent aujourd’hui du côté de la Russie.

Ce que note ladite analyste occidentale, c’est que depuis l’année dernière la situation n’a pas beaucoup changé pour les pays occidentaux et pro-occidentaux. Un bloc qui selon EIU représente environ 36% de la population mondiale. Le nombre de pays neutres est quant à lui passé de 26 à 35 (représentant désormais près de 31% de la population mondiale). Les analystes du cabinet britannique indiquent que certains pays qui étaient précédemment alignés sur l’Occident, dont la Colombie, la Turquie et le Qatar – sont ainsi entrés dans cette catégorie de pays neutres, au moment où leurs gouvernements cherchent à tirer des avantages économiques dans le cadre de l’engagement avec les deux parties. Cependant, la Russie et la Chine font monter les enchères en «recrutant» selon les termes employés par l’étude occidentale les pays non-alignés et neutres, en leur faveur.

Ainsi, pour Agathe Demarais, directrice générale de la prévision chez EIU, «la Russie et la Chine courtisent les pays neutres non-alignés dans le but de semer le doute sur les effets des sanctions visant la Russie et de tirer parti du ressentiment contre les anciennes puissances coloniales. Nous pensons que les deux pays intensifieront ces efforts dans les années à venir, posant des défis croissants aux démocraties et à la diplomatie occidentales, qui n’ont pas encore saisi toute l’ampleur de ce défi».

Aussi, ladite étude mentionne que le plus grand changement de position a été parmi les pays qui penchent vers la Russie: leur nombre est passé de 25 à 36. La Chine reste le pays le plus important dans cette catégorie, mais d’autres pays en développement (notamment l’Afrique du Sud, le Mali et le Burkina Faso) ont également évolué dans ce groupe, qui représente 33% de la population mondiale. Ces tendances mettant en évidence l’influence croissante de la Russie en Afrique, indique EIU.

Maintenant intéressons-nous encore de plus près à cette étude. En effet, EIU a divisé les pays du monde en cinq groupes: ceux qui condamnent la Russie, ceux qui penchent vers l’Occident, les pays neutres, ceux qui penchent vers la Russie, et ceux qui apportent un soutien officiel et déclaré à la Russie. A notre niveau, rappelons également que nombre de régimes occidentaux avaient plusieurs fois martelé que ceux qui adoptent une position neutre sur le dossier ukrainien, apportent également un soutien à la Russie, car ne la condamnent pas et ne se joignent pas aux sanctions occidentales à l’encontre de Moscou.

En termes donc de poids économique sur le PIB mondial, les régimes qui condamnent la Russie représentent 60,1%, les pays penchant vers l’Occident – 7,8%, les pays neutres – 12%, les pays penchant vers la Russie – 16,8%, et ceux soutenant très ouvertement Moscou – 3,3%. Si l’on doit donc faire la somme des trois groupes qui ne font pas partie de la coalition occidentale anti-russe (soutiens déclarés à la Russie, penchant vers la Russie et neutres), nous obtenons un total de 32,1% du PIB mondial – correspondant plus ou moins au poids économique international actuel des puissances émergentes non-occidentales, notamment les BRICS.

Sur le plan démographique, EIU indique que les pays condamnant la Russie représentent 15,2% de la population mondiale, ceux penchant vers l’Occident – 20,7%, ceux adoptant la neutralité – 30,8%, ceux penchant vers la Russie – 27,8%, et ceux soutenant officiellement la Russie – 5,5%. Ce qui revient à dire que le pourcentage total de la population mondiale qui n’adhère pas à la coalition russophobe occidentale représente au total : 64,1% de la population terrestre.

Quant aux principales évolutions de positions des Etats depuis l’année dernière auxquelles fait également référence l’Economist Intelligence Unit, il s’agit des points suivants. La Colombie, la Turquie et le Qatar sont passés du statut penchant vers l’Occident à neutre. La Bolivie, l’Afrique du Sud et l’Ouganda – de la neutralité à penchant vers la Russie. L’Iran, le Mali et le Burkina Faso – de penchant vers la Russie à un soutien déclaré en faveur de Moscou. Le seul pays mentionné ayant évolué dans le sens contraire, en faveur donc des thèses occidentales, étant le Bangladesh – du statut neutre à penchant vers l’Occident.

Maintenant permettons-nous quelques commentaires. Tout d’abord, il est évident que le ton choisi par les analystes d’EIU est résolument amer. Constatant que cela représente un défi pour les prétendues démocraties occidentales. Comme si la notion même de démocratie était une propriété exclusive de l’Occident. Et comme si l’Occident, et plus particulièrement l’establishment otanesque, avait une quelconque légitimité à pouvoir ne serait-ce que mentionner le mot de démocratie.

D’autre part, ce qui est tout de même fort révélateur – c’est le fait qu’encore une fois le minimum d’objectivité et la constatation d’un certain nombre de faits ressortent plus souvent de l’axe anglo-étasunien, qui tout en étant de loin le principal adversaire à l’alliance sino-russe et plus généralement à l’axe de la multipolarité, possède une capacité d’analyse résolument meilleure que les régimes ayant totalement perdu leur indépendance en faveur justement de cet axe anglo-saxon, notamment l’Hexagone ou le régime allemand.

Enfin, il faut tout de même rappeler que ladite étude reste une étude occidentale, qui tout en admettant un certain nombre de faits devenus impossibles à faire voiler – «oublie» de prendre en compte le poids du soutien de nombreuses sociétés civiles en faveur de la Russie et de l’ordre multipolaire international, à divers endroits de la planète – y compris dans des pays qui restent sous la coupe occidentale. Et là, il est très fort probable que le soutien en faveur de la Russie, et donc de tous les partisans de la multipolarité, sera bien au-dessus des 64,1% de la population mondiale, comme le prétend l’EIU.

Mikhail Gamandiy-Egorov

Le Qatargate ou les nouvelles difficultés énergétiques pour l’UE

24.12.2022

Le scandale de corruption ayant ébranlé Bruxelles avec l’implication présumée du Qatar représente un défi supplémentaire sur le plan énergétique pour l’Union européenne, à l’heure où l’espace européiste n’a toujours aucune alternative digne de ce nom aux livraisons de gaz russe. Et si Washington tire son épingle du jeu des problèmes économiques et industriels européens, les responsables de l’UE ne font que s’enfoncer dans les dits problèmes, le tout sans aucune solution fiable.

«Qatargate: Doha menace de couper le gaz à des Européens encore trop dépendants» – titre le magazine hexagonal Marianne. En précisant que le Qatar n’avait pas attendu la fin de la Coupe du monde de football pour adresser un sérieux avertissement aux pays européens, dans le cas où l’UE prendrait des sanctions après la révélation du Qatargate. Tout en menaçant de lourdes conséquences sur la sécurité énergétique mondiale.

Pour rappel, l’émirat qatari a été largement courtisé par les représentants européistes tout au long des derniers mois, dans l’objectif à réduire la dépendance de l’UE au gaz russe, sans grand succès jusqu’à présent. Comme Observateur Continental l’avait noté précédemment, Doha est depuis longtemps spécialisé sur les marchés asiatiques, et si bien même qu’il augmenterait ses livraisons aux clients européens – ce serait alors sur la base de contrats signés sur le long-terme, option qui déplait fortement aux bureaucrates de l’Europe bruxelloise.

Cela sans oublier que le leadership qatari avait clairement fait entendre ne pas être en mesure de remplacer complètement et dans un avenir proche le gaz russe sur le marché européen. Tous ces faits mettant Doha en position de force indéniable.

D’autant plus et qu’au-delà du scandale de corruption éclaté à Bruxelles, le Qatar n’oublie certainement pas les diverses campagnes hostiles à son encontre, notamment avant et durant le déroulement de la principale compétition footballistique internationale, en provenance de l’Occident. Les appels au boycott, les tentatives agressives de nombre de pays occidentaux à promouvoir la propagande lgbtiste, en d’autres termes – l’arrogance si traditionnelle des régimes de l’Occident – restent fort certainement dans la mémoire des citoyens qataris, et de leurs représentants.

Tout cela se déroule au moment où les livraisons pétrolières et gazières russes, malgré toutes les sanctions occidentales à l’encontre de la Russie, continuent d’augmenter sur les grands marchés asiatiques comme ceux de la Chine et de l’Inde, ainsi que sur d’autres marchés non-occidentaux. Et le tout également au moment où le risque de désindustrialisation dans l’espace bruxellois est de plus en plus ouvertement abordé – y compris par les Européens eux-mêmes. Un processus qui semble d’ailleurs déjà suivre son cours, avec comme l’un des résultats – la délocalisation des industries européennes sur le sol étasunien. Pour le plus grand bonheur de Washington, chef incontesté de l’axe atlantiste nostalgique de l’unipolarité, et pour le plus grand malheur des industries basées en Europe, incapables d’être compétitives sans l’énergie russe. Un fait totalement évident aujourd’hui.

Pour revenir au Qatar, ses mises en garde à destination des responsables européistes représentent tout simplement l’option que l’UE a longtemps cherché elle-même. A force de pratiquer l’arrogance et l’ingratitude, et cela depuis de bien longues années et non pas seulement depuis quelques mois, le résultat était largement prévisible et attendu. Peut-être pas pour les bureaucrates bruxellois, bien souvent ne possédant pas les capacités intellectuelles et analytiques nécessaires, mais pour toute personne censée – indéniablement.

Et en ce sens le petit émirat qatari possède aujourd’hui tous les moyens de remettre à sa place le nain géopolitique nommé Union européenne. Et peut-être bientôt non plus seulement un nain géopolitique, mais également et de plus en plus économique. Car lorsqu’on ne possède pratiquement rien en termes de ressources stratégiques – il faut avoir un minimum de bon sens de savoir faire profil bas et avaler son arrogance.

Mikhail Gamandiy-Egorov

Les raisons de la dépendance gazière de l’UE

12.09.2022

Alors que l’Europe se retrouve face à une crise énergétique majeure, les responsables européistes oublient bien souvent de rappeler à leurs citoyens les raisons de la dépendance de l’UE vis-à-vis de la Russie. Une crise désormais accentuée par une politique largement hostile à l’encontre de Moscou et des sanctions qui frappent ouvertement leurs propres instigateurs. Retour sur la question.

Les discussions bruxelloises quant à la nécessité de diminuer la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie ne datent pas d’hier, ni de fin février dernier. C’est une rhétorique au contraire qui se répète tout au long des années. Pour autant et si jusqu’à maintenant l’Union européenne n’a jamais réussi à se passer du gaz russe, ce n’est certainement pas en raison d’un quelconque manque de volonté à le faire, mais bel et bien pour des raisons parfaitement pratiques, liées aux faits et statistiques.

Si l’on regarde les volumes d’exportation de gaz naturel par pays, il devient très rapidement évident qui en est le principal acteur au niveau mondial, en l’occurrence la Russie. Les Etats-Unis qui arrivent en deuxième position restent dans une posture qui ne peut permettre le remplacement du gaz en provenance de Russie, en raison de leur propre consommation interne très élevée. Devant même importer des volumes supplémentaires depuis le Canada voisin.

Cela sans oublier que dans le cas des besoins européens, les USA ne peuvent assurer les livraisons que via les fameux méthaniers – des méthaniers qui devront être produits en énorme quantité pour pouvoir réaliser les dites livraisons, et avec un prix final de vente qui sera largement supérieur à celui du gaz russe. De son côté le Qatar, autre acteur majeur gazier international, était longtemps orienté sur les marchés asiatiques. Et s’il devait augmenter considérablement ses livraisons à l’Europe, ce serait alors aux dépens de ces marchés stratégiques, tout en demandant aux acheteurs européens de se baser sur des contrats à long-terme, chose que les bureaucrates européistes n’en sont pas partisans.

Cela sans oublier que les marchés asiatiques traditionnels que le Qatar, très théoriquement pourrait laisser ou y réduire sa présence, seront immédiatement demandeurs de livraisons alternatives, étant de grands consommateurs et dont les besoins ne cessent de monter en puissance. Enfin, il serait bon de rappeler que Saad Sherida al-Kaabi, ministre de l’Energie du Qatar – avait clairement fait comprendre fin mars dernier quant à l’impossibilité de remplacer le gaz russe. En ce qui concerne la Norvège (quatrième exportateur mondial) – elle est déjà de-facto au maximum de ses capacités.

L’Algérie, qui représente 11% des importations européennes ne peut, de manière significative, augmenter les volumes d’exportations gazières à destination de l’UE. Quant aux discussions sur les éventuels gazoducs au départ du Nigéria (qui d’ailleurs ne fait même pas partie des 10 principaux exportateurs mondiaux) et devant traverser plusieurs pays africains – les volumes concernés seront insignifiants pour les besoins européistes, d’autant plus que la réalisation éventuelle même de tels gazoducs prendra encore des années. Et peut-être même de bien longues années.

Dans tous les cas et comme le reconnaissent même les experts occidentaux – il est tout simplement impossible de remplacer les 150 milliards de mètres cubes annuels acheminés de Russie en Europe par du gaz d’autres provenances.

Cela sans oublier qu’au-delà des désagréments de l’absence du gaz russe dans l’Europe bruxelloise qui seront ressentis par les citoyens des pays de l’UE, et qui d’ailleurs commencent déjà à se faire ressentir, c’est toute l’industrie européenne qui risque de subir les conséquences des décisions de ses représentants politiques. Car oui – tout le fameux mythe de la puissance industrielle occidentale oublie bien souvent de rappeler l’extrême dépendance vis-à-vis des matières premières des nations non-occidentales et sans lesquelles elle devra soit réduire considérablement sa production (et donc les exportations, ainsi que les revenus), soit devra tout simplement se retrouver à l’arrêt. Avec tout ce que cela implique, y compris pour des pays comme l’Allemagne – première économie de l’UE.

De manière générale, le choix ouvertement pro-washingtonien de l’Europe bruxelloise concerne bien évidemment les décideurs européens en question, ainsi que ceux ayant voté pour eux. Sauf qu’il est impossible de pouvoir rêver à mettre économiquement à genoux un pays qui permet à cette même Europe arrogante et ingrate de garder les foyers chauffés et les industries en activité, et parallèlement demander à ce que ledit pays continue à en assurer les approvisionnements. Désormais, il est évident qui risque si fortement de se retrouver à genoux.

Le summum de cette hypocrisie occidentale est d’autant plus flagrant que ces mêmes régimes atlantistes menacent aujourd’hui tout pays qui ose maintenir et augmenter son interaction économico-commerciale avec la Russie, en rappelant l’existence de sanctions unilatérales visant Moscou. Mais lorsqu’il s’agit d’obtenir de l’énergie pour soi-même, les représentants politiques qui commencent de plus en plus à rappeler des acteurs comiques de cirque, font preuve d’une capacité à outrepasser leurs propres sanctions et procédures bureaucratiques.

Non, il faut effectivement s’en tenir aux décisions prises et respecter le cahier des charges – aussi bien technique que celui lié aux sanctions adoptées. La partie russe soutient cette approche. Quant à la nécessité de se défaire de la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, pourquoi ne pas effectivement accélérer le processus dès cette période d’automne-hiver? Dans le monde contemporain, ce ne sont pas les acheteurs qui manquent.

Après tout ce n’est pas l’acheteur, qui annonce officiellement vouloir cesser les importations auprès du fournisseur traditionnel d’ici quelques années qui dictera la marche à suivre, mais bel et bien le fournisseur en question qui ne possède aucune clause l’obligeant à livrer exclusivement à des clients ingrats et souffrants de duplicité. Pour ne pas dire de schizophrénie. Bien qu’il soit nécessaire de souligner que les dossiers médicaux des représentants des régimes occidentaux ne représentent aucun intérêt digne de ce nom.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4230

L’Iran ouvert au dialogue avec ses voisins du golfe Persique

Téhéran se déclare prêt à des négociations avec les Etats voisins du golfe Persique en vue de résoudre les différends dans la région. La position iranienne est confortée par des efforts de nombre d’autres Etats souhaitant qu’un tel dialogue prenne place au plus vite.

Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Djavad Zarif a déclaré que « l’Iran était toujours prêt à renforcer le dialogue avec les pays de la région du golfe Persique, en soulignant que la région et sa sécurité appartiennent à toutes les nations régionales. Il a également noté que pour cette raison, l’Iran avait accepté la proposition du Qatar de faciliter les dites négociations pour pouvoir résoudre les différends régionaux.

En ce qui concerne justement l’appel de Doha, c’est à travers le chef de la diplomatie qatarie Cheikh Mohammed Abderrahmane Al-Thani qu’il a été proposé aux autres pays arabes du golfe Persique à tenir des discussions avec Téhéran. Toujours selon lui, « c’est aussi un désir d’autres pays du Conseil de coopération du Golfe » (composé du Qatar, de l’Arabie saoudite, du Bahreïn, des Emirats arabes unis, de l’Oman et du Koweït). Bien qu’il n’ait pas précisé les autres pays intéressés par un tel dialogue, il faudrait certainement penser entre autres au sultanat d’Oman qui au-delà d’entretenir des relations diplomatiques et économiques avec l’Iran, ne le considère pas comme étant une menace pour les Etats arabes du Golfe.

Les puissances internationales comme la Russie et la Chine, intéressées par une région stable et sécurisée, soutiennent un tel dialogue et plus généralement une normalisation des relations entre la puissance perse et les pays arabes du golfe Persique. A ce titre, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov lors de sa récente rencontre à Moscou avec son homologue saoudien avait fait un appel en ce sens. Auquel Riyad semble pour le moment réticent.

Parmi les raisons d’une telle réticence, plusieurs faits devraient être pris en compte. Tout d’abord, c’est effectivement l’Etat wahhabite qui s’était placé à la tête de la coalition arabe hostile à Téhéran. Mais au-delà des ambitions personnelles de l’establishment saoudien et de l’animosité qu’il puisse avoir en direction de l’Iran, il y a deux facteurs qui jouent dans le blocage de toute normalisation, même relative, entre Téhéran et Riyad. A savoir les USA et Israël.

Le dernier ne cache pas le fait qu’il voit en la République islamique le principal « danger » pour sa sécurité. Quant à Washington, il applique (et continuera certainement d’appliquer) une politique qui place Tel-Aviv non seulement comme une priorité dans sa politique au Proche-Orient, mais de façon générale sur l’arène internationale. Les récentes normalisations entre l’Etat sioniste et certains pays arabes sous la médiation washingtonienne le confirment d’ailleurs pleinement.

Le souci pour l’axe Washington-Tel-Aviv, c’est que le monde actuel n’est plus celui des années 1990, ni du début des années 2000. La preuve de cela, est qu’au-delà de la montée en force des puissances internationales reconnues comme telles, en premier lieu la Russie et la Chine, étant par ailleurs membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, une nation comme l’Iran – formant d’ailleurs un triumvirat avec les deux premiers cités, n’a probablement jamais eu autant d’influence sur la scène régionale et internationale dans son histoire contemporaine. Et ce malgré les innombrables pressions économico-politiques, agressions et intimidations la visant. Confirmant par la même occasion que le grand espace eurasien constitue le fer de lance du monde multipolaire actuel. Et qui d’ailleurs renforce chaque jour un peu plus l’idée que la vraie communauté internationale se trouve dans le camp eurasiatique.

Pour autant, il est pratiquement inconcevable que les représentants étasuniens et israéliens puissent s’adapter, de façon civilisée, à cette réalité mondiale. Et continueront sans aucun doute à défendre avec nostalgie le concept unipolaire définitivement révolu. Quant aux pays arabes qui restent des alliés de cet axe pro-unipolaire et néocolonial, il serait probablement légitime de poser la question s’ils ne seront tout simplement pas retardataires, avec tout ce que cela implique, vis-à-vis du train multipolaire roulant à grande allure.

Mikhail Gamandiy-Egorov

https://t.me/observateur_continental/798

Les tentatives de percée wahhabite en Afrique

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Alors que l’Afrique représente désormais un terrain majeur de concurrence géopolitique et géoéconomique pour les principales puissances internationales, en premier lieu les pays occidentaux et la Chine, sans oublier le retour désormais confirmé de la Russie, il n’empêche que plusieurs autres Etats, principalement des puissances régionales, confirment leur grand intérêt pour ce continent. Y compris dans la propagation d’une idéologie radicale.

Au-delà des acteurs cités ci-haut, le continent représente un terrain propice pour plusieurs autres pays : Inde, Brésil, Turquie, Japon, Corée du Sud, Emirats arabes unis, Iran ou encore l’Arabie saoudite. Cette dernière, bien que ne faisant pas partie des principaux partenaires économico-commerciaux d’Afrique, ne frémit pas dans ses tentatives d’étendre maximalement son influence, principalement au sein des pays d’Afrique subsaharienne possédant des populations majoritairement musulmanes, ou d’importantes minorités.

A la base le concept est tout à fait normal, sachant que la tradition de collaborer entre pays musulmans, y compris appartenant à des régions et continents différents, reste une pratique répandue, et ce pour de nombreux pays. Plusieurs d’entre eux exercent d’ailleurs aujourd’hui une influence au-delà de leurs frontières : que ce soit la Turquie, le Maroc, l’Egypte, l’Iran, ou encore le Qatar et les Emirats arabes unis – ces deux derniers devenus très actifs depuis les dernières années grâce aux énormes capacités d’investissement, et souvent dans une optique de confrontation idéologico-politique qui les oppose. Le cas saoudien, lui, reste tout de même un cas particulier. Et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, il serait juste de rappeler que les tentatives de répandre son influence, notamment via son idéologie wahhabite, remonte déjà aux années 1960, et ce dans le but de contrer aussi bien l’idéologie panarabe nationaliste, que des courants modérés ou encore dits « réformistes ». Cette offensive va en outre dépasser les frontières du monde arabe, pour s’étendre jusqu’à l’Afghanistan, où durant la guerre de 1979-1989 l’idéologie wahhabite s’est radicalement confrontée à l’URSS et à ses alliés progressistes afghans, le tout en alliance avec Washington.

« L’exportation » wahhabite ne s’est d’ailleurs pas limitée à la seule période de guerre froide. La Russie post-soviétique en sait quelque chose. A ce titre, les prédicateurs wahhabites furent très actifs durant les deux guerres en Tchétchénie, durant lesquelles leur objectif était clair et radical : imposer aux populations musulmanes russes une vision de l’islam qui ne correspondait aucunement aux valeurs et traditions de celles-ci. Dans le cas russe et bien vite, les antagonismes monteront entre les musulmans tchétchènes d’un côté, y compris ceux qui avaient au départ soutenu l’option séparatiste vis-à-vis de la Russie, et les « prédicateurs » golfistes non invités avec leurs adeptes de l’autre.

Au final, les extrémistes wahhabites ne réussiront pas à mettre à bien leurs projets en terre russe et seront anéantis dans le cadre de la lutte antiterroriste, conduite aussi bien par les forces spéciales fédérales, que les unités tchétchènes, sans oublier la mobilisation populaire, comme celle de la République fédérée russe du Daguestan en 1999.

Pour autant, les tentatives de poursuivre l’exportation wahhabite n’ont jamais vraiment cessé de la part de l’Arabie saoudite. Si dans la crise syrienne et à l’instar des autres forces ayant souhaité détruire la République arabe, le projet est tombé à l’eau, et que dans les pays d’Afrique du Nord ces projets ont peu de chance, malgré les tentatives, d’aboutir connaissant un fort attachement de la plupart des pays concernés à un islam traditionnel, conforme aux traditions des nations concernées et possédant une capacité souveraine de défense (hors la Libye version actuelle), le cas de l’Afrique subsaharienne diffère.

En effet, les nombreux pays du sud du Sahara confrontés à des problèmes d’instabilité et d’insécurité, restent des terrains propices à la propagation d’idéologies extrémistes, parmi lesquelles le wahhabisme et le salafisme occupent une place de « choix ». Dans la zone de mire : les pays du Sahel, qui sont confrontés à de nombreuses cellules terroristes, ces dernières idéologiquement proches de la vision wahhabite. Et le danger ne cesse de croitre.

Le danger est d’autant plus visible que les pays africains s’appuient eux-aussi sur un islam traditionnel, pour beaucoup d’ailleurs sur la tradition soufie, et en conformité avec les traditions ancestrales des peuples concernés. En ce sens la situation rappelle fortement celle du Caucase russe des années 1990, où une vision extrémiste et étrangère ait tenté d’imposer aux populations locales une idéologie radicale et qui ne pouvaient être acceptée par la très grande majorité des musulmans de Russie.

Si en Russie comme en Syrie, ces projets ont échoué, l’Afrique subsaharienne doit faire face à de nombreux autres défis qui l’empêchent de contrer efficacement une idéologie extrémiste et étrangère aux traditions africaines. Et parmi ces défis, on retrouve la question de la souveraineté nationale, sans laquelle il sera toujours très compliqué, voire impossible, de pouvoir assurer une défense efficace face aux menaces extrémistes et terroristes. A ce titre, la situation au Mali en est d’ailleurs très révélatrice. Du moment que la pleine souveraineté est obtenue, il est alors possible de choisir les partenaires pouvant proposer une collaboration efficace, notamment sur le plan sécuritaire, tout en respectant la souveraineté du pays concerné. Et tant que cette étape ne sera pas franchie, les pays concernés resteront vraisemblablement sous la menace extrémiste, mettant en danger non seulement la vie des populations, mais aussi leurs traditions et valeurs ancestrales.

Quant à l’implication de l’Etat saoudien dans la propagation de l’idéologie wahhabite, bien que les autorités de Riyad aiment rappeler à chaque occasion leur opposition au terrorisme et à l’extrémisme, le fait est que de nombreuses structures d’obédience wahhabite et liées à des prédicateurs saoudiens, poursuivent leurs activités à l’international, avec vraisemblablement l’accord tacite du leadership de ce pays. Le tout sans oublier, que de nombreux partisans de cette idéologie se trouvent également au-delà des frontières saoudiennes, notamment chez le voisin devenu concurrent – le Qatar, lui aussi ayant de grandes ambitions sur l’arène internationale. Des ambitions dans lesquelles l’Afrique ne fait pas exception.

Mikhail Gamandiy-Egorov

http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=1200

Le fossé se creuse entre Ankara et Washington

Ankara

La Turquie et les États-Unis font partie d’un bloc militaire commun, mais dans lequel les USA s’estiment être le chef absolu. Aussi, quand Ankara assume de plus en plus sa souveraineté, les divergences se concrétisent rapidement: Syrie, Qatar, sanctions antirusses, les pommes de discorde s’accumulent.

Officiellement, les États-Unis et la Turquie demeurent alliés dans le cadre de l’OTAN. Pourtant, la Turquie confirme une fois de plus qu’elle est à ce jour probablement le seul pays membre de l’alliance nord-atlantique à mener une politique globalement indépendante. Du moins certainement plus que tous les pays Ouest et Est-européens.

Quelques rappels s’imposent: tout d’abord, la Turquie a été le seul pays membre de l’OTAN à ne pas s’être joint aux sanctions contre la Russie voulues par Washington et largement suivies par les capitales de l’Europe bruxelloise. Un manque de «solidarité» clairement mal vu par le bloc occidental. Et malgré une crise majeure dans ses relations avec Moscou, qui a duré de novembre 2015 à juin 2016, Ankara a fait le premier pas vers la réconciliation et un retour à son partenariat stratégique avec la Russie. Mais ce n’est pas tout. Parallèlement au renforcement de ses liens avec la Russie, la Turquie a connu une vive détérioration de ses relations avec plusieurs pays de l’UE, notamment l’Allemagne.

Mieux encore, la Russie et la Turquie, en coordination avec l’Iran, ont joué un rôle clé dans le cessez-le-feu observé en Syrie depuis fin décembre 2016 et qui reste globalement respecté à ce jour. D’ailleurs, plusieurs groupes armés soutenus par la Turquie continuent à se joindre audit cessez-le-feu, ce qui permet à l’armée gouvernementale syrienne de poursuivre son offensive dans le désert de Syrie en vue d’anéantir une bonne fois pour toutes la secte Daech sur le sol syrien.

Par ailleurs et selon les informations toutes récentes émanant de hauts responsables syriens, plusieurs groupes dits de «l’opposition» syrienne, soutenue par la Turquie, se disent prêts à combattre l’autre secte takfiriste —Al-Qaida- en coordination avec Damas et Moscou. En d’autres termes, ils ont compris qu’ils ne pourront pas réaliser leur projet initial, à savoir faire tomber Bachar al-Assad et que la meilleure solution pour eux est donc d’initier un réel dialogue avec le pouvoir légitime syrien afin de pouvoir prétendre à son amnistie.

Revenons aux tensions de plus en plus évidentes de la Turquie avec les pays occidentaux. Elles ne se limitent désormais plus aux seuls pays ouest-européens et aux échanges de critiques virulentes, entorses aux droits de l’homme contre ingérence dans la politique intérieure turque. C’est désormais avec Washington que les relations se dégradent franchement. En effet, et depuis l’important soutien annoncé par les États-Unis aux groupes kurdes notamment les FDS opérant en Syrie, Ankara ne cache pas son inquiétude, voire son énervement. En effet et tout récemment, l’agence Anadolu —l’une des deux principales agences de presses turques- a publié les informations sur la localisation des forces spéciales américaines et françaises en Syrie. Washington s’est dit inquiet sur ces fuites qui selon lui «peuvent menacer les forces américaines». Fait qui confirme les désaccords de plus en plus évidents entre les deux pays, membres-clés de l’OTAN.

Sur le Qatar aussi, les positions semblent diverger. Si Washington semble privilégier son allié saoudien, Ankara (et Téhéran…) a pris fait et cause pour Doha dans la crise qui oppose cette dernière à plusieurs pays arabes, principalement l’Arabie Saoudite. Au point d’augmenter considérablement le contingent militaire turc présent au Qatar, le faisant passer de 150 à près de 3.000 soldats aux toutes dernières nouvelles.

Cela ne signifie pas pour autant que la Turquie quittera le navire de l’OTAN du jour au lendemain. Le pouvoir turc joue sur les contradictions entre ses partenaires pour servir ses intérêts nationaux. Une chose est sûre: vu le nombre de projets en cours et à venir avec la Russie, dans le domaine économico-commercial et même militaire, Ankara ne semble plus vouloir de tensions avec Moscou. Si au départ de la crise syrienne, la Turquie voulait absolument la chute du gouvernement syrien, depuis la normalisation des relations russo-turques et le retour au partenariat stratégique entre les deux pays, Ankara a beaucoup modéré sa position envers Damas, tout en coordonnant de plus en plus ses intérêts avec la Russie et l’Iran. Fait d’ailleurs reconnu avec inquiétude par plusieurs médias centraux.

Par ailleurs, la Turquie ne se fait pratiquement plus d’illusions quant à un éventuel avenir au sein de l’Union européenne, dans lequel d’ailleurs elle aurait certainement plus à perdre qu’à gagner. Enfin, ses relations avec «l’allié» étasunien deviennent de plus en plus compliquées. Reste évidemment la carte eurasiatique, de plus en plus soutenue par les citoyens de Turquie. Au pouvoir turc de bien l’utiliser. Pour quel résultat? Seul le temps nous le dira.

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201707211032312993-usa-turquie/

Mikhail Gamandiy-Egorov

La crise du Qatar et ses enjeux régionaux

Doha, Qatar

Les meilleurs amis d’hier deviennent du jour au lendemain des ennemis. Les principaux sponsors de plusieurs groupes terroristes et grands amis des Etats-Unis s’accusent mutuellement. Que se passe-t-il vraiment entre le Qatar et l’Arabie saoudite ?

La dispute saoudo-qatarie n’en finit pas de faire du bruit. En effet, les principaux donateurs financiers de plusieurs groupes terroristes, opérant notamment en Syrie, et satellites déclarés de la politique étasunienne au Moyen-Orient, en sont arrivés à une crise sans précédent, allant jusqu’à la rupture diplomatique et à un blocus commercial.

Pour beaucoup, l’effet de surprise fut effectivement grand à l’annonce de l’Arabie saoudite et de plusieurs autres pays arabes de rompre les liens diplomatiques avec Doha, l’accusant d’être un soutien du terrorisme et de participer à des déstabilisations diverses. Ainsi, le 5 juin dernier, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, le Bahreïn et l’Egypte ont annoncé la rupture des relations diplomatiques avec le Qatar. Ils seront rapidement rejoints par une partie de la Libye (gouvernement d’al-Beïda contrôlant l’est du pays) et une partie du Yémen (gouvernement de Hadi contrôlant une partie du centre et l’est du pays). Ce ne sera pas tout: les Maldives, la Mauritanie, les Comores ont eux aussi annoncédans la foulée la rupture de leurs relations avec Doha. Le Djibouti et la Jordanie ont abaissé le niveau des relations diplomatiques, tandis que le Sénégal, le Niger et le Tchad ont rappelé leurs ambassadeurs.

Ce faisant, on parle d’une des plus sérieuses crises dans le monde musulman sunnite. Tout en sachant qu’il est très difficile de considérer les Saoudiens comme membres du clergé sunnite, étant wahhabites. Mais ceci est une autre histoire. En outre, la crise entre le clan wahhabite (saoudien) et les Frères musulmans (qatari) est également mentionnée comme l’une des raisons à cette dispute. Parallèlement à ces événements, la Turquie, considérée à juste titre comme l’une des principales puissances du monde musulman sunnite, prend fait et cause pour le Qatar en critiquant ouvertement la ligne menée par les initiateurs de la crise à l’égard de Doha. En outre, la Turquie assure désormais d’importantes livraisons alimentaires à l’émirat qui fait face au blocus des livraisons décidé par Riyad et Abu Dhabi. L’Iran, grande puissance régionale et leader admis du monde musulman chiite, a profité lui aussi de la détérioration « fraternelle » saoudo-qatarie pour offrir son soutien au Qatar, à travers des livraisons alimentaires.

En parlant justement de l’Iran, considéré comme l’une des causes des manœuvres punitives des Saoudiens en direction des Qataris (ces derniers étant accusés de privilégier un rapprochement avec la République islamique), il en sort évidement gagnant et renforcé. Rappelons à ce titre toutes les tentatives, le plus souvent vaines, de Riyad d’isoler Téhéran au sein du monde musulman. Pour autant, non seulement ces tentatives n’ont pas apporté au leadership saoudien (et bien sûr américain) le résultat escompté, mais au contraire le rôle prédominant de l’Iran ne cesse d’augmenter dans les affaires régionales, que ce soit en Syrie, au Yémen ou dans le cadre du processus d’Astana (en coordination avec la Russie et la Turquie). De plus, cette main tendue de Téhéran envers Doha a sérieusement renforcé les sentiments pro-iraniens à l’intérieur même du Qatar.

Du côté de la Russie, la position est plus nuancée. Moscou n’ayant pas pris fait et cause pour l’un des deux groupes de belligérants, en appelant uniquement au dialogue et en maintenant le contact avec toutes les parties du « conflit ». En ce sens, le chef de la diplomatie qatarie s’est même rendu en visite à Moscou il y a quelques jours. La position russe diffère en ce sens considérablement des Etats-Unis, qui vraisemblablement ont donné le feu vert à Riyad pour ses actions anti-qataries, tout en se gardant de prendre des mesures radicales vis-à-vis de Doha — sachant que la plus grande base US du Moyen-Orient se trouve précisément au Qatar.

Dans ce casse-tête évident pour certains, le tableau est grosso modo le suivant. La Turquie confirme qu’elle souhaite jouer sa propre politique, tout en étant un membre clé de l’OTAN (et donc « allié » des USA). L’Iran renforce ses cartes sur la scène régionale en donnant un camouflet supplémentaire à l’Arabie saoudite, et en jouant sur les dissensions entre les alliés d’hier. Enfin, la Russie se positionne clairement comme un médiateur d’envergure globale, confortant ainsi sa position retrouvée en tant que l’une des principales puissances mondiales, dont la politique ne cesse de monter en popularité dans pratiquement tout le monde musulman. Le Moyen-Orient n’étant pas une exception, tout au contraire.

Quant aux accusations lancées par les pays arabes déjà cités en direction du Qatar, qu’y a-t-il de nouveau par rapport à ce que l’on disait déjà ces derniers mois et années? Rien. Oui, le Qatar faisait jusqu’à maintenant partie des principaux sponsors des terroristes à divers endroits, en premier lieu en Syrie. Nous l’avons dit et répété. Mais les Saoudiens sont-ils bien placés pour accuser leurs cousins de terrorisme, sachant qu’ils font clairement partie de la catégorie « supérieure » des sponsors du terrorisme, notamment sur le territoire syrien? C’est évidemment l’hôpital qui se fout de la charité. D’ailleurs, l’un des rares pays de cette « coalition » anti-qatarie qui a une réelle légitimité à accuser Doha de soutien au terrorisme, c’est bel et bien l’Egypte, clairement visé par le danger takfiriste, notamment sa minorité chrétienne. Et compte tenu des relations positives entre les leaderships russe et égyptien, et une approche beaucoup plus responsable envers le conflit syrien de la part du Caire, il est clair que la Russie n’a pas vraiment intérêt à prendre position en faveur du Qatar. Parallèlement à cela, il est également clair qu’il n’y a absolument aucune raison de prendre position en faveur de l’Etat wahhabite — l’un des principaux satellites étasuniens, l’un des principaux sponsors des groupes terroristes en Syrie, fermement opposé à Assad et à l’Iran (alliés de la Russie).

Ce qui signifie une chose relativement simple. La Russie va devoir poursuivre ses efforts diplomatiques et ses manœuvres afin de maintenir un équilibre dans cette équation (ce que la Russie sait bien faire), tout en pensant évidemment à ses intérêts nationaux, et à ceux de ses alliés. Tout dépendra maintenant aussi de la nouvelle approche qatarie (si elle a lieu). Notamment en direction de la Syrie. Si Doha cesse son soutien massif aux groupes djihadistes en Syrie, ce sera indéniablement un pas fortement positif, en premier lieu pour la Syrie elle-même. Et si cela devait arriver, on pourrait alors entrevoir un rapprochement. D’autre part, le fait que l’Iran renforce ses positions sur la scène régionale ne peut qu’être salué, y compris dans ce dossier. C’est d’ailleurs l’une des raisons de l’inquiétude qui règne à Riyad, Abu Dhabi et évidemment Washington. A ce titre, le leadership saoudien commence déjà à atténuer sa rhétorique anti-qatarie en parlant même de l’éventualité de lever le blocus. Les cousins feront-ils alors la « paix » sous la pression de Washington? Ou la crise montera-t-elle d’un cran? Il conviendra de suivre la situation. Une chose est néanmoins certaine: cette dissension saoudo-qatarie renforce l’axe de la résistance. Et last but not least, l’une des raisons principales de cette dispute Riyad-Doha est évidemment à rechercher dans les victoires de l’armée gouvernementale syrienne et de ses alliés sur le théâtre syrien. Et quand on a déversé des sommes colossales pour réaliser un scénario écrit (faire tomber Assad) et qu’il tombe à l’eau, il arrive souvent que des accusations réciproques entredéchirent une « famille ». Surtout que le grand maître, j’ai nommé les Etats-Unis, est loin d’être ravi de la situation lui aussi. A suivre donc…

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201706151031851854-qatar-crise-enjeux/

Mikhail Gamandiy-Egorov

Politique israélienne en Syrie, les masques tombent

F-15 E israélien. Archive photo

La Syrie est le théâtre d’affrontement d’envergure pratiquement mondiale, du fait de l’internationale terroriste présente sur le territoire, mais aussi en raison de la participation de pays hostiles à la République syrienne. Parmi eux, les récents événements ont mis en lumière le rôle d’Israël.

Si aujourd’hui, ce n’est un secret pour personne que des pays comme les USA, l’Arabie saoudite, le Qatar ou encore plusieurs États ouest-européens ont largement et ouvertement contribué au chaos en Syrie, le cas d’Israël était à part. D’un côté, l’État hébreu se déclarait « neutre » dans le conflit syrien, mais ses actions ont plusieurs fois démontré le contraire. La dernière en date a été la goutte qui a fait déborder le vase.

En effet, l’aviation israélienne a mené plusieurs frappes en Syrie au cours de ces dernières années. À chaque fois, elles visaient les positions de l’armée gouvernementale syrienne ainsi que ses alliés, dont le Hezbollah libanais — l’os dans la gorge de l’État israélien depuis déjà bien longtemps. Qu’en est-il des groupes terroristes, dont Daech ou Al-Qaida? Réponse: ils n’ont jamais été visés par les avions israéliens.

En septembre dernier, lors de l’offensive de l’armée syrienne contre les terroristes takfiristes du Front Al-Nosra (devenu par la suite Front Fatah al-Cham et plus récemment encore Hayat Tahrir al-Cham) dans le sud de la Syrie, aux environs de Kouneitra, l’armée israélienne avait une fois de plus attaqué les positions des forces gouvernementales. Si les précédentes attaques israéliennes n’avaient pratiquement pas généré de riposte côté syrien, ce ne sera pas le cas de celle-ci. Un avion et un drone israéliens seront abattus, selon les informations de l’état-major syrien. Israël niera les faits.

17 mars. Alors que l’armée syrienne et les milices progouvernementales poursuivent l’offensive contre Daech à l’est de Palmyre, l’aviation israélienne frappe une nouvelle fois les troupes syriennes. La DCA syrienne riposte et affirme avoir abattu un avion et en avoir touché un autre. Israël nie dans un premier temps les faits, comme il l’avait fait au mois de septembre. Mais la réaction qui s’en suit deux jours plus tard d’Avigdor Lieberman, le ministre israélien de la Défense semble confirmer la version syrienne. En effet, il annonce que si la DCA syrienne riposte de nouveau contre l’aviation israélienne, l’État sioniste « détruira » les systèmes de défense antiaérienne de Syrie.

De l’aveu des médias, y compris mainstream, il s’agit du plus sérieux incident entre les deux pays depuis le début de la crise syrienne. Incident suffisamment sérieux en tout cas pour que le ministère russe des Affaires étrangères convoque ce lundi 20 mars l’ambassadeur israélien en poste à Moscou, afin de lui transmettre l’opposition de la Russie face aux actions israéliennes à l’encontre de la Syrie.

Plus gênant presque que le bombardement en lui-même, ce sont les justifications israéliennes qui ne tiennent tout simplement pas. Tel-Aviv a en effet indiqué que les frappes visaient à empêcher un transfert d’armes au Hezbollah libanais, alors que l’attaque a ouvertement visé les forces syriennes aux alentours de Palmyre, là où l’armée gouvernementale fait face à Daech. Bien difficile désormais de parler du manque de complicité entre Israël et les groupes terroristes, d’autant plus que selon divers témoignages, de nombreux terroristes, notamment ceux opérant dans le Sud du territoire syrien, se font soigner dans les hôpitaux israéliens.

Au-delà du conflit syrien, et dans lequel les forces gouvernementales soutenues par les alliés prennent de plus en plus le dessus sur les groupes terroristes, Israël a vraisemblablement très peur du rééquilibrage des forces dans la région issu de l’ère multipolaire. En effet faut-il rappeler que l’État sioniste faisait partie des grands bénéficiaires de la chute de l’URSS et de la fin officielle de la guerre froide?

L’avènement de l’ère unipolaire, avec le diktat de la seule superpuissance étasunienne, l’allié par excellence d’Israël, avait donné à ce dernier un sentiment de quasi-impunité aussi bien dans le conflit qui l’oppose à la Palestine, qu’à plusieurs de ses voisins. La guerre perdue en 2006 face au Hezbollah libanais, qui combat aujourd’hui aux côtés de l’armée syrienne les terroristes takfiristes, a été l’un des premiers signes remettant en cause « l’invincibilité » régionale d’Israël.

Puis le renforcement de l’Iran, partisan lui de la multipolarité et ennemi de longue date, a ravivé les craintes de Tel-Aviv. Enfin, le positionnement de la Russie en faveur de son allié syrien dans la lutte antiterroriste a complètement reconfiguré les perspectives proche et moyen-orientales. En effet et selon plusieurs hauts cadres de Tsahal, la présence russe en Syrie a totalement mis à mal la domination aérienne d’Israël dans la région. Pour rappel, les systèmes de défense antiaérienne et antimissiles russes S-300 et S-400 se trouvent sur le territoire syrien, mais à ce jour, ils n’ont pas été utilisés. Cependant, la DCA syrienne a riposté au raid israélien avec ses vieux systèmes S-200 et il est peu probable que Tel-Aviv souhaite que les systèmes russes plus sophistiqués soient utilisés contre son aviation. D’où l’importance de l’empêcher par des canaux diplomatiques. Cela a été fait ce lundi.

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201703201030536992-isael-syrie-politique/

Mikhail Gamandiy-Egorov

Ayrault & Co. ou la vassalisation désormais totale de la France

Situation en Syrie

Le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault a récemment appelé la Russie et l’Iran «à faire preuve de responsabilité» en Syrie. Dans le cas contraire et toujours selon le «brave» monsieur, les deux pays «seront complices des crimes de guerre commis à Alep».

Un « commentaire » pas si étonnant que cela lorsqu’on connait l’état des lieux des élites françaises actuelles et lorsqu’on se souvient aussi des déclarations inacceptables d’autres responsables français : un certain Manuel Valls qui traitait le président syrien Bachar al-Assad de « boucher » ou l’ex-ministre des Affaires étrangères Fabius qui avait déclaré « qu’Assad ne méritait pas de vivre sur Terre » et que le Front al-Nosra (désormais Front Fatah al-Cham, filiale d’Al-Qaïda en Syrie) « faisait du bon boulot ». Sauf que désormais cette fois-ci l’attaque des mots du ministre Ayrault vise ouvertement deux pays, alliés de la Syrie, en la qualité de l’Iran et de la Russie.

Sans trop s’attarder même sur ce énième exemple de la vassalisation pure et simple des élites françaises à celles de Washington, il serait certainement bon de rappeler l’opinion du président syrien à ce sujet, dans une interview qu’il avait accordé à la chaine TV France 2, en avril 2015 en répondant justement au fait d’avoir été traité de « boucher » par Valls, Premier ministre français : « Je vais être franc avec vous. Personne ne prend plus au sérieux les déclarations des responsables français. Pour une simple raison : c’est que la France est devenue un satellite de la politique étasunienne dans la région. Elle n’est pas indépendante, et n’a aucun poids. Elle n’a plus aucune crédibilité ». Difficile, même très difficile, de dire mieux ou d’y ajouter quelque chose.

En Russie, mes compatriotes me posent parfois la question du pourquoi de cette soumission des responsables politiques français (si ce n’étaient que les responsables politiques), aux ordres émis depuis l’outre-Atlantique, sachant qu’ils vont bien souvent à l’inverse des intérêts du peuple français, ou en tout cas d’une large partie des citoyens de France. Ma réponse est relativement simple : car ils sont vendus. Un rôle de conférencier-animateur payé des dizaines, voire des centaines de milliers d’euros aux USA par différentes fondations « démocratiques » étasuniennes, dont celles de Soros, est certainement plus motivant pour ces « responsables » que celui d’être des leaders défendant les intérêts du peuple français. Plus que cela, les élites françaises d’aujourd’hui sont aussi bien vendues aux différentes fondations US, qu’aux pétrodollars wahhabites saoudiens ou qataris.

En parlant justement des alliés golfistes de la France actuelle, a-t-on entendu ne serait-ce qu’une fois de la part de ce même Ayrault ou d’un autre condamner les bombardements aveugles saoudiens contre les civils du Yémen ? Des bombardements qui tuent hommes, femmes et enfants quotidiennement. Jamais. Ils préfèrent bien sûr s’attaquer au leadership syrien, ainsi qu’à la Russie et l’Iran, les seuls pays qui luttent réellement et sans figuration contre le terrorisme takfiriste dans cette région. Le tout pour la simple et bonne raison de l’hystérie montante en flèche côté Washington, Riyad et Doha, avec les suiveurs de Londres et Paris, n’arrivant toujours à réaliser leur seul et unique objectif en Syrie : faire tomber le président Bachar al-Assad. Et malgré les dizaines de milliards investis à cette fin, toujours rien. Damas, Moscou et Téhéran ne cèdent pas.

On me pose aussi parfois la question du pourquoi la Russie et l’Iran ont plus de facilité à trouver un langage commun avec Erdogan, le très controversé président turc, qu’avec les représentants des élites de l’Occident, dont de la France. La réponse est également relativement simple : malgré toute la contradiction de la politique turque aux cours de ces dernières années et des actions souvent criminelles du leadership turc qui avait largement contribué au chaos en Syrie, Erdogan reste un politicien attaché à son peuple. Avec sa vision des choses, souvent erronée, mais une chose est sûre, il ne se prépare pas au rôle de conférencier de figuration pour le compte de Washington. A l’énorme différence des Ayrault & Co. Et parler avec des leaders même controversés mais souverains de leurs décisions est malgré tout plus facile qu’avec des marionnettes.

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201609281027955336-ayrault-france-russie-iran/

https://fr.sputniknews.com/authors/mikhail_gamandiy_egorov/

Les alliés étasuniens se bousculent en Russie

Premier ministre japonais Shinzo Abe et le président russe Vladimir Poutine

J’ose espérer que personne ne remettra en doute le fait que des pays comme le Qatar et le Japon soient des alliés confirmés des USA ?

Plus que cela, il s’agit de pays coordonnant activement leurs actions avec Washington, voire appliquant souvent les désirs de ce dernier. Mais le temps actuel les pousse vraisemblablement à commencer à chercher ailleurs.

Il y a quelques jours le ministre qatari des Affaires étrangères Mohammed bin Jassim al-Thani et le premier ministre japonais Shinzo Abe ont tous deux débarqué le même jour en Russie pour rencontrer le président Vladimir Poutine. Dans le cas qatari il était surtout question de Syrie et notamment du processus de paix (certains experts ont également supposé que les discussions ont touché le thème du marché pétrolier mais ce ne fut pas confirmé). Le développement des relations bilatérales était également à l’ordre du jour. En outre, le chef de la diplomatie qatarie a proposé d’organiser en 2018 l’année de la Russie au Qatar et du Qatar en Russie. 

Il est connu que le Qatar est responsable de soutien de plusieurs groupes armés terroristes en Syrie, notamment d’obédience takfiriste. Mais depuis les revers de ces derniers et les succès enregistrés par l’armée arabe syrienne sur différents axes du pays avec le soutien de ses alliés, le Qatar commence-t-il à réaliser que ses énormes investissements dans le but d’en finir avec le président syrien ne mèneront au final à rien et que donc il faut chercher le meilleur moyen de sortie du bourbier auquel il a grandement contribué? Pas certain mais affaire à suivre.

Dans le cas du premier ministre du Japon, les discussions ont porté sur les questions territoriales, thème traditionnel dans les pourparlers russo-japonais. Mais Abe est également arrivé avec toute une liste de mesures que le Japon compte proposer pour relancer le partenariat économique russo-nippon. Ce qui d’ailleurs n’a pas manqué de lui faire subir de grandes critiques de la part des autres membres du G7, USA bien évidemment en tête. A en croire d’ailleurs l’agence de presse japonaise Kyodo, le président US sortant Barack Obama aurait « déconseillé » à Abe de se rendre en Russie estimant qu’il ne s’agissait pas « du bon moment ». Mais Abe a pris la décision souveraine d’y aller quand même. 

Il ne faudra d’ailleurs pas s’étonner que les grands médias du mainstream, anglophones comme francophones, s’attaques ardemment sous peu à la personnalité d’Abe, ayant osé saper « l’unité » atlantiste. Pour rappel, le Japon s’est lui aussi joint aux sanctions occidentales contre la Russie après le ralliement de la Crimée à la mère patrie, mais cherche depuis tous les moyens d’en sortir connaissant les énormes intérêts économiques du Japon en Russie et voyant notamment comment en profite son voisin sud-coréen qui a refusé de se joindre aux sanctions anti-russes et ce malgré la grande pression exercée une fois encore depuis Washington. Mais Séoul n’ayant pas cédé.

Il est certain que ni le Qatar, ni le Japon ne sont pas des alliés de la Russie. Pas même des partenaires stratégiques, plutôt le contraire, connaissant le rôle fortement néfaste du Qatar en Syrie, à l’instar de l’Arabie saoudite, de la Turquie, des pays occidentaux et de l’Etat sioniste. Le Japon bien qu’étant un important partenaire économique, reste lui aussi encore dans le camp opposé. Pour longtemps? Cela est une autre question.

En tout cas et depuis que la Russie a prouvé une fois de plus au monde que personne ne pourra jamais la subordonner et depuis la favorisation fortement positive de ses relations extérieures avec pas moins des ¾ de l’humanité (Eurasie, pays BRICS, Asie, Afrique, Amérique latine), les adversaires commencent un à un à faire marche arrière. Et n’hésitent plus à saper leur propre « unité » imposée depuis les USA. Après évidemment cela fait bien sourire lorsque des Clinton ou Obama parlent d’une « Russie isolée » et qu’au même moment les principaux alliés des USA (bien que représentant une minorité dans le cadre de l’humanité toute entière) se bousculent pour venir dans cette même Russie. Ah, que le monde a changé en une quinzaine d’années!