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Le Zimbabwe, un exemple pour l’Afrique subsaharienne francophone?

Zimbabwe

Le Zimbabwe confirme une fois de plus sa maturité politique de nation au bagage révolutionnaire et résistant et qui va de l’avant. Il vient en effet de réussir une transition de pouvoir sans effusion de sang et sans ingérence extérieure. Une maturité dont pourrait s’inspirer un certain nombre de pays du continent africain.

Après quelques jours de suspens, c’est confirmé: le charismatique et légendaire Président zimbabwéen Robert Mugabe, héros national, a choisi de démissionner de son poste présidentiel. Bien qu’il soit honni par l’establishment occidental, les titres des médias mainstream sont loin d’être enthousiastes sur l’avenir de ce pays d’Afrique australe. Pourquoi? Parce que le départ de Mugabe ne change rien à la souveraineté du Zimbabwe ni à ses relations stratégiques avec le voisin sud-africain, ainsi qu’avec la Chine et la Russie.

En ce sens, ce pays confirme avoir la carrure de ses voisins, l’Afrique du Sud, l’Angola ou encore la Namibie, dont les élites entretiennent d’ailleurs des relations étroites avec Moscou et Pékin, pour certains depuis leurs années de formation.

Si beaucoup ont parlé de «putsch» à l’occasion des récents événements, la réalité montre que c’est loin d’être le cas, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, l’armée nationale n’a pas écarté Robert Mugabe de manière autoritaire, mais a mené de longues discussions durant plusieurs jours avec le Présdient, qui avait toute latitude pour s’entretenir avec qui il souhaitait, notamment le président sud-africain Zuma, ou encore faire des déclarations télévisées. D’autre part, le respect des militaires zimbabwéens envers Mugabe était évident, le climat qui a régné durant les pourparlers sur l’avenir du pays le confirme. D’ailleurs et au vu des déclarations faites par le commandement de l’armée, ce n’était pas tant le Président de 93 ans qui était visé, mais bien certains représentants de son entourage.

Maintenant, parlons perspectives. Mugabe quitte la présidence en restant un héros national aux yeux de la majorité des citoyens du pays, dans la dignité et avec les honneurs. D’ailleurs compte-t-il prendre un repos bien mérité ou continuer à participer à la vie politique du pays? Personne ne peut encore répondre à cette question. Concernant l’avenir, il faut rappeler que l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front Patriotique (ZANU-PF), le parti au pouvoir, continuera très certainement à rester le parti politique le plus populaire du pays, à l’instar de l’ANC sud-africain, du MPLA angolais ou de la SWAPO namibienne, autant d’alliés de l’URSS en leur temps. Le ZANU-PF, à l’instar de ses homologues des pays voisins est un parti patriote, panafricaniste, anti-impérialiste.

Et pour reprendre l’exemple du voisin sud-africain, qui comme le Zimbabwe n’est pas sous mandat étranger, on peut préférer Mandela, Mbeki ou Zuma, qui ont chacun leurs particularités et leurs caractères, mais une chose les unit: l’amour de leur pays et l’opposition au néocolonialisme. La ligne politique de Harare, notamment internationale, restera donc très certainement inchangée.

Pour en venir au successeur probable de Mugabe, à savoir son camarade de longue date Emerson Mnangagwa, les vives critiques des médias occidentaux le visant confirment le fait que les forces néocoloniales ne devraient pas mettre la main sur le Zimbabwe. En effet et selon eux, Mnangagwa est tout aussi «radical et anti-occidental» que Mugabe, ce qui en dit long. il a d’ailleurs été inscrit sur la liste des sanctions américaines visant le Zimbabwe, et il y figure encore.

Mais en quoi le cas du Zimbabwe pourrait-il et devrait-il inspirer d’autres nations africaines, notamment d’Afrique subsaharienne francophone? Harare établit qu’il faut être maître de son destin, assumer sa souveraineté, la défendre, choisir les bons partenaires, même lors d’une passation de pouvoir. De plus, le Zimbabwe démontre qu’il convient de respecter les leaders nationaux qui ont joué un rôle crucial dans la libération de leur pays, même si le moment pour eux de quitter le pouvoir est arrivé: un contre-exemple à la manière honteuse dont ont été assassinés Lumumba, Sankara ou Kadhafi, sur ordre de forces néocoloniales.

Le Zimbabwe a en effet prouvé qu’un changement de pouvoir en Afrique pouvait se faire sans coups de feu, dans la dignité, sans interférence extérieure, sans intervention armée néocoloniale et dans le strict respect des valeurs qui caractérisent une nation. Avec toujours le ferme objectif de défendre sa souveraineté et de contrôler de ses ressources naturelles. Chapeau à lui! Quant à la Russie et la Chine, elles continueront à respecter la souveraineté de ce pays et à collaborer à tous les niveaux où elles partagent des intérêts avec le Zimbabwe. Aucun doute là-dessus.

https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201711221033989890-zimbabwe-afrique-francophone/

Mikhail Gamandiy-Egorov

Kemi Seba dialogue avec l’ambassadrice du Zimbabwe sur le président Mugabe

A voir et revoir. L’ambassadrice du Zimbabwe au Sénégal, Trudy Stevenson, s’exprime sur le président Robert Mugabe et sa politique, tellement décrié par les médias-mensonges occidentaux. Oui, vous avez bien vu : elle est blanche.

Il faut en finir avec la sale propagande occidentale une bonne fois pour toute.

« Nous sommes très heureux de voir que les positions responsables de la Fédération de Russie, surtout depuis les dernières années, nous ont fait revenir à une situation de plusieurs centres de pouvoir dans le monde ».

« Nous sommes très heureux de voir que les positions responsables de la Fédération de Russie, surtout depuis les dernières années, nous ont fait revenir à une situation de plusieurs centres de pouvoir dans le monde ».

Entretien avec M. Boniface Guwa Chidyausiku, ambassadeur de la République du Zimbabwe en Fédération de Russie. Suite de la première partie de l’entretien.

LVdlR : Après le référendum de mars dernier en Crimée ayant validé le ralliement de la presqu’île à la Russie, les USA ont voulu via l’Assemblée générale de l’ONU faire reconnaitre ce référendum comme étant illégitime. Grand nombre de pays n’ont pas soutenu cette initiative étasunienne et se sont massivement abstenus. Quant à votre pays, le Zimbabwe, il s’est non seulement abstenu de cette « initiative » mais s’en est en plus radicalement opposé. D’autre part, votre ministre de l’Environnement, de l’Eau et du Climat, M. Saviour Kasukuwere, a visité tout récemment la Crimée en tant que territoire russe. Est-ce que l’Occident a mis encore plus de pression sur votre nation depuis ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Leur pression a très peu d’effet sur nous car notre politique extérieure est véritablement indépendante. Nous nous sommes effectivement opposés à la résolution étasunienne à l’Assemblée générale de l’ONU qui visait le référendum de ralliement de la Crimée à la Russie. Au niveau de notre pays, nous reconnaissons que le ralliement de la Crimée à la Russie comme étant une décision souveraine des habitants de la Crimée. Car nous nous basons sur le principe du droit à l’autodétermination des peuples. Et le référendum de Crimée était en parfaite conformité avec ce droit. Quant à la visite de notre ministre en Russie de décembre dernier, lorsque un représentant d’un pays souverain rend visite à un autre pays souverain, il n’y aucune raison de ne pas visiter telle ou telle partie ou région du pays visitée. Donc aucune raison valable pour que notre ministre n’aie pas visité la Crimée. Et en ce qui concerne le Zimbabwe et comme déjà dis précédemment, nous reconnaissons le principe du droit d’autodétermination des peuples. Et cela a rejoint entièrement la volonté des Criméens qui ont exprimé leur volonté via le référendum de mars 2014. Nous avons donc soutenu ce principe et nous nous sommes opposés à la position ukraino-étasunienne à l’Assemblée générale de l’ONU.

LVdlR : Une question que j’aimerai également aborder avec vous M. l’Ambassadeur est celle du terrorisme. Nous sommes bien évidemment tous au courant de ce qui s’est passé tout récemment en France. Néanmoins ce que nous observons aujourd’hui est qu’il y a une attention énorme de certains médias sur cette attaque lorsque parallèlement nous assistons à un terrorisme pratiquement journalier à différents endroits du monde et qui ne mérite vraisemblablement pas une attention aussi ardue du mainstream médiatique occidental. Je pense évidemment à la Syrie, à l’Irak, au Nigeria, au Cameroun. Ces pays mènent quotidiennement une lutte sans relâche contre le terrorisme.D’ailleurs, plusieurs spécialistes pensent que les groupes terroristes opérant dans ces pays sont ouvertement manipulés de l’extérieur. Mais ma question à vous sera la suivante : quel est le meilleur moyen de combattre le terrorisme, aussi bien en Afrique que dans le reste du monde ? Comment s’opposer à toute forme d’extrémisme qui représente un vrai danger pour toute l’humanité ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Je pense que le terrorisme est en effet un défi à toute l’humanité. Quant à la presse internationale, en premier lieu occidentale, elle donne effectivement beaucoup plus d’attention lorsque le terrorisme touche les pays dits développés, ceux d’Europe ou les Etats-Unis. Mais comme vous l’avez bien mentionné, un grand nombre de personnes sont mortes en Afrique suite aux massacres terroristes, que ce soit au Nigeria, au Kenya, en Somalie, ou encore en Egypte. Evidemment les médias occidentaux n’y attachent pas une attention aussi importante que ce que nous voyons par rapport à la France. D’ailleurs le terrorisme visant la Russie n’a lui aussi pas une attention adéquate de la part de ces médias alors que nous avons observé des attentats terribles visant la Russie.

Nous devons donc affronter ce défi terroriste ensemble. Et nous ne devons pas attacher une plus grande attention lorsque cela touche les uns, et une moins grande attention lorsque cela touche les autres. Lorsqu’on observe les organisations terroristes telles que l’Etat islamique, Al-Qaida et d’autres encore, on y trouve souvent une participation américaine. Les USA ont participé à la création de certaines de ces organisations terroristes. Les djinns sont sortis alors de leurs bouteilles. Nous ne devons donc pas adopter des mesures à court terme qui demain nous causeront encore plus grand nombre de problèmes. Nous devons affronter le problème terroriste de front. Avec humanisme. Et où que ce soit : au Royaume-Uni, en Russie, au Zimbabwe ou au Nigeria. Le terrorisme est le terrorisme. L’extrémisme basé sur une justification religieuse représente un grand danger et nous devons le condamner sans répit. Et cela ne doit aucunement servir d’excuse. Et nous devons également accepter nos différences, qu’elles soient religieuses ou culturelles. Nous pouvons tous coexister car faisons tous partie de ce monde. Nous pouvons avoir des interprétations différentes, notamment basées sur la religion, mais cela ne doit jamais nous empêcher de coopérer. Et nous devons tous lutter contre le fanatisme, quel qu’il soit.

LVdlR : Vous avez mentionné un point très important : la solidarité internationale dans la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme. Mais un certain groupe de pays tentent, hier comme aujourd’hui, d’utiliser l’excuse de la menace terroriste pour intervenir dans les affaires intérieures d’autres pays, le tout dans l’objectif d’atteindre des avancées dans leurs intérêts géopolitiques. Commet devons-nous lutter également contre cela ? La Russie, la Chine, les nations BRICS et votre pays également, sont fermement opposées à ce type de politique. Que devons-nous faire ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Oui, c’est bien stupide de la part de certains Etats d’avoir des stratégies tellement à court terme, dont le seul but est l’élimination ou le changement de tel ou tel régime, dans tel ou tel pays, au point de créer des organisations terroristes pour atteindre ces objectifs malsains et effectuer les changements voulus. Nous avons tous vu ce qui s’est passé en Libye. Ils ont détruit un Etat qui fonctionnait bien, le tout au nom de la « démocratie ». Et aujourd’hui nous observons un Etat en échec évident. Mais ils sont toujours convaincus qu’ils savent quoi faire et mieux que quiconque. C’est un défi à nous tous. Et à ce titre, nous sommes très heureux de voir que les positions responsables de la Fédération de Russie, surtout depuis les dernières années, nous ont fait revenir à une situation de plusieurs centres de pouvoir dans le monde. Cela est bénéfique pour le monde entier. Ce qui a suivi les années 1990 et aussi le début du XXIème siècle, représentait tout simplement un monde unipolaire. Et lorsque nous nous trouvions dans l’unipolarité, certains se sont autoproclamés gendarmes du monde. Nous sommes heureux qu’aujourd’hui la Fédération de Russie, y compris au niveau du Conseil de sécurité de l’ONU, participe activement à la défense du droit international. C’est très important. Et lorsque nous voyons que certains pays au sein du Conseil de sécurité interprètent à leur guise le droit international selon leurs propres intérêts, cela est un vrai problème. Et c’est pourquoi nous sommes heureux d’avoir aujourd’hui un monde multipolaire devenu réalité et qui permet de rebalancer les forces et au final apporter une plus grande sécurité aux nations du monde entier.

LVdlR : Dernière question M. l’Ambassadeur. Vous avez bien mentionné la multipolarité du monde devenue désormais réalité. Mais il y a encore tellement de choses sur lesquelles il faut travailler. En tant que représentant de la République du Zimbabwe et de l’Afrique aussi, êtes-vous globalement optimiste et quels sont les domaines sur lesquels nous devons encore avancer ? Notamment dans le cadre de la volonté des BRICS d’interagir activement avec l’Afrique. Et comment pouvons-nous ensemble améliorer ensemble ce monde multipolaire ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Il y a un certain nombre de choses à faire encore. La première serait à mon avis de réformer le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies. Il est grand temps que l’Afrique ait son siège au sein du Conseil de sécurité. On pourrait alors décider du pays africain qui prendrait cette place. L’ONU a été créée en 1945. Et il faut avoir à l’esprit que la situation d’antan et celle d’aujourd’hui sont bien différentes. Nous devons donc nous adapter à la nouvelle réalité.

Deuxièmement, il faut en effet avoir une interaction encore plus importante entre l’Afrique et les pays BRICS. Dans les domaines du commerce, de la finance, ainsi que dans le domaine de la coordination des positions sur l’arène internationale.

Troisièmement, nous devons mettre fin au monopole du dollar US. Nous devons avoir beaucoup plus de devises de référence et ne pas avoir à dépendre d’une seule. Car nous savons parfaitement que ladite devise est un instrument de politique extérieure et aussi de déstabilisation des économies d’un certain nombre de pays. La Russie et la Chine se sont déjà mis d’accord de passer aux paiements dans leurs devises nationales dans le domaine de leur commerce mutuel et de leurs projets communs. C’est la bonne voie. Nous devons trouver des alternatives à la domination du dollar US.

LVdlR : Merci beaucoup M. l’Ambassadeur ! C’est un plaisir de s’être entretenu avec vous.

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Le plaisir est partagé.

http://french.ruvr.ru/2015_01_19/Nous-sommes-tres-heureux-de-voir-que-les-positions-responsables-de-la-Federation-de-Russie-surtout-depuis-les-dernieres-annees-nous-ont-fait-revenir-a-une-situation-de-plusieurs-centres-de-pouvoir-dans-le-monde-9554/

Mikhail Gamandiy-Egorov

« Nous, le Zimbabwe, avons assumé pleinement notre indépendance. Mais nous avons aussi dû payer un prix pour cela »

« Nous, le Zimbabwe, avons assumé pleinement notre indépendance. Mais nous avons aussi dû payer un prix pour cela »

Entretien avec M. Boniface Guwa Chidyausiku, ambassadeur de la République du Zimbabwe en Fédération de Russie (Partie 1)

C’est un honneur et un plaisir aujourd’hui d’avoir l’opportunité de nous entretenir avec S.E.M. Boniface Guwa Chidyasiku, ambassadeur de la République du Zimbabwe en Russie, poste qu’il occupe depuis 2011. Beaucoup de choses ont évolué depuis dans les relations entre les deux pays. A noter que le Zimbabwe fait partie des quelques nations africaines qui ont la capacité de mener leur propre politique indépendante et souveraine, sans l’interférence de forces externes néocolonialistes.

Mikhail Gamandiy-Egorov, La Voix de la Russie :

M. l’Ambassadeur, je vous remercie d’avoir accepté cet entretien pour La Voix de la Russie. Ma première question concernera probablement la coopération mutuelle entre nos deux nations, la République du Zimbabwe dont vous êtes le représentant ici et la Fédération de Russie. Comment pourriez-vous caractériser les relations actuelles entre les deux pays ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Merci beaucoup. Le Zimbabwe et la Fédération de Russie ont de très bonnes relations. Il n’y a encore pas si longtemps, nous n’avions pratiquement que des relations politiques. Mais depuis que je suis ici, les quatre dernières années, la situation a considérablement évolué. Nous assistons aujourd’hui au moment où plusieurs entreprises russes investissent au Zimbabwe. Et depuis quatre ans également, nos élites gouvernementales et du monde des affaires, travaillent activement ensemble au plus haut niveau. Le ministre Denis Manturov (ministre russe de l’Industrie et du Commerce, ndlr) a participé au lancement de la commission mixte russo-zimbabwéenne. Un accord de protection des investissements a été à ce titre également signé. Aujourd’hui, nous nous trouvons à l’étape où plusieurs entreprises russes opèrent au Zimbabwe. En 2014, une importante délégation russe est venue au Zimbabwe, dirigée par M. Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères. M. Manturov accompagnait lui aussi la délégation, ainsi que plusieurs grands consortiums russes, tels que Vi Holding, Rostec, de même la banque russe du commerce extérieur VTB. Et le grand événement de cette visite a été la signature entre la Russie et le Zimbabwe de l’accord intergouvernemental sur l’exploitation du gisement de platine de Darwendale. Une grande réussite pour nos deux pays.

LVdlR : Vous avez mentionné la récente visite de notre ministre des Affaires étrangères au Zimbabwe Sergueï Lavrov, que beaucoup ont appelé historique. Peut-on associer cette visite à un lancement de projets plus grands encore dans un avenir proche ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Nous pensons bien évidemment à une expansion des projets dans lesquels participent les consortiums russes et qui représentent déjà un montant d’investissements de 2,5-3 milliards de dollars. Et il y aura certainement d’autres retombées positives encore surtout que les accords en question prévoient également la formation des cadres zimbabwéens en Russie. D’ailleurs durant la visite en Russie de notre ministre des Finances et des Mines, nous avons discuté des possibilités d’importation au Zimbabwe d’équipements et de technologies russes. Ce qui permettrait au gouvernement russe d’avoir accès aux marchés existants au Zimbabwe dans ce domaine. Et un tel partenariat gagnant-gagnant aide bien évidemment aussi bien le Zimbabwe, que la Russie. Aujourd’hui, nos deux pays se trouvent sous les sanctions occidentales. Nous avons cela en commun. Et nous devons bien évidemment ensemble matérialiser nos capacités et opportunités communes.

LVdlR : Je vais vous poser une question M. l’Ambassadeur qui concerne probablement tout le continent africain. Durant la période soviétique, notre pays était très présent et actif en Afrique. Les années qui ont suivi l’éclatement de l’URSS, la Russie était très peu active sur le continent africain. Ces dernières années, nous sommes témoins d’un intérêt grandissant des deux côtés : des Russes pour l’Afrique, et de nombreux Africains pour la Russie. Croyez-vous que dans les quelques prochaines années, la Russie pourra atteindre, si ce n’est pas entièrement ses capacités d’antan en Afrique, mais au moins un niveau semblable ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Il y a effectivement de la bonne volonté des deux côtés, aussi bien du côté africain que russe. Il faut se rappeler et c’est bien triste, qu’après l’éclatement de l’Union soviétique, la Russie avait en face tellement de problèmes internes, notamment économiques, qui devaient être à tout prix réglés sans tarder. Mais je pense qu’aujourd’hui l’économie russe a atteint un niveau qui lui permette de retrouver les positions perdues et profiter de la vision positive des Africains vis-à-vis de la Russie et du peuple russe. Vous savez certainement aussi qu’un nombre important d’Africains ont été formés en Russie, et ce depuis la période soviétique. Donc il y a des spécialistes africains russophones dans bon nombre de domaines : commerce, technologies, management, enseignement,… Et la Russie possède également des spécialités dont l’Afrique a grand besoin. La Russie a un très grand savoir-faire dans le domaine pétrolier, ainsi que dans le domaine de l’exploitation minière ou encore dans l’énergie atomique. Ce sont tous des domaines dans lesquels la Russie peut exceller en Afrique. Donc ce que la Russie aurait besoin de faire, et c’est ce que fait déjà bien la Chine, c’est de fournir des financements aux sociétés russes désireuses de s’établir sur le continent africain. Et participer ainsi au développement de l’Afrique. La Russie doit bien sûr être à bord pour participer et voir la réalisation de ce rêve.

LVdlR : Une autre question qui concerne aussi bien le Zimbabwe, que tout le continent africain. Votre pays est probablement un des rares pays du continent capable de mener sa propre politique, indépendante et souveraine, sans interférences extérieures, que ce soit de la part de l’ex-colonisateur ou de qui que ce soit d’autre. Mais parallèlement, un nombre important d’Etats africains, notamment d’Afrique francophone, sont jusqu’à aujourd’hui contrôlés de-facto aussi bien par les anciennes métropoles coloniales que les USA, et ce au niveau politique, économique, financier, militaire. Avez-vous une idée sur comment ces nations pourraient dans les prochaines années acquérir leur liberté et une indépendance véritable ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Je crois que les nations africaines ont des positions différentes en ce qui concerne leur politique extérieure. Et c’est normal. Mais je crois aussi que l’Afrique doit être unie. Et je crois également et c’est important qu’afin de profiter pleinement de l’indépendance politique, il faut obtenir une indépendance économique. Et cela est impossible tant que tu es sous contrôle économique de quelqu’un d’autre. Et en arrachant l’indépendance économique, il est alors possible de faire profiter des ressources nationales aux citoyens africains. Et c’est à ce moment-là que nous pouvons alors parler d’indépendance véritable. Nous, le Zimbabwe, avons assumé pleinement notre indépendance. Mais nous avons aussi dû payer un prix pour cela. Donc c’est le leadership africain qui doit décider : adopter des demi-mesures ou alors des stratégies à long-terme, afin que les populations africaines puissent être maîtres de leurs ressources, et décider du futur de leurs nations. Sur ce chemin, il peut y avoir du mal et bon nombre d’obstacles, mais il faut effectivement du courage pour prendre cette décision.

LVdlR : Vous avez noté que votre pays a dû payer un prix pour assumer pleinement votre indépendance et votre liberté. Et parallèlement, vous êtes le pays qui fait partie de ceux qui ont souffert le plus des sanctions occidentales sur le continent africain. Et comme vous le savez certainement aussi, notre pays la Russie, fait aujourd’hui également face aux sanctions de l’Occident. Quels seraient vos conseils afin de résister efficacement à ces sanctions, compte tenu de la grande expérience du Zimbabwe sur cette question ?

S.E.M. Boniface G. Chidyausiku : Lorsqu’une nation fait face à des sanctions externes, il faut regarder la question en intégralité. Dans le cas de la Fédération de Russie, il faut voir que depuis l’éclatement de l’Union soviétique, les investissements dans la recherche et le développement n’étaient pas importants. Il était alors plus facile pour les entreprises russes d’importer des technologies occidentales au lieu de développer les leurs. Aujourd’hui, ces sanctions occidentales représentent de grandes opportunités pour la Russie afin de lui permettre de développer pleinement tout son potentiel. Que ce doit au niveau du R&D, IT et plus globalement des nouvelles technologies. Bien sûr il était facile d’importer des produits d’Europe mais il faut penser sérieusement au développement des produits fabriqués au pays. Tant qu’un pays est fortement dépendant des importations, alors il y aura toujours des forces voulant influencer votre politique : ceux qui sont opposés à votre pays et qui veulent faire changer votre politique sur l’arène internationale. Les Américains pensent qu’en imposant des sanctions contre la Russie, ils réussiront à changer le régime politique en Russie. Mais je crois que les citoyens russes le comprennent parfaitement et ne le permettront pas. Et je pense qu’il faut aujourd’hui mobiliser toutes les forces de la Russie pour défaire les plans malsains qui la visent directement.

Suite dans la deuxième partie de l’entretien.

http://french.ruvr.ru/2015_01_18/Nous-le-Zimbabwe-avons-assume-pleinement-notre-independance-Mais-nous-avons-aussi-du-payer-un-prix-pour-cela-7194/

Mikhail Gamandiy-Egorov

La Russie revient en Afrique, ou la visite historique de Lavrov au Zimbabwe

Russian Foreign Minister Sergei Lavrov (L) and Zimbabwean President Robert Mugabe shake hands in Zvimba on September 16, 2014.

Un pas significatif de plus confirmant le retour de la Russie sur le continent africain que beaucoup attendent depuis bien longtemps. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est arrivé à Harare, la capitale du Zimbabwe, accompagné d’une importante délégation d’hommes politiques et d’affaires russes. Il s’est entretenu avec l’emblématique président et leader du pays, Robert Mugabe.

La diplomatie russe poursuit ses avancées notables sur tous les fronts. L’Occident politique qui parlait « d’isolation » se retrouve au final bien ridiculisé. La Russie ne s’est non seulement pas retrouvée dans une quelconque isolation, mais au contraire n’a fait que confirmer ses nombreuses alliances (on se rappellera des récentes tournées de Vladimir Poutine en Chine et en Amérique latine), ainsi que renouer les alliances du passé.

Le Zimbabwe est en effet un ami de longue date de la Russie. L’URSS avait activement soutenu la lutte du peuple zimbabwéen contre le régime raciste et ségrégationniste, très semblable à celui de l’apartheid en Afrique du Sud, contre lequel l’Union soviétique soutenait aussi activement la lutte. Sergueï Lavrov n’a d’ailleurs pas manqué de souligner que Robert Mugabe est une légende et une très grande figure historique. En effet, Mugabe représente à ce jour aux yeux de ses concitoyens et de très nombreux Africains le symbole de la lutte contre un régime de ségrégation raciale, semblable à celui qui a perduré près d’un demi-siècle dans l’Afrique du Sud voisine, ainsi que contre le colonialisme et le néocolonialisme britannique.

Pour parler maintenant de l’aspect économique, la Russie et le Zimbabwe ont signé donc ce mardi un accord pour un montant total de trois milliards de dollars d’investissements. La coentreprise russo-zimbabwéenne Rushchrome Mining assurera ces investissements pour la construction d’une mine de platine à Darwendale, à 70 km à l’ouest de Harare. Ce gisement représente l’un des plus importants au monde en termes de platine et d’autres gisements métalliques (des réserves prouvés de 19 tonnes de platine et de 755 tonnes d’autres métaux du groupe platine). A savoir également que dans ce domaine, le Zimbabwe abrite tout simplement la seconde plus grande réserve mondiale (devant la Russie et derrière l’Afrique du Sud).

Ce grand projet commun qui sera financé par la Russie compte sur une production de 600 000 onces de platine par an et avec pour résultat notable la création d’au moins 8000 emplois. Selon les estimations russes, le retour sur les investissements du projet sera de cinq ans. A ce sujet, le message du président zimbabwéen était lui aussi très clair : « Ce projet va nous permettre d’émerger en tant que nation. Nous ne pouvions faire cela avec des ennemis. Non, c’était impossible. Nous ne pouvions le faire qu’avec des amis ».Les amis désignés étant clairement la Russie et les autres pays des BRICS (la Chine et l’Inde étant également très présents économiquement au Zimbabwe, sans oublier bien évidemment l’Afrique du Sud qui entretient des relations très étroites avec son voisin). Les ennemis, eux, se reconnaitront sans aucune difficulté.

Robert Mugabe n’a pas non plus manqué d’apporter une fois encore son soutien politique et diplomatique à la Russie face aux sanctions occidentales, qu’il a qualifié d’illégales. « Ce sont des sanctions illégales. Une petite partie de notre communauté internationale, qui méprise la loi, cherche à dominer le reste du monde. Nous répondons : non ! ».

De son côté, Sergueï Lavrov a souligné que « l’Afrique était l’un des piliers du système mondial en évolution », rappelant par la même occasion que le système du monde unipolaire représente désormais le passé. « Il n’y a plus de retour possible vers un monde unipolaire, ni bipolaire d’ailleurs. L’avenir du monde ne peut être que multiple, sinon le système ne pourrait être durable »,a-t-il ajouté.

Mis à part les accords commerciaux, dont le principal est bien évidemment celui lié à la mine de platine de Darwendale, Lavrov et Mugabe ont scellé le partenariat dans le domaine militaire et technique. Le Zimbabwe qui a longtemps et jusqu’à aujourd’hui dû vaillamment résister aux interventions néocoloniales occidentales, en premier lieu britanniques et étasuniennes, se doit de défendre son indépendance et sa souveraineté jusqu’au bout. Une indépendance et une souveraineté que beaucoup d’autres nations africaines aspirent à arracher dans un avenir proche.

Pour finir, il faut dire que la Russie commence donc à confirmer par les faits et gestes son véritable retour en terre africaine. Et à l’instar des autres membres des BRICS, elle compte offrir à ce riche et brillant continent, trop longtemps martyrisé par des forces obscures, un vrai partenariat gagnant-gagnant. D’autre part, la Russie renouvelle donc ses alliances qui ont été gelées à la chute de l’URSS. Toutes ces raisons font que la Russie est véritablement attendue en Afrique. C’est ce que n’a pas manqué de rappeler Robert Mugabe et les autres représentants gouvernementaux zimbabwéens, ainsi que les principales figures des secteurs économique, de la défense et des médias. La Russie continuera donc d’agir activement dans ce monde multipolaire, dans lequel nous vivons aujourd’hui. De leur côté, les nations africaines nous attendent et comptent sur nous. Nous ne pouvons pas les décevoir.

http://french.ruvr.ru/2014_09_17/La-Russie-revient-en-Afrique-ou-la-visite-historique-de-Lavrov-au-Zimbabwe-5153/

Mikhail Gamandiy-Egorov